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COOPÉRATIVES
Comment les coopératives valorisent la production bio

Céréalières, d’élevage ou polyvalentes, les coopératives offrent des infrastructures, une organisation et des débouchés aux agriculteurs qui s’investissent dans les productions biologiques. Ils suivent de près les évolutions des marchés.

La visibilité du marché est le premier service des coopératives à leurs producteurs biologiques. Agrial donne à ses producteurs de lait une visibilité d’au moins quatre ans. Le prix de base, de 458 euros les 1 000 litres en 2018, a été revalorisé en mai dernier de 7 euros pour le reste de 2019. Bruno Martel, président du métier lait de vache biologique d’Agrial, attribue cette possibilité aux marchés des produits transformés. « Nous avons cette visibilité en produits ultra-frais et en beurre, et nous commençons à en avoir sur le marché du beurre destiné aux artisans », confie-t-il. La coopérative a des sites industriels complémentaires - produisant lait, poudre, crème, beurre, yaourts ou fromages blancs - répartis dans le Grand Ouest et l’Yonne. Elle compte 275 producteurs de lait bio et une vingtaine en conversion, d’où le nom d’une marque de lait créée en septembre 2018 : Les 300 & Bio. Le tarif du lait de conversion est supérieur de 40 euros à celui du lait conventionnel, pendant deux ans. Et Agrial s’engage à payer le bio de première année au moins 450 euros, « même si le marché décline », souligne Bruno Martel.

Terrena n’entreprend de développement qu’avec l’assurance de débouchés

Terrena, qui produira 20 000 porcs bio cette année, a décidé de contractualiser sur sept ans avec prix indexés sur les aliments pour des élevages sur paille (ce qui est facultatif en porc bio) d’exploitations 100 % bio ou en voie de l’être – anticipant une éventuelle obligation d'exploitations complètement bio dans les prochaines années. « Pour sa dizaine de filières biologiques, Terrena n’entreprend de développement qu’avec l’assurance de débouchés », souligne Bertrand Roussel, responsable bio de la coopérative.

Axéréal investit dans la volaille Bio en Auvergne

Dijon Céréales conclut avec ses céréaliers biologiques des contrats pluriannuels. Leur prix minimum est ajusté à la hausse si les rentabilités des filières boulangères et en alimentation animale le permettent. Le blé meunier bio approvisionne le moulin Decollogne, spécialisé dans la farine bio. Les céréales secondaires, dont le blé de 2e et 3e années de conversion, approvisionnent des fabricants locaux d’aliments bio partenaires. Olivier Mouillon représente les agriculteurs biologiques au conseil d’administration et au bureau de Dijon Céréales. Il produit des céréales bio pour la coopérative et celle-ci lui fournit des aliments biologiques pour ses bovins bio. « La coopérative Terre Comtoise, qui fait partie avec Dijon Céréales de l’Alliance Bourgogne Franche-Comté, pourrait s’intéresser aussi à ce dossier bio pour son unité de fabrication d’alimentation animale », indique-t-il.

Axéréal donne de la visibilité à ses céréaliers ainsi qu’aux agriculteurs auvergnats qui s’engagent pour elle dans la volaille biologique. Ces éleveurs ne sont pas des adhérents mais ils consomment son aliment bio. Leur exploitation doit être complètement biologique. Les contrats courent sur douze années du remboursement bancaire du bâtiment. Axéréal commercialise ses céréales bio via sa filiale Centre Bio, en transforme une partie dans deux usines de fabrication d’aliments, et traite aussi de l’orge brassicole sur une ligne dédiée au sein d’une malterie.

Les coopératives, dont la plupart ne sont pas spécialisées dans le bio, organisent en interne, ou entre elles, des soutiens structurels et techniques à cette agriculture. Agrial offre un large choix de semences biologiques à destination de la nutrition animale, et tous ses conseillers techniques sont formés à la nutrition animale bio.

10 salariés dédiés et 14 sites au sein de Terrena

Terrena bâtit pour 2020 un silo biologique d’une capacité de 40 000 tonnes, divisé en 40 cellules. « Autant de cellules sont nécessaires parce qu’il faut isoler les espèces et mélanges d’espèces ; oui, 43 % de la collecte proviennent de parcelles cultivées en espèces associées, en général céréales et protéagineux », explique Bertrand Roussel. La coopérative de La Nouvelle Agriculture a déjà deux usines d’aliments bio. En 2025, elle aura en plus une usine de trituration soja et tournesol.

Autant de cellules sont nécessaires parce qu’il faut isoler les espèces et mélanges d’espèces

En tout, Terrena transforme la production de ses 1 500 agriculteurs bio sur 14 sites de production (silos, sites industriels, moulins, usine de nutrition animale…). L’animation bio à Terrena est portée par des ressources spécialisées et dédiées (achats, production, transformation, distribution) et par une commission bio (agriculteurs, éleveurs et opérationnels représentant différentes productions), qui se réunit quatre fois par an. Plus de dix personnes travaillent désormais exclusivement à la coordination et à la technique auprès des adhérents producteurs biologiques ou en cours de conversion.

Dijon Céréales, depuis dix ans dans la filière, y consacre six silos (sur 250). Un troisième conseiller technique et un ingénieur spécialisé y ont été embauchés l’an dernier. De nouvelles variétés et pratiques culturales sont testées sur une plateforme d’essai en cultures bio.

Œuf bio : Le Gouessant protège ses éleveurs

En cas de marchés déprimés, les coopératives soutiennent leurs adhérents. Cécile Mahé, responsable de la production d’œufs de la coopérative Le Gouessant, témoigne avoir traversé en 18 ans des « périodes délicates ».

L’engorgement actuel du marché des œufs bio pousse la coopérative à suspendre les projets, à arrêter les développements, à mettre en place des vides techniques prolongés en s’appuyant sur la caisse de péréquation en œufs alternatifs, et réduire les âges de réforme des poules. « Nous allons chercher d’autres circuits de commercialisation en nous différenciant par notre antériorité d’une trentaine d’années dans le métier », explique-t-elle. Le développement à long terme de l’œuf bio au Gouessant n’est pas remis en cause pour autant. « C’est juste un mauvais moment à passer », exprime-t-elle.

La coopérative se fait fort de respecter ses engagements auprès des éleveurs de pondeuses biologiques, elle a « l’assise financière » pour cela, souligne Cécile Mahé. « Nous avons des contrats sur 10 à 12 ans, et jamais le conseil d’administration n’a revu le prix payé à la baisse », affirme-t-elle. « Nous n’avons jamais dénoncé un contrat d’éleveur », complète-t-elle. Aussi la coopérative Le Gouessant attend-elle de ses clients qu’ils respectent les leurs.

« Pour garantir le revenu de nos producteurs, nous devrons préserver l’équilibre offre-demande »

Marianne Sanlaville, conseillère spécialisée filières Coop de France Occitanie

« Les coopératives ont un rôle très important de structuration des filières, et donc des filières biologiques. En Occitanie, plus d’une sur trois développe une activité bio, représentant ainsi 23 % de la collecte nationale de céréales bio, ¼ des ventes d’agneaux bio en circuit long, ¾ des brebis bio et près de 20 % du vin bio produit en région. Les filières biologiques se développent très rapidement. Pour les structurer et garantir le revenu de nos producteurs, nous devrons préserver l’équilibre offre-demande. Les principaux défis que doit relever la coopération sont d’encourager la diversification des productions et des débouchés par la contractualisation, de développer des nouveaux marchés, dans la restauration collective, les entreprises de transformation, les marchés de gros…

Notre fédération régionale a constitué une section bio où les coopératives définissent ensemble les orientations et priorités régionales. Cette section a aussi un rôle de pilotage de la production, elle veille à préserver l’équilibre offre-demande. Nous avons à cette fin des observatoires bio de la production céréalière, ovine et viticole. Les résultats sont partagés au sein de l’interprofession bio InterBio Occitanie, dont Coop de France Occitanie est un des membres fondateurs. Nous proposons également aux coopératives régionales des accompagnements adaptés : formations, aides à l’investissement, etc. Enfin, nous communiquons auprès du grand public sur l’engagement coopératif régional dans la production biologique ».

L’action des coopératives dans Thema Bio

Coop de France a édité en juin un nouveau Thema Bio, en avant-première du salon Tech & Bio organisé les 18 et 19 septembre dans la Drôme par les chambres d’agriculture. On y trouve 23 témoignages de coopératives. Elles expliquent comment elles valorisent les productions biologiques de leurs adhérents, organisent les filières bio et investissent dans celles-ci. Elles relèvent aussi des défis technologiques, au profit de la transition vers une agriculture respectueuse de l’environnement. Ces coopératives sont de toutes tailles, de toutes spécialités agricoles, certaines spécialisées en bio.

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