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La Coopération agricole se voit orienter la production

Réunie en congrès le 18 décembre, la Coopération agricole (ex-Coop de France) s’est donné un rôle nouveau en termes de création de valeur. Il s’agit d’« orienter » la production pour répondre à la demande du marché, selon le président de la fédération, Dominique Chargé. Attention à ce que la coopérative ne joue « pas dans l’intégration », lui a répondu Samuel Vandaele, président des Jeunes agriculteurs.

Développer « un nouveau modèle d'exploitation beaucoup plus intégré »
« Mon intention n'est pas de faire des agriculteurs des prestataires de services. », Didier Guillaume, Ministre de l'Agriculture
Développer « un nouveau modèle d'exploitation beaucoup plus intégré »
« Mon intention n'est pas de faire des agriculteurs des prestataires de services. », Didier Guillaume, Ministre de l'Agriculture
© AA03

Une passe d'armes a eu lieu le 18 décembre entre coopération et syndicalisme, lors du congrès de Coop de France. D'un côté, Dominique Chargé, président de la Coopération agricole (nouveau nom de l'organisation), a défendu le rôle de la coopérative « qui oriente, organise voire planifie » la production. De l'autre Samuel Vandaele, président des Jeunes agriculteurs, s'est opposé à l'idée d'« intégration ».

Dans une interview donnée la veille au quotidien Les Echos, Dominique Chargé avait affirmé que « demain, un agriculteur ne s'installera plus dans telle ou telle production, mais décidera avec la coopérative de son choix sur la base d'un contrat sécurisant. » Parallèlement, il faut, selon lui, développer « un nouveau modèle d'exploitation beaucoup plus intégré », financé par des investisseurs non agricoles. Le président de la Coopération agricole est revenu plus en détail sur cette idée lors de son congrès à Paris, autour du projet coopératif avec les jeunes générations.

« Inverser » les flux entre amont et aval

« Compte tenu des ruptures économiques dans lesquelles nous sommes, avec l'abandon de tous les mécanismes de régulation de marché, les attentes nouvelles des citoyens, notre rôle d'acteur économique est différent d'il y a quarante ans », a déclaré en tribune Dominique Chargé. « Nous devons inverser les flux. » Dans les années 60/70, le rôle des coopératives était « d'organiser, de massifier la production et de rechercher des débouchés ». Aujourd'hui, c'est de « mettre la coopérative au centre d'un processus de création de valeur, qui oriente, organise voire planifie la production pour la mettre en adéquation avec les attentes du marché. » « C'est la seule façon de créer de la valeur durable », a-t-il appuyé. Et de préciser : « Mon intention, en disant ça, n'est pas de faire des agriculteurs des prestataires de services. »

Non à l'« intégration »

Invité au débat, le président des JA Samuel Vandaele l'a mis en garde. « Il faut que la coopérative reste dans l'accompagnement et pas dans l'intégration », selon lui. « Aujourd'hui, les coopératives doivent faciliter l'installation des jeunes. C'est important pour créer ce lien » avec le jeune adhérent. La coopérative « ne doit pas se substituer à sa première mission qui est d'aller chercher de la valeur pour ses adhérents », a déclaré Samuel Vandaele. À ses yeux, « une coopérative qui marche, ça n'est pas une coopérative qui a beaucoup d'adhérents. C'est une coopérative qui rémunère correctement le produit de ses adhérents. »

Des difficultés avec la loi Egalim

Cette mise au point intervient dans le contexte de la loi Egalim, à laquelle s'oppose en partie la Coopération agricole. Du point de vue de la fédération, le prix d'un produit ne peut être indexé sur des indicateurs qu'« à condition que ce soit une production choisie, correspondant aux attentes du marché », explique à Agra Presse Dominique Chargé. « Il y a parfois des situations de suroffre, qui entraînent un écroulement des cotations, pointe-t-il. Difficile dans ces conditions d'avoir un prix indexé sur des indicateurs de coûts de production. »

Vers des types de contrats

Les coopératives défendent toutefois l'idée d'un « contrat sécurisant » avec l'agriculteur. Dominique Chargé en explique la philosophie : « On ne peut être responsable de la pertinence économique d'une production que dès lors qu'on l'a choisi ensemble. La responsabilité d'une coopérative ne peut commencer au moment où l'agriculteur amène une production, mais quand les deux parties décident ensemble de produire à destination d'un marché. Les mécanismes qui permettent de sécuriser les rémunérations, les marges, fonctionnent déjà. »

Pour autant, la Coopération agricole a l'intention de plancher dessus tout au long de l'année prochaine, envisageant même de définir des types de contrat. « La réflexion doit être beaucoup plus structurée et aboutie sur le fait que le rôle d'une coopérative est de plus en plus de faire correspondre la production de l'agriculteur et les attentes du marché », insiste Dominique Chargé.

JCD

Séparation vente/conseil : les coops veulent un délai, Guillaume répond « pourquoi pas »

La fédération des coopératives a réclamé le 18 décembre un délai d'« au moins six mois » pour la séparation des activités de vente et conseil en phytos, programmée au 1er janvier 2021 dans le cadre de la loi Egalim. L'« urgence » est avant tout d'« écrire les règles et les textes qui permettront sa mise en oeuvre », a déclaré Dominique Chargé, président de Coop de France en congrès à Paris. « Avec le fonctionnement démocratique qui est le nôtre, comment imaginer que chaque coopérative soit en mesure de faire un choix [...] avant le 1er janvier 2021 ? » « Donnez-nous au moins six mois supplémentaires », a-t-il lancé au ministre de l'Agriculture. Une ordonnance du 25 avril, sur la séparation des activités de vente et de conseil à l'utilisation de phytos, fixe la date du 1er janvier 2021, avec une année d'avance par rapport à la mise en oeuvre envisagée. Un top départ « trop proche », avaient alors protesté les distributeurs. D'autant plus que les textes d'application, un temps espéré en fin d'année, tardent à être finalisés. Didier Guillaume n'exclut pas un délai : « Les six mois, pourquoi pas ? Réfléchissons-y ensemble », a-t-il répondu lors du congrès de Coop de France, fédération qui le 18 décembre a été rebaptisée La Coopération Agricole.

Fin de non-recevoir de Didier Guillaume sur le Titre 1 de la loi Egalim

Face au ministre de l'Agriculture, Dominique Chargé a évoqué une autre « ligne rouge », qui concerne l'ordonnance sur les coopératives, également parue le 25 avril dans le cadre d'Egalim. Elle les soumet à la responsabilité pour « rémunération des apports abusivement basse ». Le président de Coop de France a rappelé la « raison d'être » des coopératives qui est « d'appartenir aux agriculteurs, d'être à leur service et à celui de leurs territoires. Par la possibilité de rendre judiciaire la relation (avec) les adhérents [...], nous fragiliserons, voire nous casserons cette dimension. Nous ne pouvons nous y résoudre », a insisté Dominique Chargé. Et de regretter l'instauration d'une loi plutôt que de tenir compte de l'évolution des pratiques en matière de gouvernance des coopératives. Didier Guillaume lui a assuré qu'il n'y a là « aucune volonté de mettre à mal la coopération mais au contraire de la développer ». Le ministre s'est en même temps dit « fermé totalement à ce qu'on revienne sur le fondement » du texte voté il y a un peu plus d'un an par le Parlement. « La loi n'en est qu'à ses balbutiements, a déclaré Didier Guillaume. Il n'est pas question de revenir dès maintenant sur le Titre 1 de la loi Egalim et surtout la partie économique », qui vise notamment l'encadrement des promotions et le relèvement du seuil de revente à perte.

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