Accord de libre-échange UE/Nouvelle-Zélande
AOP Kiwi de France : « Les organisations de producteurs européens n’ont pas la puissance financière de Zespri et subissent une concurrence grave »
François Lafitte, président de l’AOP Kiwi de France, répond aux questions de FLD sur l’accord de libre-échange UE/Nouvelle-Zélande, son impact potentiel sur le marché européen du kiwi et les points d’inquiétudes pour les producteurs français.
François Lafitte, président de l’AOP Kiwi de France, répond aux questions de FLD sur l’accord de libre-échange UE/Nouvelle-Zélande, son impact potentiel sur le marché européen du kiwi et les points d’inquiétudes pour les producteurs français.
L’accord de libre-échange UE/Nouvelle-Zélande, annoncé le 30 juin dernier, prévoit notamment une suppression, dès son entrée en vigueur, des droits de douane sur l’export des kiwis néo-zélandais vers l’UE. Le mastodonte néozélandais du kiwi Zespri vient de saluer par voie médiatique cet accord et annoncer d’ores et déjà la volonté d’accroître ses volumes vers l’Europe.
Cet accord, décrié par les éleveurs français, qui craignent une concurrence déloyale en lait et viandes ovines et bovines, inquiète-t-il également notre filière française ? François Lafitte, président de la jeune AOP Kiwi de France, répond aux questions de FLD.
Que penser de cet accord de libre-échange avec la Nouvelle-Zélande ?
François Lafitte : A l’AOP Kiwi de France, nous sommes très informés sur cet accord de libre-échange et ce depuis le début des négociations. Nous sommes favorables à la libre circulation des marchandises et des personnes et nous sommes satisfait que l’Europe puisse signer un tel accord. Nous avons d’excellentes relations avec les institutions et professionnels néo-zélandais. Je suis personnellement un professionnel qui a connu depuis 1980 l’évolution économique de ce pays et son professionnalisme.
Est-ce que cet accord est de nature à inquiéter notre filière française du kiwi ?
François Lafitte : En tant que professionnels producteurs de kiwis en France, nous avons de bonnes relations avec les producteurs néo-zélandais et de réguliers échanges. Mais deux points peuvent nous inquiéter. Le premier, vis-à-vis de la Commission européenne : l’absence de réciprocité. Les Néo-zélandais exportent librement en Europe mais les producteurs français ne peuvent pas exporter en Nouvelle Zélande. Ce genre de distorsion est inacceptable et malheureusement a été régulièrement observé lors de précédents accords de libre-échange avec d’autres pays. Une absence de volonté politique de la Commission européenne met en permanence les producteurs de fruits et légumes européens en difficulté !
Vous parlez de deux points d’inquiétude. Quel est le second ?
François Lafitte : Il est vis-à-vis du gouvernement néo-zélandais et concerne le non-respect de leur signature à l’OMC et la nécessaire équité dans une économie libérale, c’est-à-dire l’absence de monopole organisé par l’Etat néozélandais. Or dans le cas présent, le groupe Zespri est une société privée propriété des producteurs néo-zélandais qui bénéficie d’un agrément annuel pour monopoliser l’exportation des kiwis néo-zélandais en dehors de l’Australie. Cette situation est anormale !! Si l’exportation et son organisation des producteurs de kiwis néo-zélandais n’est pas une difficulté, ce qui est inacceptable est le rôle que joue cette entreprise en Europe ! Pour Zespri, sa puissance financière générée par le statut monopolistique lui donne des moyens pour créer des conditions de concurrence en Europe chez les producteurs européens.
Zespri serait donc en position de quasi-monopole ? Avec un risque de concurrence déloyale et de distorsion de marché ?
De fait, une distorsion de la situation économique à la production et dans la distribution des fruits et une concurrence faussée est vécue par les acteurs européens locaux. Les organisations de producteurs européens n’ont pas la puissance financière de Zespri et subissent une concurrence grave. Elle met potentiellement la production européenne en sous-traitance et en dépendance économique vis-à-vis des intérêts néo-zélandais. Il existe un risque réel de perte d’autonomie économique et de déstabilisation des organisations de producteurs européens. Le pouvoir de décision pour l’avenir peut se déplacer en dehors de l’Europe. La Commission Européenne doit avoir des exigences sur le respect de l’équité et l’absence de distorsion.