Émettre moins de gaz à effet de serre est à la portée de l’élevage
L’empreinte carbone
de la viande bovine
est désormais mieux établie.
Cet impact peut encore être réduit sans porter atteinte
à la performance économique. Bien au contraire.
les performances de production
et environnementales.
À quelque chose malheur est bon. Accusée de tous les maux et poussée dans ses retranchements, la filière viande bovine aura été obligée d’affûter ses arguments pour se défendre. Les nombreux travaux de recherche réalisés ces dernières années pour établir la réalité de son impact environnemental lui ont permis de mener une introspection bénéfique. Si, comme toute activité humaine, son empreinte sur l’environnement est une réalité, elle est mieux établie, tout comme peuvent être mis en avant les services environnementaux auxquels contribue l’élevage bovin viande.
Réduire à la source les émissions de méthane des bovins
Du moins tel qu’il est conduit en France où les surfaces herbagères assurent 80 % de l’alimentation. Il existe une grande variabilité de l’impact environnemental au sein de chaque système de production et donc des voies de progrès. Certains ont déjà été accomplis. « L’évolution positive des pratiques d’élevage a permis une baisse de l’empreinte carbone de 15 à 25 % entre 1990 et 2010, tout en maintenant globalement les volumes de production », affirme l’Institut de l’élevage, qui chiffre le potentiel pour réduire encore les émissions de gaz à effet de serre (GES) à 20 %. Au-delà des pratiques actuelles encore améliorables, des recherches sont en cours pour trouver des moyens de réduire à la source les émissions de méthane par les bovins, en jouant notamment sur l’alimentation.
5 % des émissions de GES dus à l’élevage allaitant
D’ailleurs, la FAO semble avoir pris en compte ces nouvelles connaissances. En 2006, en attribuant à l’élevage 18 % des émissions de gaz à effet de serre, elle avait déclenché la tempête médiatique que l’on sait. Elle a publié en septembre dernier un nouveau rapport dans lequel elle insiste d’abord sur le fait que l’élevage, à l’échelle mondiale, est en capacité de réduire ses émissions de GES de 30 %. Et a ramené à 14,5 % la contribution de l’élevage à ces émissions, dont 4,3 % attribuables à l’élevage laitier et 5 % à l’élevage allaitant. « Des gains d’efficacité peuvent être obtenus en améliorant les pratiques existantes, et il n’est pas nécessaire pour autant de bouleverser les systèmes de production. » Et d’indiquer que le plus gros potentiel de réduction est « détenu par la filière des ruminants à faible productivité d’Asie du Sud, d’Amérique latine et d’Afrique ».
Les émissions de GES par l’élevage allaitant, évaluées dans le cadre des réseaux d’élevage (234 exploitations), s’élèvent en moyenne à 4 334 kg d’équivalent dioxyde de carbone (éq CO2) par UGB (ou 14,8 éq CO2 par kilo de viande vive). Mais, de 25 à 55 % de ces émissions sont compensées par le stockage du carbone dans le sol (prairies permanentes, haies). Plus les exploitations valorisent de l’herbe, plus forte est la compensation. Cependant, ramenée au kilo de viande vive produite, l’empreinte carbone est sensiblement identique d’un système à l’autre, les plus intensifs compensant de plus fortes émissions par une plus grande productivité. L’étude montre en revanche « une forte variabilité entre exploitations au sein d’une même famille de systèmes », expliquait Sindy Moreau, de l’Institut de l’élevage, lors du Sommet de l’élevage. Des écarts pouvant atteindre 30 à 50 %, voire 100 % en prenant en compte le stockage du carbone. Ces variations sont dues pour partie à deux facteurs sur lesquels il est difficile d’agir : la structure de l’exploitation (parcellaire, configuration des bâtiments, transports entre différents lieux…) et la localisation géographique (part d’herbe, conditions pédoclimatiques…). Mais, cette variabilité s’explique aussi par les pratiques mises en œuvre et leur efficacité. Il y a là des marges de manœuvre pour réduire les émissions de GES.
Des pistes d’autant plus intéressantes à creuser que l’étude établie un lien « entre l’empreinte carbone brute de la viande et les coûts de production ». Autrement dit, les exploitations qui optimisent leur conduite améliorent leurs performances de production et leurs résultats économiques tout en réduisant leur impact environnemental. Dans l’échantillon étudié, 43 % d’entre elles sont performantes à la fois sur l’environnement et sur l’économie.
Reproduction, conduite alimentaire, légumineuses…
Les leviers pour améliorer la performance environnementale n’ont finalement rien de nouveau, tant ils ont déjà été mis en avant comme gages d’efficacité technique et économique. Il y a tout ce qui tourne autour de la reproduction et de la croissance des animaux : productivité numérique, réforme des animaux improductifs, réduction de la mortalité des veaux… Ainsi, passer de 82 % de vaches gestantes à 94 % permet de réduire les émissions nettes de GES par kilo de viande de 11 %. Abaisser la mortalité des veaux de 16 à 7 %, diminue ces émissions de 12 %. L’autre grand levier consiste à adapter la conduite alimentaire aux objectifs de production. Viser l’autonomie fourragère pour réduire la consommation de concentrés. Valoriser au maximum l’herbe par le pâturage. Ajuster les quantités de concentrés au potentiel de croissance des animaux. Limiter le temps de présence des animaux en engraissement…
L’introduction de légumineuses dans le système fourrager est aussi un moyen de réduire l’impact environnemental (moins d’engrais de synthèse) tout en améliorant la qualité des fourrages. On pourrait encore citer la valorisation optimale des déjections animales, l’ajustement des apports d’engrais aux besoins des cultures, l’implantation de haies…
Rien finalement qui ne soit à la portée de tout éleveur qui vise à optimiser la conduite de son exploitation. C’est plutôt rassurant.