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Bovin viande
Le veau sous la mère en quête de nouveaux éleveurs

Le Civo va à la rencontre des éleveurs pour promouvoir une production en déficit de 5 000 veaux sous la mère annuels.

Les porteurs de projet sont allés à la découverte de l’EARL Delage.
Les porteurs de projet sont allés à la découverte de l’EARL Delage.
© D.R.

On a du mal à y croire en temps de crise : le veau sous la mère est une production qui peine à répondre à la demande existante, notamment entre l’automne et le printemps. Le constat est simple : on manque de nouveaux producteurs pour assurer la relève ! Avant de se pencher sur les raisons qui peuvent expliquer cette situation, malgré les atouts de cette production, revenons tout d’abord à la définition du veau sous la mère.

 

Un produit haut de gamme

Le veau sous la mère est un jeune animal de boucherie (abattu entre 3 et 5 mois 1/2) élevé au lait naturel, ce qui confère à sa viande une tendreté particulière. C’est donc un produit haut de gamme, mieux valorisé que le veau de boucherie standard, et ce, depuis la mise en place du Label rouge dans les années 1970. En effet, tous veaux sous la mère labellisables confondus, l’écart de prix de vente pour les éleveurs est de 2 euros par kg de carcasse, (et jusqu’à 3 euros pour les veaux labellisés c’est-à-dire destinés à un distributeur engagé en filière de qualité Label rouge). Cette petite production (6 à 7 % de la viande de veau consommée en France) n’est donc pas en concurrence directe avec le veau de boucherie standard. Les acheteurs de veaux de lait recherchent en effet un produit de qualité exceptionnelle. De fait, 2/3 des veaux produits sont consommés en dehors du bassin de production, dans des zones de consommation à fort pouvoir d’achat.

 

Le veau sous la mère est la production allaitante qui dégage la meilleure marge à la vache ou à l’hectare de surface fourragère. En effet, la comparaison entre le système spécialisé veau sous la mère, le système mixte veau sous la mère + broutards, le système broutards et le système naisseur-engraisseur montre que pour obtenir le même résultat courant d’environ 30 000 euros, les autres systèmes utilisent plus de bâtiment, plus de surface, plus de cheptel, et donc plus de capital d’exploitation. En résumé, pour peu que la qualité du produit soit au rendez-vous (une couleur blanc à rosé clair, une conformation bouchère E, U voire R+, un état d’engraissement entre 2 et 3 et un poids de carcasse compris entre 125 et 150 kg), c’est une production qui est source d’un bon revenu, stable qui plus est sur le long terme, et qui génère une trésorerie rapide puisque le veau est abattu jeune, en comparaison d’un broutard ou d’un taurillon.

 

En dépit des ces résultats, il manque 100 à 150 nouveaux producteurs de veaux de lait par an pour compenser le déficit de production de 5 000 veaux sous la mère annuels.

 

Une production mal connue

Le Civo (Comité interprofessionnel veau sous la mère) se mobilise depuis plusieurs années pour amener de nouveaux producteurs vers le veau de lait sous la mère. L’année dernière, les acteurs intervenant dans le parcours installation ont été conviés à des après-midis de l’installation. Ces réunions d’échange ont permis de réfléchir aux actions à mettre en place en vue d’attirer plus de jeunes vers cette production. De ces réunions sont nées les Rencontres terrain express pour favoriser la rencontre en un même lieu entre les jeunes intéressés par la production et les acteurs de l’installation (Points info installation ; Adasea ; chambres d’agriculture ; organisations de producteurs ; JA ; centres de gestion ; banques, etc.). C’est l’une de ces Rencontres terrain express que le Civo a organisé à Saint-Germain-Beaupré le 21 janvier dernier.

 

Une quarantaine de candidats a répondu à l’appel : jeunes en formation agricole bien sûr, mais aussi éleveurs en recherche de diversification. A travers la projection du film Veaux de luxe, Francis Rousseau, du Civo, a présenté les atouts d’une production trop souvent associée à des conditions de travail pénibles et astreignantes. L’astreinte existe, c’est un fait. Mais de nombreux moyens ont été mis en place pour alléger la charge de travail des éleveurs : appel au service de remplacement ou recours à un groupement d’employeurs, utilisation d’un chien de troupeau, mécanisation de l’alimentation, du curage et du paillage, simplification de la tétée, etc. Les idées ne manquent pas pour aider les éleveurs à mettre en place des solutions adaptées à leurs besoins. Le Civo a même lancé l’année dernière une opération d’envergure intitulée Travail’Vo, en partenariat avec les différentes organisations de producteurs.

 

A Saint-Germain-Beaupré, les deux organisations de producteurs intervenant sur les départements de la Creuse et de la Haute-Vienne, Celmar et Opalim, ont fait le déplacement pour présenter leurs activités d’accompagnement des producteurs, de la production à la mise en marché. Les services de la chambre d’agriculture de la Creuse (en particulier le pôle installation transmission et le groupement de développement agricole de La Souterraine) sont venus pour répondre aux questions des futurs installés, notamment au sujet du nouveau plan de professionnalisation personnalisé, depuis l’autodiagnostic jusqu’à l’entretien au CFPPA d’Ahun pour déterminer les besoins du porteur de projet en fonction de ses compétences et de son expérience (stage collectif obligatoire de 21 h et/ou stages éventuels en exploitation ou en entreprise, actions de formations). Les conseillers agriculture des banques présentes (Crédit agricole, Crédit mutuel et Banque populaire) ont rappelé l’importance de l’accompagnement du conseiller financier, puisque le dossier installation est soumis à l’avis du banquier pour évaluer le montant de la Dotation jeune agriculteur (DJA) avant le passage en Commission départementale d’orientation agricole.

 

Services de remplacement

La réunion s’est poursuivie avec la visite de l’exploitation de Philippe et Nadine Delage. Installé depuis 1998 sur 58 ha, avec un troupeau de 50 vaches, principalement de race limousine, Philippe a été rejoint par Nadine en 2000. Aujourd’hui la Surface agricole utile est passée à 125 ha et le cheptel à 89 vaches. Philippe et Nadine n’hésitent pas à faire appel au service de remplacement pour pouvoir s’octroyer du temps libre. Comme le dit Philippe, « cette production nous apporte une liberté sans égal et la possibilité de travailler en couple ; si c’était à refaire, je me serais lancé plus tôt ». Il est vrai que pour valoriser un troupeau de taille modeste ou moyenne, le veau sous la mère est tout indiqué. Et comme le souligne M. Defoulounoux de la Banque populaire, « aujourd’hui, les éleveurs qui s’en sortent le mieux sont ceux qui sont positionnés sur un marché de niche comme le veau sous la mère, ou qui savent diversifier leurs revenus ». Ainsi en est-il de l’EARL Delage, qui élève à la fois des veaux sous la mère et des broutards, en système mixte. Et ce, d’autant plus que la bonne organisation de la filière assure l’écoulement du produit via les organisations de producteurs.

 

En résumé, ce fut un après-midi instructif pour tous ceux qui souhaitent aller plus loin dans leur projet d’installation. Le Civo compte poursuivre ces réunions d’information dans le reste des départements du bassin de production. Un travail de longue haleine pour parvenir à sensibiliser plus de jeunes désireux de s’installer mais aussi pour continuer à informer les acteurs du parcours d’installation.

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