« Notre broyeur de menues-pailles fait ses preuves contre le ray-grass résistant »
Entrepreneurs spécialisés dans la moisson, François et Vincent Roulet ont équipé une de leurs moissonneuses-batteuses d’un destructeur de graines d’adventices pour deux clients impactés par du ray-grass dans le blé dur. Une solution qu’ils font évoluer pour l’étendre à d’autres cultures.
Entrepreneurs spécialisés dans la moisson, François et Vincent Roulet ont équipé une de leurs moissonneuses-batteuses d’un destructeur de graines d’adventices pour deux clients impactés par du ray-grass dans le blé dur. Une solution qu’ils font évoluer pour l’étendre à d’autres cultures.
« C’est à la suite de la demande de deux clients camarguais, pour qui l’on récolte 400 hectares de blé dur chaque année, que nous avons fait le choix d’équiper l’une de nos deux moissonneuses-batteuses John Deere S780 d’un broyeur de menues-pailles Redekop », retracent François et Vincent Roulet, entrepreneurs de travaux agricoles basés à Mery en Savoie. Leur entreprise spécialisée dans la moisson intervient avec six moissonneuses-batteuses du 15 juin au 15 novembre, en commençant par le blé dur en Camargue pour finir avec le maïs en Picardie. « Ces agriculteurs étaient arrivés dans une impasse technique pour le désherbage du ray-grass résistant. Les étés très secs ne leur permettent pas de faire de faux-semis au déchaumage et ils disposent de très peu de désherbants homologués pour le blé dur, notamment pas de glyphosate. La seule solution était de réduire le stock de graines d’adventices à la récolte, tout en sachant qu’il était hors de question de s’équiper d’un récupérateur de menues-pailles, trop contraignant dans l’organisation du chantier et trop risqué pour le bon vieillissement de la batteuse. » Ils se lancent ainsi en 2021, estimant que la surface récoltée en blé dur suffisait à rentabiliser un équipement sur une machine, les deux clients acceptant le surcoût de 45 euros par hectare sur la prestation, auquel il faut rajouter le carburant supplémentaire lié à l’entraînement du broyeur. « Il absorbe l’équivalent d’un broyeur de paille, soit environ 80 chevaux. Selon les conditions, cela se traduit par une surconsommation de GNR de 4 à 6 litres par heure. »
Des premiers résultats encourageants
La John Deere S780 sur laquelle est monté le destructeur de graines d’adventices SCU disposait déjà d’un broyeur de paille MAV du même constructeur. « Cela nous facilite le montage qui s’effectue en deux heures à l’aide d’un engin de manutention. Et comme il est entraîné par une seule courroie, il est très simple de l’activer ou de le désactiver pendant la saison, sans le démonter. Il suffit de 10 minutes pour basculer deux tôles et engager ou désengager un crabot », précise François Roulet. Après la récolte de 2021, les premiers effets positifs ont été observés, avec une réduction des repousses de ray-grass. « Sur le colza qui a suivi, un des agriculteurs a même fait l’économie d’un antigerminatif. » Les entrepreneurs attendent le mois de juin avec impatience, pour réaliser la deuxième récolte avec le broyeur sur les mêmes parcelles. « On va pouvoir se rendre compte de la pression de ray-grass sur le blé dur nouvellement implanté. Les observations des agriculteurs ce printemps sont plutôt positives. Mais je pense qu’il faudra attendre six ans et donc trois passages avec le broyeur, le blé dur revenant une année sur deux, pour se prononcer définitivement sur l’efficacité de cet équipement », considère François Roulet.
Des adaptations validées avec le constructeur
Les deux frères n’ont toutefois pas attendu cette échéance pour étendre le terrain de jeu de leur destructeur d’adventices. « Les conditions d’utilisation dans le blé dur sont idéales avec très peu d’humidité, des rendements modestes et une paille qui n’est pas broyée. » Toutefois, les entrepreneurs ont remarqué que le broyeur se charge de menues-pailles lorsque la paille devient sèche et cassante aux heures chaudes de la journée. « Il est essentiel de travailler sur tous les réglages de la machine pour limiter la brisure de paille. Pour cette saison, on va remplacer la tôle en inox placée au-dessus de la table par des doigts, qui permettront d’évacuer une partie de la paille brisée directement dans le broyeur de paille », détaille François Roulet. L’ETA travaille également avec la société Oria, qui importe ce matériel canadien, pour le rendre mieux adapté aux conditions de récolte européennes. « Le principe de fonctionnement, qui consiste à utiliser deux rotors à axes verticaux tournant à grande vitesse pour projeter les graines contre des chicanes placées en quinconce, est sensible au volume de matière et à la verdure. »
Valoriser le broyeur pour d’autres cultures
Ces adaptations ont permis aux deux entrepreneurs de tester le broyeur dans d’autres conditions plus au nord. « On a fait des essais dans le soja l’an dernier pour lutter contre le chénopode et le sorgho d’Alep. Les parcelles en bio concernées étaient très sales, ce qui imposait une trop forte prise de puissance au broyeur. On va essayer cette année dans des champs avec moins d’adventices, notamment dans des zones concernées par l’ambroisie et le datura. » Le destructeur Redekop a aussi été mis à l’épreuve dans une parcelle de 30 hectares menée en TCS, touchée par une infestation importante de mauvaises herbes. « On est arrivé à trouver le bon compromis pour que ça passe dans la machine et le broyeur. Seulement, comme la récolte a lieu plus tardivement, une bonne partie des graines d’adventices est déjà au sol. Le broyeur n’est donc plus aussi efficace dans ces conditions », observe François Roulet. Convaincus de l’intérêt du système SCU de Redekop, les frères Roulet envisagent d’équiper à l’avenir d’autres moissonneuses-batteuses. « On réfléchit pour en monter un sur notre X9 l’an prochain. On a aussi une demande d’un client sur 500 hectares, mais il faudrait équiper une de nos petites machines Claas dotées d’une coupe repliable, ce que Redekop ne propose pas pour l’instant. »
Un broyeur simple à utiliser, mais un peu encombrant
Sur la moissonneuse-batteuse de l’ETA Roulet, le destructeur d’adventices Redekop SCU est associé à un broyeur de paille MAV de même marque. « Nous avons opté pour ce broyeur car il est capable d’éparpiller la paille de manière efficace sur les 10,70 mètres de largeur de coupe, sans faire appel à un éparpilleur dynamique, qui prend de la puissance et manque parfois de fiabilité, argumente Vincent Roulet. Nous en sommes pleinement satisfaits depuis l’adoption des nouveaux couteaux crantés, les modèles lisses utilisés précédemment manquant parfois d’efficacité. » L’association des deux équipements Redekop simplifie le montage du destructeur de paille, mais sur la série S de John Deere, il est implanté de manière très basse. « Cela a nécessité une adaptation pour pouvoir continuer à utiliser le crochet d’attelage de la coupe. Il faut aussi être vigilant à la garde au sol, car le broyeur est plus bas que l’essieu. Avec les pneus arrière en 620/75 R26, on n’a pas de problème, relativise François Roulet. En revanche, comme on souhaite conserver un gabarit de machine à 3,50 mètres pour les trajets routiers, on perd en maniabilité, car le broyeur limite l’angle de braquage des roues. »
Un système résistant mais bruyant
Les deux entrepreneurs apprécient la simplicité d’utilisation et la robustesse du destructeur d’adventices. « Après 800 hectares d’utilisation, il y a très peu d’usure. Les conditions sont moins abrasives en Europe. Et l’entretien se résume à quatre graisseurs et deux boîtiers à vidanger une fois par an. » Le seul point contraignant se situe dans l’accès au boulon de sécurité protégeant les rotors en cas de bourrage. « Il faut démonter pas mal de carénages pour les changer. Pour éviter de perdre du temps, il est préférable de garder toujours un œil sur la vitesse et la température du broyeur. » Le dispositif étant compatible Isobus, ces données s’affichent sur le terminal de la moissonneuse-batteuse.
Reste un dernier point négatif commun à tous ces systèmes fonctionnant à haut régime, « le bruit très fort de turbine risque d’être un facteur limitant pour récolter à proximité d’habitations. »
Chiffres clés
4 à 6 l/h de surconsommation de GNR
45 euros/ha de surcoût pour la récolte (sans le GNR)
65 000 à 80 000 euros : prix catalogue (juin 2023) du destructeur SCU, selon la machine à équiper
Marques et modèles de moiss’-batt’ compatibles avec le destructeur SCU
John Deere série S et X9
Case IH Axial-Flow 7000, 8000 et 9000
New Holland CR 9.90 et 10.90
Claas Lexion 7000 et 8000
Fendt et Massey Ferguson Ideal
Les autres destructeurs d’adventices du marché
Trois constructeurs australiens ont développé une solution pour détruire les graines d’adventices : l’iHSD V12 de De Bruin Engineering, le WeedHOG de Tecfarm et le Seed Terminator importé en Europe par l’Allemand Zürn. Seul ce dernier est véritablement commercialisé en France. Il a aussi l’avantage d’être compatible avec de nombreux modèles de moissonneuses-batteuses de différentes marques.