Maîtriser la mortalité des veaux conditionne la rentabilité
La gestion de la mortalité des veaux est une des clés principales de la rentabilité de l’élevage allaitant. C’est pourquoi le sujet était au cœur des journées organisées par les chambres d’agriculture du Grand Est.
La gestion de la mortalité des veaux est une des clés principales de la rentabilité de l’élevage allaitant. C’est pourquoi le sujet était au cœur des journées organisées par les chambres d’agriculture du Grand Est.
« Nous avons décidé de conduire des réunions avec les éleveurs dans plusieurs départements du Grand Est pour attirer leur attention sur la mortalité des veaux, thème primordial pour la rentabilité des élevages allaitants », commente Joël Martin, conseiller élevage à la chambre d’agriculture des Ardennes.
Dans le Grand Est, le taux moyen de mortalité dans les troupeaux allaitants se situe aux alentours de 10-11 %. À l’échelle de cette région, pour 260 000 vêlages par an, une baisse de 4 points de ce taux, pour passer de 11 à 7 %, éviterait la perte de 10 400 veaux et de plus de 8,3 millions d’euros de chiffre d’affaires ce qui représente entre 1 500 et 2 000 euros de perte de chiffre d’affaires pour un élevage moyen de 42 vêlées, soit environ 4 % de l’EBE dégagé par l’exploitant.
En 2015 et 2016, une surmortalité a été constatée avec des chiffres dépassant les 11 %. La météo compliquée de 2016 (problèmes de qualité des fourrages et parasitisme) explique en partie ce taux élevé. Ces chiffres issus des EDE des dix départements du Grand Est, révèlent une mortalité importante, supérieure aux références. « Si on les analyse, la mortalité intervient pour près de la moitié dans les deux premiers jours de vie, pour l’autre entre deux jours et le sevrage. Les causes sont multiples et souvent spécifiques à chacune de ces deux périodes. Choix des reproducteurs, préparation au vêlage (alimentation, minéralisation, vitamines…), conditions de naissance et surveillance au vêlage représentent les principales raisons pour la première période. Problèmes sanitaires (diarrhées, maladies respiratoires) ou encore accidents celles de la seconde période. »
Identifier les causes de surmortalité
Ces données cachent toutefois de fortes disparités. En 2017, environ 16 % des élevages d’Alsace-Lorraine se situent à plus de 15 % de mortalité. Ce pourcentage se chiffre entre 22 et 25 % dans les Ardennes, la Marne et la Haute-Marne.
« Un taux élevé de mortalité des veaux, une année, suite à un problème sanitaire reconnu et pour lequel des solutions adaptées ont été trouvées pour y remédier, est à relativiser. A contrario, une surmortalité pluriannuelle, sans solution identifiée, devient problématique pour la rentabilité de l’exploitation. L’important est donc de bien répertorier les causes pour y remédier. L’idéal est de prendre le temps au cours de la campagne de vêlages de noter chaque veau mort et l’origine du décès (si elle est établie) pour pouvoir réaliser un bilan en fin de campagne. »
L’analyse des données a également permis de rechercher les facteurs de variabilité des taux de mortalité observés. L’effet race, bien connu, a été constaté dans les élevages de Champagne-Ardenne avec des mortalités supérieures à 10 % en races Charolaise, Blonde d’Aquitaine et Blanc Bleu et des pertes inférieures à 8 % en races Salers, Aubrac et Limousine (même si, pour cette dernière, la mortalité tend à augmenter). Même constat pour l’effet rang de vêlage : la mortalité des veaux de génisses (12,5 %) étant plus importante que celle des veaux de multipares (9,8 %), d’où une vigilance nécessaire quant aux choix, à la conduite et à la surveillance de ces dernières.
Des facteurs de variabilité nombreux
Les élevages spécialisés (+ de 30 vaches allaitantes) disposent d’un taux de mortalité moindre (10,5 %) au regard des élevages mixtes lait-viande (13,4 %). L’effet taille du troupeau est un facteur peu flagrant. S’il a été mis légèrement en évidence en Alsace-Lorraine (moins de mortalités dans les élevages de plus de 60 vaches), il n’en est rien dans les Ardennes, la Marne et la Haute-Marne. Même constat pour la période de vêlage qui ne semble pas déterminante. A contrario, le fait d’avoir une période dédiée aux vêlages a un impact bénéfique sur le taux de mortalité. « On constate en moyenne un gain de 2 à 3 points de ce ratio quand, au moins 70 % des mises bas sont groupées sur trois mois consécutifs, notamment grâce à la rationalisation du travail, la conduite en lots homogènes. Autre effet analysé : la corrélation forte entre conditions de vêlages et mortalité. Ainsi, plus les conditions de naissance sont mauvaises, plus on voit de mortalité dans les jours qui suivent. Celle des veaux mâles (11,8 %), directement liée au poids à la naissance, est plus élevée que celle des femelles (8,9 %). Des leviers techniques existent pour faire face à une surmortalité. Le tout est de trouver le bon compromis entre maîtrise technique, conduite alimentaire et sanitaire, choix génétiques, organisation des bâtiments et surveillance. L’exploitant est à placer au cœur de l’élevage. Les outils d’aide à la décision sont un atout mais ne remplacent en aucun cas l’œil de l’éleveur. »