La salers poursuit son développement en Croatie
Assez discret ces dernières années, le marché d'animaux d'élevage de race salers reprend avec les éleveurs croates.
À quand remontent les premiers contacts ?
Lionel Duffayet : "Nous avons noué les premiers contacts suite à une rencontre organisée par la CCI du Cantal, dans les années 2007-2008. Les premiers échanges marchands se sont conclus par une première exportation en 2009. Après des rencontres sur place, le commerce a repris en 2014 avec 200 animaux vendus en deux départs, puis de plus petites quantités jusqu'à cette année, avec 160 génisses parties au printemps."
Qui sont ces acheteurs ?
L. D. : "Ce sont des profils très variés. Il y a parmi eux d'anciens laitiers. D'autres ont moins le profil animalier, ce sont des pluriactifs qui louent à bon marché des hectares qu'ils cherchent à rentabiliser et qui s'improvisent éleveur."
Pourquoi choisissent-ils la salers ?
L. D. : "Avec nos exports et les naissances, le pays compte déjà un bon millier de têtes. Plusieurs races y ont été introduites, mais la salers a la particularité d'être très maternelle. Important dans ces pays qui doivent compter avec la présence de loups et d'ours. Dans ce cadre, les cornes sont appréciées. L'autre atout, c'est la rusticité de la race : une délégation qui s'est rendue en Croatie a constaté que sur 60 vaches élevées en plein air intégral, et dans ce contexte de prédation, 58 veaux étaient sauvés. Quant aux anciens laitiers, qui ont des bâtiments, ils partiront davantage sur des animaux écornés ou polled, autrement dit dotés du gène sans corne. Avec la salers, on peut satisfaire toutes les clientèles."
Quelles sont les conditions sanitaires requises ?
L. D. : "Le b.a.-ba de tout vendeur de reproducteurs ; IBR, BVD et paratuberculose sont recherchés. S'y ajoute la contrainte de la vaccination FCO sérotype 4 et 8. Chez nous, on vaccine les broutards en sérotype 8 pour l'Italie, mais pas forcément les femelles dont la plupart sont censées rester en France. Or, quand les Croates trouvent des accords de financement avec le soutien des aides publiques, ils passent tout de suite commande, ce qui ne nous laisse pas beaucoup de temps pour nous organiser en amont. Cela ne poserait pas de problème si on avait un délai de trois mois, correspondant à une première injection suivie de 21 jours pour la seconde et des 60 jours minimum qui suivent ce rappel(1). Mais ce n'est pas le cas... Autrement dit, on est obligé de faire avec les éleveurs qui ont déjà des animaux vaccinés, sans la certitude absolue du débouché. Or, on sait que la vaccination a un coût..."
C'est le seul frein ?
L. D. : "L'autre contrainte, qui ne vient pas directement des éleveurs mais sans doute mise en place par l'État, est au niveau pédigree, pas des animaux : ils n'acceptent pas de consanguinité. Sur les grands-parents, on ne peut pas retrouver le même animal."
Quel avenir pour cette filière croate ?
L. D. : "Pour l'heure, tout ce qui a été vendu est parti. J'ai espoir d'une nouvelle commande de génisses à l'automne, c'est en pourparlers. Quelques discussions s'engagent aussi suite à des demandes en vaches. La difficulté tient à l'instabilité des gouvernements et donc d'hypothétiques aides promises par l'État (NDLR : voir l'encadré ci-dessus). Mais les éleveurs ont un certain poids ; aux pouvoir publics de les suivre dans leur pays."
Des animaux bien valorisés ?
L. D. : "Ce ne sont pas des premiers choix. Suivant les âges, les plus jeunes sont négociés autour de 1 000 EUR rendus à l'éleveur et jusqu'à 1 600 à 1 700 EUR par génisse. D'autant qu'après l'acheteur a de gros frais de transports. La difficulté à maintenir des prix raisonnables tient à une concurrence sur Internet d'animaux moins chers... mais sans papiers."
(1) La vaccination est interdite sur des animaux en gestation. Ce sont donc soit des génisses vides, soit vaccinées avant la saillie.