Alimentation au démarrage : habituer les jeunes poules "à finir l’assiette"
Dès l’arrivée en bâtiment de production, l’éleveur doit veiller à ce que la poule en fin de croissance et pleine maturation sexuelle continue à prendre du poids et acquiert de bonnes habitudes alimentaires.
Dès l’arrivée en bâtiment de production, l’éleveur doit veiller à ce que la poule en fin de croissance et pleine maturation sexuelle continue à prendre du poids et acquiert de bonnes habitudes alimentaires.
Lorsque la poulette quasiment prête à pondre arrive en élevage de ponte, elle a été plus ou moins stressée par la mise à jeun, par le voyage et par le changement brusque d’environnement. Ayant perdu ses repères, elle met plusieurs jours à en trouver d’autres, notamment pour boire et manger correctement, surtout si le matériel diffère de la poussinière. Certaines poules peuvent perdre jusqu’à 10-15 % de leur poids la première semaine.
Une poulette ne devrait pas marquer de baisse de prise alimentaire ni perdre de poids, car cela crée de l’hétérogénéité dans le troupeau. Les performances de fin de ponte peuvent également être impactées, dans la mesure où les poules âgées plus légères n’auront plus assez de réserves pour pondre. En système alternatif hors cage, il est donc important que l’éleveur optimise les conditions du transfert et le début de ponte.
Atteindre le niveau de consommation nécessaire
Transférée aux alentours de 1,45 kg, la poulette doit encore gagner 400 g pour atteindre son poids de jeune adulte, alors qu’elle commence aussi à pondre. Ainsi, sur les 8 à 10 semaines suivant le transfert environ 95 %, des poules vont pondre un œuf par jour. « Durant ces quelques semaines, la jeune poule doit faire passer son ingéré quotidien de 75-80 g à 115-120 g, soit une augmentation de 50 %, souligne Antoine Le Calvé nutritionniste chez le sélectionneur Novogen. C’est considérable. La période est vraiment cruciale pour la suite, surtout pour la persistance de la ponte. » De plus, la poule (notamment les souches brunes) est sensible aux variations de granulométrie, couleur, odeur et de goût de l’aliment. « Pour limiter le stress alimentaire, l’idéal serait de commencer quelques jours avant le transfert à distribuer en poussinière le même aliment de préponte, propose le nutritionniste. Il faut également éviter au maximum tout changement drastique, comme une variation brusque de matières premières ou de fabrication. »
Obliger au vide quotidien de la chaîne
Granivores, les poules préfèrent naturellement picorer les grosses particules et laisser les plus fines de côté. Pour limiter ce tri, il est fortement recommandé d’effectuer un vide de mangeoire quotidien dès l’âge de quatre semaines. Ainsi, la poulette s’habitue à vider complètement l’assiette ou la mangeoire linéaire.Si ce n’est pas fait, la partie fine s’accumule et les poules finissent par bouder l’aliment, donc sous-consomment. « Il ne s’agit pas du tout de rationner, mais d’empêcher que les poulettes laissent les particules qui contiennent aussi les oligoéléments, les vitamines, le calcium… Alors que pour les poules brunes, le vide d’assiette peut durer plusieurs heures, il ne doit pas dépasser 1 heure 30 pour les blanches, sinon elles risquent de restreindre leur ingéré total de la journée. »
Antoine Le Calvé, nutritionniste Novogen. « Les poules sont aussi performantes en élevages alternatifs qu’en cage. En revanche, les résultats varient plus et sont plus dépendants des facteurs d’élevage, notamment la conduite. » © P. Le Douarin
Cette pratique du vide de mangeoire doit être maintenue sur toute la durée du lot, précise-t-il encore. En élevage hors cage, les interactions dominant-dominé accentuent encore les écarts de consommation. Si la vidange est incomplète, les poules dominantes ingèrent surtout les grosses particules, les dominées plutôt les fines et sous-consomment, des écarts de poids apparaissent, des besoins nutritionnels ne sont pas satisfaits, les performances futures seront altérées.
Pour Antoine Le Calvé, le vide est réalisé de préférence en fin de matinée et non l’après-midi, afin que les poules puissent absorber le calcium nécessaire pour former la coquille durant la nuit. La majorité de l’aliment doit être consommée l’après-midi.
Être réactif et observateur
Outre le suivi des consommations d’eau et d’aliment, Antoine Le Calvé conseille de suivre les croissances, en pesant les poules une fois par semaine jusqu’au pic de ponte (ou d’avoir un peson automatique), ce qui permet de réagir rapidement. Quand un lot a tendance à sous consommer, les échanges avec le technicien ou le fournisseur d’aliment sont très utiles pour déterminer si c’est spécifique à l’élevage ou lié à un effet alimentaire.
Changer la granulométrie ou ajouter de l’huile pour rendre l’aliment plus appétant peuvent débloquer une situation. Faire des tours de chaîne à vide pour attirer à la mangeoire est efficace seulement quelques jours.
Augmenter la durée du vide peut aussi stimuler l’appétit des poules brunes. La surconsommation est moins problématique. Il vaut mieux diluer l’aliment, car « restreindre les poules peut provoquer du picage et de la compétition, donc de l’hétérogénéité. C’est tout ce qu’on veut éviter. »
Plus d’énergie et de protéines
Le nutritionniste du sélectionneur Novogen conseille de distribuer deux aliments jusqu’au pic de ponte. « Il faut savoir investir sur l’aliment », souligne Antoine Le Calvé.
Pendant les 8-10 jours suivant le transfert, la poule a besoin de prendre du poids et de se constituer des réserves avec l’aliment « préponte ». Il lui faut surtout un aliment riche en énergie et modérément enrichi en calcium (de l’ordre de 2 %) pour créer un stock suffisant dans son os médullaire. Ce calcium sera mobilisé pour former la coquille et fortement sollicité pour la fin de la ponte à partir de l’âge de 70 semaines.
A partir du début de ponte jusqu’au pic, l’aliment de « montée en ponte » doit être encore plus riche en énergie et en protéines (+ 6 à 7 % par rapport au préponte) afin de répondre aux besoins supplémentaires des œufs, tout en terminant la croissance. La teneur en calcium – peu appétent tant que la poule n’en a pas le besoin – doit quasiment doubler (3,5 à 4 %).
Le calcium est incorporé sous forme grossière à 60-70 % et en poudre pour le complément. Cette forme plus vite digérée est utilisée rapidement par la poule (le matin pour finir de former la coquille et le soir pour la commencer), tandis que la forme grossière est d’abord stockée dans le gésier puis mobilisée durant la nuit pour la coquille.
Il est possible d’augmenter le taux de protéines pour faire monter le poids d’œuf et de l’huile de palme (couleur plus attractive) pour accroître l’appétence.
Le calibre se joue surtout en poussinière
Le poids de l’œuf dépend essentiellement du poids des poulettes au moment de leur stimulation lumineuse qui se traduit par la maturité sexuelle et un début de ponte 2 à 3 semaines plus tard.
Si le marché de l’œuf vendu en GMS est plutôt favorable à un calibre moyen, il semble que les consommateurs d’œufs de poules avec accès au plein air apprécient de plus en plus le gros calibre.
Le producteur des œufs des poules plein air doit donc préciser à l’éleveur de poulettes à quel poids stimuler les oiseaux. Il doit même le faire avant le démarrage des poulettes, car le poids à la stimulation est influencé précocement, d’où l’importance du poids à 5 et à 10 semaines.