Pour engraisser
Sevrer les broutards lourds dès 180 jours
L’Institut de l’élevage et la ferme des Établières ont mené une étude pour déterminer l’impact de l’âge au sevrage du broutard sur ses performances de croissance
et sur sa qualité de carcasse.
Sur le marché du broutard en France, la suppression des contraintes liées à l’âge dans le cadre de la prime spéciale au bovin mâle ont soulevé beaucoup d’interrogations chez les éleveurs et en particulier sur l’impact que pourrait avoir l’âge variable du sevrage des broutards sur l’engraissement », rapporte Didier Bastien, chef de projet production et qualité de la viande à l’Institut de l’élevage.
Dans ce contexte, une étude a été conduite à la station expérimentale des Établières (chambre d’agriculture de Vendée) afin de tester les performances d’animaux sevrés à des âges différents. Trois séries d’essais ont été mis en place en race charolaise pour comparer les résultats de production de jeunes bovins sevrés précocement (environ six mois) avec d’autres sevrés à un âge plus conventionnel d’environ neuf mois.Tous ces animaux étant nés à l’automne (début septembre).
Durant la période hivernale, tous les veaux ont été conduits de manière identique. Au moment de la mise à l’herbe, fin mars, deux lots ont été formés. Un expérimental, nommé « sevrage précoce », constitué de veaux sevrés à un peu plus de six mois et laissés en bâtiment pour être engraissés, sans être remis à l’herbe. Et un témoin, dit « sevrage tardif », composé des animaux mis à l’herbe avec leurs mères pour une durée de 2,5 mois, avant d’être mis à l’engraissement en bâtiment mi-juin. « La ration distribuée est identique aux deux lots. Elle était constituée d’ensilage de maïs à volonté et complémentée avec du tourteau de soja (1,2 kg), du blé (1,8 kg), 200 grammes de CMV type 5/25 par jour et de la paille à volonté », poursuit Didier Bastien.
L’objectif était d’atteindre un poids à l’abattage d’environ 430-440 kg de carcasse. Les résultats obtenus pour les deux conduites ont été identiques que ce soit pour l’âge à l’abattage, le rendement à l’abattage, la conformation, l’état de l’engraissement et le poids des carcasses. « Cette étude nous a ainsi permis d’attester de la possibilité technique de sevrer des broutards charolais dès 180 jours », constate Franck Chaigneau, responsable de la ferme des Établières.
Préparation au sevrage et transition soignée
Les responsables de l’étude insistent par contre sur l’utilité de réaliser une préparation puis une transition alimentaire soignée, d’au moins cinq à six semaines pour les veaux sevrés précocement. « Cette transition est importante mais facile à effectuer si une table d’alimentation est accessible à partir des cases à veaux. Il est nécessaire d’alimenter les animaux lorsqu’ils sont encore avec leurs mères en bâtiments, pour les préparer. La transition des bovins sevrés tardivement après une période à l’herbe, pourrait éventuellement représenter plus de risques en raison d’un changement plus important. D’autre part, les petits veaux sevrés en avril sont plus fragiles. Je conseille donc de privilégier une alimentation de qualité et d’enlever les refus chaque jour », continue Franck Chaigneau. Autre constatation, les mâles sevrés à six mois et présentant les meilleures performances de croissance sont ceux pesant plus de 270 kg au moment du sevrage. Ceux-ci ont obtenu un même poids vif à l’abattage avec une durée d’engraissement réduite de deux mois (16,3 mois) par rapport aux animaux sevrés au même âge mais plus légers à ce moment là (durée d’engraissement de 18,3 mois). Les sevrés précocement de plus de 270 kg ont par ailleurs atteint les 430 kg de carcasse à l’abattage un mois plus tôt comparativement aux animaux de même poids en mars mais remis à l’herbe avec leurs mères. Alors que pour les animaux sevrés à neuf mois, les plus légers ont présenté les mêmes croissances globales jusqu’à l’abattage que les plus lourds mis à l’herbe.
Privilégier l'herbe pâturée
Les consommations alimentaires des deux lots ont été mesurées. Du fait des 2,5 mois supplémentaires en engraissement du lot sevrage précoce, les besoins en fourrages et en concentrés ont été plus importants dans cette conduite. « Le mode de sevrage est à raisonner en fonction des disponibilités à la fois en surfaces de pâturage, en ensilage de maïs, en concentrés et surtout selon le coût respectif de ces aliments. L’herbe pâturée reste l’aliment le plus économique à favoriser.
Le sevrage précoce peut-être une solution face à un manque d’herbe pour un couple mère avec veau mâle. Dans ce cas, il est conseillé de sevrer les plus lourds et d’assurer une période de transition longue, alors que les plus légers iront à l’herbe avec leurs mères », insiste Franck Chaigneau. L’âge au sevrage a également des conséquences sur la conduite des mères. Le besoin en fourrages est plus faible pour celles dont les veaux ont été sevrés à six mois et la conduite à l’herbe est plus facile que celle d’un couple mère-veau. « On peut imaginer que les enseignements soient les mêmes pour des veaux nés l’hiver et sevrés précocement mi-juin avec une bonne préparation avant le sevrage, même si on ne l’a pas testé », évoque Didier Bastien. Au-delà des écarts de consommation, il faut également prendre en compte les différences entre les deux conduites sur la paille, le temps de travail et l’occupation des bâtiments.