Des plaquettes de bois de haies pour ne plus être sur la paille
Faire des “haies’conomies”, le leitmotiv de la Chambre d’agriculture qui accompagne les agriculteurs dans la valorisation du bois de haies en plaquettes litière. Parfaitement d’actualité.
Faire feu de tout bois : une expression prise au pied de la lettre par la chambre d’agriculture du Cantal qui, depuis 2016, a mis l’accent sur l’accompagnement des agriculteurs dans la valorisation comme litière du bois de leurs haies. Une corde de plus, gage d’économies, à l’arc des exploitants du Cantal, département avant-gardiste par ailleurs dans l’essor du bois énergie. Comme l’a indiqué vendredi lors de la dernière session de la mandature Nicolas Bardy, élu référent sur ce dossier, “on a voulu faire de cette charge - celle de l’entretien des haies sur les exploitations (NDLR) - un produit”. Et les aléas climatiques successifs avec une paille dont le prix a flambé à 160 €/t, “nous disent qu’on était dans le vrai”. L’émergence pour la première fois cet automne d’un marché de la plaquette litière. Depuis deux ans, la compagnie consulaire a donc mis des moyens via l’embauche d’Alexia Deltreil et multiplie les actions et formations pour promouvoir cette nouvelle ressource aux avantages multiples en élevage.
Économique, écologique, favorable au bien-être animal
En termes économiques d’abord : il faut compter entre 12 à 16 € le Map (mètre cube apparent)(1) (selon la technique, le chantier...) pour la plaquette litière, soit trois fois moins que la paille. Sachant que le chantier est beaucoup plus rentable qu’une coupe de bois classique en permettant de valoriser l’ensemble du ramage. La plaquette litière est aussi synonyme de gain de temps et de moindre pénibilité : la sous-couche de plaquettes reste en place trois semaines avant le paillage, dont la fréquence est elle-même réduite par la suite. Ce matériau dispose en effet d’un pouvoir drainant et s’avère plus sain pour les animaux. En assurant une meilleure autonomie des exploitations, elle contribue également à la diminution de leur empreinte carbone, notamment en évitant les transports. Autant d’arguments qui parviennent rapidement à convaincre les plus sceptiques, comme le rapporte Alexia Deltreil, anecdotes de formation à l’appui. “Certains agriculteurs arrivent en disant qu’ils ont beaucoup trop d’arbres, que leur entretien leur pèse... Au final, ils sont même prêts à en planter plus !” Preuve de cet intérêt : sur les 22 exploitants ayant suivi la formation “Faisons des Haie’conomies”, tous ceux disposant d’un volume exploitable suffisant, ont décidé de se convertir à la plaquette litière ou du moins de faire un test. Une “conversion” qui débute lors de cette même formation par un inventaire bocager individuel réalisé avec le conseiller agroforestier. Cet état des lieux permet de cartographier le maillage bocager de l’exploitation selon sa typologie et son âge afin de définir les volumes de bois valorisables de façon pérenne. Les différentes voies de valorisation sont étudiées économiquement avant un accompagnement de la mise en œuvre des techniques retenues.
Effet boule de neige
Le Gaec Vigier à Drugeac a témoigné dans une vidéo de sa satisfaction : suite à la formation, il s’est lancé il y a un an “compte tenu d’un surplus de bois” et les 250 m3 de plaquettes produites sur place sont jugées “raisonnables” compte tenu de la surface d’aire paillée de cet élevage salers. Un débouché qu’a aussi adopté Jacques Combourieux à Malbo, déjà équipé d’une chaudière à plaquette depuis la fin des années 2000. “Je l’ai d’abord essayé sur les veaux naissants en constatant une litière plus saine qui rend inutile l’ajout de produit asséchant. Avec les vaches, c’est exactement le même principe, c’est-à-dire un effet tampon, drainant qui favorise le bien-être animal.” L’éleveur qui “plaquette” une cinquantaine de mètres cubes de bois dans sa stabulation pour 38 vaches a calculé qu’il économise ainsi une vingtaine de tonnes de paille. “J’ai un patrimoine bois sur l’exploitation dont j’arrive ainsi à sauvegarder la valeur dans le temps”, estime l’exploitant qui, comme pas mal de ses collègues, a opté pour le recours à une pelle avec grappin coupant(2) pour “récolter” ce bois. “C’est fait en deux heures pour 150 m3 de bois tout en restant rentable, alors qu’avec un élagage à la tronçonneuse - plus dangereux-, il faudrait une quarantaine d’heures”, évalue Alexia Deltheil. “C’est un sujet qui prend de l’ampleur et sur lequel nous allons continuer d’accompagner les agriculteurs”, a conclu le président Patrick Escure, tandis qu’Alexia Deltreil soulignait que, sans le savoir, une majorité d’agriculteurs cantaliens étaient déjà des agroforestiers. Le représentant du CRPF s’est lui félicité de ce nouveau débouché pour le bois local en se disant prêt à associer sa structure à cette réflexion-action.
(1) Intégrant l’utilisation du matériel de l’exploitation et son amortissement, le carburant, le temps de travail de l’agriculteur.
(2) En faisant appel à un prestataire.