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Agroforesterie : Le retour des vergers-maraîchers

Les systèmes de production associant arbres et cultures sur une même surface font leur retour dans les exploitations avec le fort développement de l’agriculture biologique et l’engouement des consommateurs pour les produits locaux et bio.

Marforest étudie la faisabilité d’insertion de cultures en vergers bio d’abricotiers et d’amandiers en région méditerranéenne, comme ici du fenouil planté en septembre dans un verger d’abricotiers sur le site de La Centrex (66). © Sica centrex
Marforest étudie la faisabilité d’insertion de cultures en vergers bio d’abricotiers et d’amandiers en région méditerranéenne, comme ici du fenouil planté en septembre dans un verger d’abricotiers sur le site de La Centrex (66).
© Sica centrex

Pratiquée de manière traditionnelle jusque dans les années 1990 dans les exploitations arboricoles du pourtour méditerranéen, l’agroforesterie a progressivement disparu au profit d’une agriculture spécialisée et simplifiée. L’intensification des cultures a alors eu tendance à mettre le sol au second plan, pour se concentrer essentiellement sur la culture et le rendement. Les importantes évolutions sociétales de cette dernière décennie auxquelles se sont agrégés les problèmes de dérèglement climatique ont modifié la donne. L’agroécologie a été placée au cœur des politiques publiques. Avec elle, l’agriculture biologique et les modes de production plus traditionnels et respectueux du sol, de l’environnement et de la biodiversité ont été encouragés. Ce retour répond à de nombreux enjeux auxquels l’agriculture doit désormais faire face : la réduction de l’emploi d’intrants, une meilleure gestion de la ressource en eau, l’adaptation aux dérèglements climatiques… mais aussi, dans certaines régions, un accès difficile au foncier. C’est dans ce contexte que de nombreuses structures techniques se sont emparées du sujet en vue d’accompagner les agriculteurs dans la conception de ces nouveaux systèmes de production plus résilients, via leur participation à divers programmes : Smart, Marforest, Arbratatouille… « Ces différents programmes visent à développer des connaissances sur les associations agroforestières entre arbres et cultures légumières en s’appuyant sur des expérimentations mais aussi sur des réseaux participatifs. L’échange d’expériences entre les différents partenaires, structures techniques, centres de recherche et agriculteurs est primordial », explique Célia Dayraud, ingénieur expérimentation maraîchage au Civam Bio 66. Aux côtés de la Sica Centrex et l’Eplefpa Perpignan-Roussillon, le Civam Bio 66 participe au projet Marforest.

Marforest crée des références en région méditerranéenne

Financé par l’Europe sur la période 2017-2020, ce projet a pour but d’étudier la faisabilité d’insertion de cultures en vergers bio d’abricotiers et d’amandiers en région méditerranéenne. Installées en 2018 sur les sites roussillonnais de la Sica Centrex et du lycée agricole de Théza, les deux parcelles expérimentales d’abricotiers et d’amandiers implantées respectivement en 2014 et 2018 ont successivement accueilli des cultures maraîchères d’été et d’hiver du type courge, patate douce, fenouil, mini-blette, brocolis, scarole… Basés sur les suivis des données technico-économiques des cultures, de gestion de la fertilité des sols et d’impact sur la biodiversité, les premiers résultats ont été présentés. « Compte tenu des nombreux facteurs entrant en considération qu’il s’agisse des dates d’implantation, de récolte, des caractéristiques physiologiques de la culture légumière à cycle rapide ou pas, rampantes ou pas, de sa sensibilité aux maladies et ravageurs, il est trop tôt pour tirer des conclusions. Mais, ces premiers essais ont montré qu’il est possible d’obtenir de très bons résultats technico-économiques », indique Aude Lusetti, responsable expérimentation maraîchage à la Sica Centrex. Cela a été le cas pour la scarole, le fenouil ou encore les courges dont le pouvoir couvrant s’avère très intéressant en matière de contrôle des adventices. A contrario, les patates douces ont présenté des rendements faibles. Concernant les blettes et les fèves, les rendements étaient satisfaisants mais leurs dates de récolte trop tardives ont empêché l’application des argiles sur les arbres fruitiers et une replantation de cultures d’été. « Ces constats nous ont conduits à revoir nos futurs programmes de plantation pour récolter entre décembre et janvier mais aussi à nous intéresser aux arbres », précise Aude Lusetti. En 2018, des mesures du diamètre du tronc des jeunes amandiers ont également été initiées afin d’observer s’il existe un effet des cultures légumières sur leur croissance.

Références en agroforesterie maraîchère

 

 
Les Terres de Roumassouze sont désormais un site pilote en matière d’agroforesterie où est né le projet de recherche participative Arbratatouille. Installés en agriculture depuis 2000, Denis Florès et son épouse découvrent en 2010 l’agroforesterie à l’occasion de l’acquisition d’une ferme de 11 ha « Les Terres de Roumassouze », située à Vézénobres (Gard). Ancien lieu d’expérimentation de l’Inra, les parcelles étaient à l’abandon depuis trois ans. Sur ce domaine où étaient implantés des peupliers et des noyers, ils nettoient 2,5 ha en vue d’installer une serre et un verger maraîcher en culture biologique tout en conservant les arbres de plus de 20 à 30 m de hauteur. « Après dix années de pratique, nous possédons aujourd’hui les parcelles en agroforesterie les plus mûres de France où il est possible de mesurer la valeur productive de ce mode de production », explique Denis Florès. Initié en 2014, le programme Arbratatouille piloté par Agroof Scop repose sur une collaboration active entre agriculteurs et chercheurs. « Son but est d'améliorer nos connaissances sur les interactions entre les arbres et les productions en vue de proposer des pistes de réflexion pour la conception et la gestion de systèmes agroforestiers. La caractérisation du microclimat sous les arbres est, par exemple, l’un des nombreux axes de travail engagés qui doit nous permettre de mieux gérer les élagages et les densités de plantation des arbres auxquels sont associées des cultures maraîchères et limiter ainsi les phénomènes de concurrence lumineuse », explique Denis Florès.

 

A la ferme de La Durette, un verger-maraîcher pilote

Initié en 2012 et piloté par le Grab en lien avec différents partenaires, ce projet de recherche a pour but d’étudier la durabilité d’un système de production alliant des cultures d’arbres fruitiers et de légumes, avec une forte biodiversité sur une période d’au moins 15 ans. Depuis 2016, des agriculteurs sont installés sur le site et assurent la production tout en participant au projet de recherche. Située dans la zone périurbaine d’Avignon, la ferme de La Durette occupe 4 ha, avec six espèces rosacées fruitières et quarante espèces légumières en culture biologique. « L’objectif est de voir la faisabilité et la rentabilité économique de ce mode de production à l’échelle d’une ferme gérée par des agriculteurs. La particularité de ce projet réside dans sa méthode d’évaluation qui place l’agriculteur au centre de l’expérimentation », explique François Warlop, ingénieur de recherche au Grab. D’ores et déjà, il ressort que les productions subissent peu de dégâts de ravageurs et de maladies et présentent de bons résultats agronomiques. En revanche, des phénomènes de concurrence liés à une promiscuité des cultures doivent être pris en compte. « L’un de nos objectifs vise à voir sur le moyen à long terme si le verger-maraîcher est un système de culture plus résilient », poursuit François Warlop. Dans cet objectif, le projet Smart a été lancé en 2014. L’ensemble des données collectées et l’expérience des participants ont permis d’éditer un guide de 40 pages, consultable sur le site du projet.

 

A lire aussi : Agroforesterie : l’essor des vergers-maraîchers

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