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Hors-sol : la serre semi-fermée lève les verrous

La serre semi-fermée préfigure l’outil de production de tomate hors-sol de demain. Elle permet de s'affranchir des conditions extérieures, mais son pilotage optimum est déterminant pour accéder au niveau de rendement requis pour amortir son investissement.

« L’innovation majeure d’une serre semi-fermée est le découplage des flux d’air entrants et sortants pour leur gestion optimale, pour une maîtrise du renouvellement d’air dans la serre et pour sa filtration », explique Vincent Clément, producteur du groupe Rougeline, qui regroupe plus de 200 ha de serre dont une trentaine d’hectares de serre semi-fermée. Ainsi, la serre semi-fermée permet de s’adapter aux contraintes de production que rencontrent les serristes, notamment une pression sanitaire de plus en plus forte et un climat de plus en plus chaud. L’outil permet également de répondre aux exigences du marché en termes de sécurisation de la production et de respect de l’environnement.

Homogénéité du climat indépendante

« Des températures plus douces en hiver ont permis aux aleurodes de rester actifs douze mois sur douze », remarque Vincent Clément. La pression parasitaire exercée par d’autres bioagresseurs comme Cyrtopeltis, Tuta absoluta ou les thrips est également croissante. « La filtration des flux entrants d’une serre semi-fermée permet un meilleur contrôle des ravageurs. C’est la raison initiale de la construction de la première serre semi-fermée en 2013 dans le groupe Rougeline », précise le spécialiste. Cet avantage se traduit directement par une moindre utilisation d’insecticide. Ainsi, le technicien a pu constater une baisse de 60 % des IFT chez les serristes du groupe Rougeline utilisant ce type de serre. De plus, 95 % des surfaces de serre semi-fermée du groupe ont été engagées dans le programme Zéro résidu de pesticides en 2018 avec une valorisation commerciale supplémentaire de 20 à 30 % pour les produits labellisés.

La serre semi-fermée, c’est aussi une amélioration des performances agronomiques en rapport avec les évolutions climatiques. « Les températures estivales supérieures à 35 °C deviennent « normales » dans le sud de la France et imposent le maintien d’un certain confort climatique pour les plantes », commente Vincent Clément. Ainsi, le rafraîchissement en période chaude par l’utilisation du pad fan des serres semi-fermées est un atout en faveur de la productivité. « Nous avons pu conserver des températures inférieures à 30°C dans la serre, malgré les températures caniculaires de cet été et un blanchiment plus faible », assure-t-il. Ce dernier point, facteur de luminosité, permet aussi d’augmenter les densités estivales par extension d’extra-bras. De plus, l’ouverture limitée de la serre permet un « confinement » assurant la conservation de niveaux de CO2 élevés en journée et en été. Les injections estivales de CO2 sont ainsi possibles et plus efficientes. « Dans une serre semi-fermée, l’homogénéité du climat n’est pas dépendante du climat extérieur », précise aussi Vincent Clément. De fait, la stratification des couches thermiques repousse les températures élevées et l’humidité contre la toiture, ce qui facilite la déshumidification en hiver et au printemps en concentrant au faîtage l’air chaud et humide (voir schéma).

Un nombre accru de paramètres

Ainsi, dans le groupe Rougeline, les rendements d'une serre semi-fermée, par rapport à ceux d'une serre classique ventilée en toiture, sont supérieurs de 8 à 10 %  en tomate grappe, de 10 à 15 % en tomate cocktail et de 12 à 15 % en petits fruits. « Nos résultats sont conformes aux valeurs données par le CTIFL », constate Vincent Clément. Selon ces données, la serre semi-fermée assure un gain de compétitivité par l’amélioration des rendements. Elle apporte un gain supplémentaire par une réduction des coûts énergétiques par kilo de tomate. Elle réduit et rend plus efficiente l’utilisation des intrants (eau, engrais, produits phytosanitaires). Mais les améliorations ne s’arrêteront pas là. Le spécialiste, qui prévoit une évolution du parc de serres classiques vers les serres semi-fermées, envisage aussi l’extension de l’intégration d’éclairage additionnel. Celui-ci s’accompagne déjà de modifications des plannings de production et de conduite de la plante. Il permettra de conserver des niveaux de production et de qualité gustative importants même en période hivernale. Selon le technicien, les paramètres extérieurs influent moins sur le pilotage climatique de la serre, ce qui permet une évolution et une optimisation des paramètres de conduite de la plante (densité, CO2, lumière). En revanche, le nombre accru de paramètres intérieurs (température, hygrométrie, taux de renouvellement, vitesse de ventilation, pourcentage d’ouverture…) conduit à une automatisation de la gestion du climat. L’objectif est d’accéder à la rentabilité d’un outil plus performant mais également plus coûteux en termes d’investissement. Selon le producteur, la serre semi-fermée devient aussi un outil pertinent pour la production de fraise hors-sol, notamment dans la démarche Zéro résidu de pesticides. Vincent Clément prévoit aussi l’intégration de nouveaux équipements pour faire évoluer l’outil vers la serre à énergie positive (panneaux photovoltaïques) et autonome (production de CO2 par captage aérien), ainsi que la robotisation de tâches pour réduire la pénibilité du travail. Le projet australien Sundrop Farm, 20 ha de serres semi-fermées autonomes en énergie utilisant le soleil et l’eau de mer, dont il assure le suivi technique, est-il précurseur des serres européennes ?

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