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Quelle fertilisation azotée pour les prairies multi-espèces ?

Quel est l’effet d’un apport d’azote en première année sur une prairie multi-espèces ? Quelle est la dose à apporter et faut-il la fractionner ? Un essai d’Arvalis mené à la Ferme Expérimentale des Bordes apporte des précisions sur les préconisations de fertilisation. 

Les modulations testées croisaient un apport à 200° jour, un apport à 400 °jour et un apport 10 jours après la première coupe, pour un total de 30 à 180 unités sur l’année en un ou deux apports. En première ou en deuxième année.
© Arvalis Institut du Végétal

Les éléments de connaissance disponibles jusqu’à lors indiquaient qu’un apport de 50 à 100 kg d'azote efficace par hectare et par an à une prairie multi-espèces (composée d’au moins trois espèces de deux familles différentes) permettait de maximiser le rendement sans trop pénaliser les légumineuses. « Cette référence a été établie à partir de la synthèse d’une bonne vingtaine d’essais conduits en conditions pédoclimatiques très variées en Europe » a expliqué Anthony Uijttewaal d’Arvalis Institut du Végétal lors d’un webinaire le 30 novembre 2021.

La fertilisation azotée d’une prairie multi-espèces vise à obtenir le meilleur rendement et un maximum de fixation d’azote atmosphérique par les légumineuses. « Elle doit favoriser les graminées sans conséquence majeure sur le développement des légumineuses dès lors que celles-ci sont bien installées en sortie d’hiver. » Il est par ailleurs conseillé actuellement de ne pas apporter d’azote la première année dans l’optique justement de favoriser une bonne installation des légumineuses.

Pour actualiser et préciser ces préconisations, Arvalis a réalisé de 2017 à 2020 un essai à la ferme expérimentale des Bordes dans l’Indre. Il portait sur une prairie multi-espèces destinée à la fauche (dactyle, fétuque élevée, ray-grass anglais, luzerne et trèfle violet) d'une durée de trois ans. Pour une première série de modalités, une fertilisation était apportée la première année selon de multiples doses. Puis en deuxième et troisième années, la prairie recevait 60 kgN/ha à 200 °jour. Une seconde série de modalités a été faite sans apport d’azote la première année, avec une dose d’azote modulée en deuxième année, puis 60 unités à 200 °jour la troisième année.

Les modulations testées croisaient un apport à 200° jour, un apport à 400 °jour et un apport 10 jours après la première coupe, pour un total de 30 à 180 unités sur l’année en un ou deux apports. 

Un apport d’azote en première année peut être intéressant

Sans fertilisation, le témoin a donné 8,7 tMS avec 70 % de légumineuses sur la première année – un résultat de très bon niveau. Mais le meilleur résultat de l’essai a été obtenu avec un apport de deux fois 45 unités la première année : un rendement de 9,6 tMS/ha avec 53 % de légumineuses. La différence de rendement entre les deux n’est pas statistiquement significative.

« Cependant, à cause de la météo, le premier apport n’a pas pu être apporté au moment où il aurait été le mieux valorisé. On peut supposer qu’avec un apport d’azote mieux valorisé, l’amélioration du rendement aurait été significative » observe Carole Gigot.

L’essai a mis en évidence une baisse du taux de légumineuses par rapport au témoin dès l’apport d’une dose de deux fois 45 kgN/ha en première année. En corrélation, le taux de MAT a baissé par rapport au témoin de 1 à 3 % en fonction de la dose apportée.  

Les expérimentateurs ont ensuite regardé l’effet d'un apport d’azote la première année VS l'attente de la deuxième année pour fertiliser. « Quand on attend la deuxième année pour fertiliser, on observe une légère baisse du rendement cumulé sur les trois ans. Cette baisse représente environ 2 tMS/ha sur les 27 à 30 tMS/ha produites sur les trois années de fauche de la prairie et elle n’est pas statistiquement significative. » Par contre, cela permet d’améliorer significativement le taux de légumineuses, et avec lui le taux de MAT. En particulier, la modalité avec pas d’apport en première année et deux apports de 45 unités en deuxième année fait passer de 27 à 46 % le taux de légumineuses et de 13 à 14 % le taux de MAT (par rapport à la même dose apportée en première année).

« En synthétisant les résultats de cet essai, nous concluons que la dose idéale du premier apport se trouve entre deux apports de 30 kgN/ha et deux apports de 45 kgN/ha. Ces modalités donnent les meilleurs rendements et les meilleurs taux de légumineuses. » Ce premier apport d’azote peut être fait la première année ou la deuxième année. « Dans la situation de cet essai - avec des légumineuses très bien implantées, fertiliser dès la première année a été intéressant pour favoriser le rendement. On peut supposer que si les légumineuses sont mal implantées, et que leur taux n’est pas à la hauteur recherchée en première année, il est préférable d’attendre la deuxième année pour commencer à apporter de l’azote.»

Une approche économique avec un coût de l’azote faible (conjoncture 2017) ou un coût de l’azote très élevé (conjoncture 2021) a montré que cette préconisation aboutit à un coût de la tonne de matière sèche récoltée sur trois ans parmi les plus faibles par rapport aux autres modalités testées dans cette essai. 

Un apport d’azote après la première coupe est bien valorisé

Cet essai a aussi montré qu’un apport d’azote de 30 unités dans les dix jours après la première coupe fait baisser le pourcentage de légumineuses du second cycle, mais que cette baisse est légère (de 8 % environ). Et cette fertilisation permet d’améliorer le rendement grâce au développement des graminées (de +0,4 à +0,9 tMS/ha sur le second cycle en première et en deuxième année d’exploitation). D’après ce résultat, un apport d’azote dans les dix jours après la première fauche est donc plutôt bien valorisé.

Arvalis a aussi regardé si retarder le premier apport d’azote permet aux légumineuses de mieux se développer, en leur laissant un peu plus de temps en sortie d’hiver pour reprendre leur développement. Ceci en comparant sur la première coupe en première année la modalité avec un seul apport de 60 kgN/ha à 200 °jour à celle avec un seul apport à 400 °jour. « On a observé le contraire : il y a eu moins de légumineuses avec l’apport à 400 °jour. Mais ceci peut s’expliquer par les conditions particulières de l’année 2018 qui n’ont pas permis une bonne valorisation de l’apport d’azote à 200 °jour. » Affaire à suivre donc.

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