Jean-Pierre Theau, Inra de Toulouse
"Prendre confiance en l'herbe"
Utilisables partout en France, typologie des prairies et sommes de températures apportent de nouveaux repères pour la gestion des prairies diversifiées.
La typologie des prairies, élaborée au départ dans le Sud-Ouest, est-elle utilisable dans toutes les régions françaises ?
Jean-Pierre Theau - Oui, où que l’on soit en France, on peut appliquer cette méthode. La typologie des prairies comprend 40 graminées représentatives de la diversité des prairies françaises. Partout, nous avons observé des relations identiques entre les graminées et les caractéristiques des prairies, même au Brésil avec des espèces inconnues en France. Plus une graminée contient de l’eau dans ses cellules, plus elle est pauvre en matière sèche au stade végétatif ; plus elle est précoce et adaptée au milieux riches et fertiles, plus elle est digestible au stade végétatif et plus elle a une durée de vie de feuille courte. C’est cette loi universelle que nous utilisons dans la typologie.Toute la difficulté a été de passer d’une typologie des graminées à une typologie des prairies et de bâtir une méthode simplifiée pour identifier rapidement et simplement les espèces dominantes d’une prairie, de manière à obtenir des résultats comparables à des relevés botaniques exhaustifs.
Et les sommes de températures ?
J.-P. T. - Les sommes de températures sont également généralisables où que l’on soit en France. C’est le seul moyen de comparer des pratiques entre elles dans des zones pédo-climatiques différentes et d’avoir une culture commune au niveau national. Mais, à elles seules, elles ne suffisent pas, il faut les associer à la typologie des prairies parce que la floraison par exemple aura lieu à 800 degrés-jours pour du type A, alors qu’on sera à 1600 degrésjours pour du type C.
Comment articulez-vous ces deux méthodes avec celle des volumes d’herbe ?
J.-P. T. - La typologie des prairies permet de déterminer le potentiel de la parcelle ou de l’exploitation et de faire un diagnostic des pratiques grâce aux informations contenues dans le calendrier d’utilisation des surfaces. Tandis que la méthode des volumes d’herbe est un outil pour piloter la gestion de l’herbe à un moment donné. Les sommes de températures peuvent aussi être utilisées pour conforter les éleveurs qui ont peur par exemple de mettre à l’herbe trop tôt, en leur donnant des moyens de prendre confiance en l’herbe. Exactement comme les volumes d’herbe qui ne sont rien d’autre qu’une mise en confiance des éleveurs. Comment envisagez-vous la diffusion de ces nouveaux outils de gestion de l’herbe ? J.-P. T. - Pour que ces outils soient transmissibles, il nous reste encore à formaliser les règles qui font le lien entre nos connaissances, déclinées en types de prairies et sommes de températures, et les règles que les conseillers doivent utiliser pour raisonner la gestion de l’herbe. Elles amèneront de la technicité aux conseillers qui nous disent souvent en manquer sur la prairie par rapport à la culture du maïs par exemple.