« La biodiversité contribue largement à la richesse économique du territoire »
Les premières assises de la biodiversité se tenaient la semaine dernière à Limoges. En Nouvelle-Aquitaine, artificialisation des sols et pollution sont les deux grands facteurs de perte de variété du vivant.
Pour ses premières assises, l’Agence régionale de la biodiversité de Nouvelle-Aquitaine a gagné son pari : son président avait demandé que l’événement se tienne à Limoges et non à Bordeaux et, venus de toute la région, les participants ont largement rempli la salle d’assemblée plénière de l’ancien Conseil régional du Limousin. Élus, entrepreneurs, acteurs du monde associatif ou chercheurs y ont échangé pendant une journée pour lancer des pistes d’action pour la toute jeune agence, créée l’an dernier.
Pour le moment, il est difficile de brosser un tableau complet de la biodiversité régionale. Les recensements n’en sont pas au même degré d’achèvement suivant les acteurs et les territoires. L’espace régional est dominé par la forêt (un tiers de la surface) et les paysages agricoles (84 % de l’espace naturel). Son littoral s’étend sur 720 km et la plus grande région de France présente plusieurs visages. Trois aires biogéographiques s’y côtoient : atlantique, méridionale et montagnarde.
Même si elle n’est que partiellement connue, la biodiversité présente en Nouvelle-Aquitaine « contribue largement à la richesse économique du territoire » rappelaient lors de leur intervention Valérie Barbier et Laurent Chabrol, respectivement, responsable de la communication à l’agence régionale de la biodiversité et membre du conseil scientifique régional du patrimoine naturel. Les sols, notamment, contiennent la majeure partie de la biodiversité de notre planète, expliquait Marc-André Selosse lors d’une courte présentation, et toute production agricole dépend de leur activité microbienne.
Artificialisation
Pour tous les intervenants, le premier ennemi de la biodiversité est l’artificialisation des sols. « Tous les dix ans, l’équivalent du département de la Charente disparaît sous le béton », notait Nicolas Thierry, vice-président du Conseil régional à l’environnement et à la biodiversité qui ajoutait que la pollution venait en second plan dans les atteintes à la biodiversité. « Le risque, c’est de tomber dans l’utilitarisme » en donnant la priorité à « la survie de telle ou telle espèce parce qu’on la considère comme utile. Scientifiquement, on n’en sait rien. Il faut prendre conscience que sans la biodiversité, aucune activité humaine n’est possible. » Gilles Bœuf, président du conseil scientifique de l’agence française pour la biodiversité (voir entretien ci-dessous) rappelait l’exemple du rat-taupe nu, un animal à l’aspect physique repoussant jugé sans intérêt jusqu’à ce que l’on s’aperçoive qu’il ne développait pas de tumeurs et qu’il devienne un sujet de recherche.
Deux élues, Marie-Anne Robert-Kerbrat, élue communautaire de Limoges Métropole, et Nelly Perraud-Dausse, adjointe au maire de Périgueux, ont déploré que le développement des communes soit souvent considéré comme passant par l’extension des surfaces artificialisées. Pour Marie-Anne Robert-Kerbrat cette stratégie n’a pas de sens, notamment dans les départements ruraux : « on a 6 % d’artificialisation des sols et zéro gain de population. On a seulement vidé les centres-villes. »
La priorité de la Région Nouvelle-Aquitaine pour l’environnement a été réaffirmée. « Il y a une réelle volonté politique de la part de la majorité au Conseil régional de s’engager sur un basculement. J’ai proposé une assemblée plénière uniquement consacrée aux conséquences du changement climatique », indiquait Alain Rousset, président du Conseil régional. Il déplorait que « la prise de conscience » ne soit « pas totale », certains niant la responsabilité humaine dans le changement climatique jusque sur les bancs du Conseil régional, d’autres espérant être sauvés par des découvertes scientifiques improbables.
Alain Rousset a annoncé un travail partenarial à venir avec l’Éducation nationale pour remettre les sciences du vivant au cœur des programmes. Plusieurs intervenants scientifiques avaient, en effet, dénoncé leur disparition progressive du cursus scolaire.
Pour parler d’environnement « le bon sujet de sensibilisation, c’est l’eau ». Parce qu’il concerne tout le monde et qu’il va se poser de manière récurrente dans les années à venir, le sujet de l’eau rendra indispensable les échanges sur l’utilisation des ressources, la biodiversité, l’occupation de l’espace, l’équilibre entre les différents usages...
Parler, échanger, informer trouver des terrains d’entente pour agir, telle est la vocation de l’agence régionale qui rassemble les acteurs du territoire sur la question de la biodiversité a rappelé Alain Dutartre, président de la structure. « La biodiversité est garante de la survie de notre espèce. Elle ne nous appartient pas mais nous lui appartenons. »