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pomme/poire
Des doubles axes pour des vergers étroits

Double axe, biaxe, Bibaum® : les plants formés avec deux axes sont vendus sous plusieurs appellations. Mais ils n’ont qu’un seul but : former des vergers étroits avec des consignes de taille simplifiées.

Le double axe fait son apparition en France. L’objectif de cette nouvelle conduite de plants de fruitiers est de répondre aux exigences des vergers étroits. « La conduite en haies fruitières a pour but de faciliter les opérations de taille, d’éclaircissage et de récolte, tout en conservant une bonne production et des fruits colorés au potentiel gustatif élevé », résume Laurent Roche, du Ctifl de Lanxade (24). Ces vergers de fruits à pépins sont pour la majorité d’entre eux plantés en axes. « Or, si l’axe reste une valeur sûre agronomiquement, sa formation et sa taille nécessitent souvent un oeil expert », souligne Christian Lavoisier de la station expérimentale de la Morinière (37). Mais la main-d’oeuvre expérimentée se fait rare. Pour la plupart des travaux en verger, les producteurs emploient une main-d’oeuvre temporaire parfois moins qualifiée. « Pour ce personnel, les consignes de taille doivent être simples », insiste l’ingénieur du Ctifl. Avec les plants en double axe, elles peuvent l’être : « Eliminer les plus grosses branches. » Et celles-ci sont moins nombreuses en biaxe.

Une conduite à réfléchir selon la vigueur

« Physiologiquement, la vigueur de l’arbre est répartie sur deux axes, continue le spécialiste. Les futures branches fruitières sont donc moins vigoureuses qu’en axe ». La vigueur inférieure de ces plants les rend plus adaptés à la formation d’arbres étroits.

« En supprimant les branches fortes, le but est de renouveler régulièrement l’ensemble des structures, ajoute Christian Lavoisier. Cette pratique permet d’homogénéiser les branches fruitières ». Plus fines et plus ouvertes, elles sont aussi beaucoup plus nombreuses. Comme le nombre d’axes par rang est plus important qu’en conduite en monoaxe, la densité de branches fruitières est donc plus importante qu’en conduite en axe. Le remplissage de la haie avant la troisième feuille est ainsi facilité. « Les plants en double axe sont particulièrement adaptés sur des variétés très vigoureuses ou des sols fertiles. Nous continuons à conseiller l’axe sur des variétés pour lesquelles des arbres de gros volume ne sont pas un problème, comme Granny Smith », témoigne Paul Bertner, des services techniques agricoles du Sud-Tyrol. Selon la vigueur du sol, celle du porte-greffe et celle de la variété, les doubles axes ne sont pas toujours appropriés. « Greffées sur M9, des variétés peu vigoureuses comme Joya® Cripps redcov ne sont pas recommandées en biaxe », note Laurent Roche. « Dans des conditions agronomiques moyennement fertiles, le développement vertical de l’arbre se fera moins rapidement qu’en axe, précise Christian Lavoisier. La division de la vigueur et l’inclinaison des deux axes en première année peut ralentir leur croissance et pénaliser la mise à fruits ». Une des solutions dans ces situations pourrait être l’utilisation de porte-greffe comme le Geneva® G11cov . « Ce porte-greffe confère une croissance plus importante et notamment de l’axe, renchérit-il. Cette caractéristique est adaptée à l’occupation de l’espace en conduite en haie fruitière ». Cette hypothèse pourra se vérifier dans quelques années. Les essais mis en place au Ctifl et à la Morinière comparent en effet plusieurs variétés en axe et en double axe, sur M9 et Geneva® G11cov .

« Le double axe préforme l’arbre dans le plan. Il est donc mieux prédisposé à la mécanisation des opérations en vergers et à l’utilisation d’équipements d’assistance à la récolte »

LAURENT ROCHE, du Ctifl de Lanxade

Vérifier le gain de temps de taille

Les vergers en biaxe sont encore peu nombreux en France. Mais les premiers résultats sont encourageants. En 10ème feuille, les rangs en double axe à la Morinière ont une production supérieure à ceux conduits en axe sur les variétés Pink Lady® Rosy Glowcov et Brookfield® Baigentcov. Mais la densité de plantation est plus importante en verger biaxe. Sur le site de Lanxade, les temps de taille et de récolte commencent à être mesurés cette année sur un verger en 3ème feuille. « Nous voulons vérifier la facilité des travaux en vergers », explique Laurent Roche. A la station de la Pugère (13), cette hypothèse sera aussi vérifiée avec un essai comparant double axe et axe sur Galavalcov et Buckeye® Simmonscov. « Nous avons aussi une modalité de biaxe formé en verger », ajoute Marie Charreyron, expérimentatrice à La Pugère. Avec des haies plus étroites, il est possible de resserrer les rangs. Les distances standards sont de 4 m par 1 m. « Nos essais sont plantés à 3,30 ou 3,5 m en inter-rang », précise Christian Lavoisier. Ils sont à 3,75 m à la Pugère. Au Sud-Tyrol, les recommandations vont jusqu’à 3 m et certains producteurs plantent à 2,8 m. Sur le rang, les plants sont généralement espacés de 1,25 m. Les distances de plantation sont à moduler selon le type de sol et les variétés. Comme chaque arbre a deux axes, la densité peut aller jusqu’à 5 000 axes par hectare. « Un des intérêts de passer d’un inter-rang de 4 m à un inter-rang de 3,5 m ou de 3,3 m est aussi de replanter sur un sol moins utilisé », note le spécialiste du Val de Loire. En diminuant les distances des inter-rangs, la hauteur du verger doit aussi être réduite. « Pour continuer à assurer assez de luminosité pour les arbres, la hauteur de l’arbre doit être légèrement inférieure à la largeur de l’inter-rang », rappelle le technicien de la Morinière. De plus, changer les distances de plantation n’est pas toujours possible quand la parcelle se trouve à l’intérieur d’un bloc couvert de filets paragrêle. « La plantation en vergers étroits en double axe n’est avantageuse que sur des grandes parcelles ou de nouvelles plantations », fait remarquer Christian Lavoisier. Pour Laurent Roche l’avenir du verger français se trouve là : « Etant donné les investissements pour installer un verger de pommiers, compris entre 60 000 et 85 000 euros/ha, il est impératif d’optimiser la production au mètre carré. » Christian Lavoisier, lui, tempère ces propos : « Mais nous devons d’abord valider ces types de conduite avec les producteurs avant de changer le verger français. »

Bibaum®, une marque italienne déposée

Le pionnier de la production de plants en double axe en Europe est le pépiniériste Mazzoni. Il a commercialisé ses premiers plants en 2006 après plus de dix ans de recherche pour trouver les techniques permettant d’obtenir des plants à deux axes de vigueur équivalente. Un brevet industriel protège au niveau européen cinq techniques d’obtention de plants en double axe en pépinière. Chaque année entre 600 000 et 700 000 plants de pommiers, poiriers et cerisiers sont commercialisés sous la marque Bibaum®. Le Piémont et le Sud Tyrol sont les premières régions à accueillir cette conduite sur pommiers. Dans le Sud-Tyrol, les plants Bibaum® représentent près de 5 % des nouvelles plantations. En poirier, c’est l’Emilie Romagne qui compte le plus grand nombre de plants.

Un matériel végétal de bonne qualité

La qualité du matériel végétal est d’autant plus importante en double axe. « Selon la qualité des plants, on peut avoir des résultats agronomiques allant du simple au double », pointe Christian Lavoisier de la station de la Morinière. La section du porte-greffe et la section des axes sont la preuve de cette qualité. Ils sont déterminés par la préparation du plant en pépinière. La création d’un double axe en verger avec un rabattage du scion après greffage sur table et le choix de deux pousses végétatives peut être plus économique. « Mais elle demande une technicité du producteur proche de celle des pépiniéristes pour obtenir deux axes qui se développeront uniformément », témoigne l’expérimentateur. De plus, cette formation du biaxe en verger retarde l’entrée en production.

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