Adapter la ration des vaches laitières à des ensilages de maïs bien moyens
Cette année encore, les récoltes fourragères ont été à la peine. Pour équilibrer les rations et tenir jusqu’au printemps, il est temps de faire le point sur vos stocks et les besoins de votre troupeau.
Cette année encore, les récoltes fourragères ont été à la peine. Pour équilibrer les rations et tenir jusqu’au printemps, il est temps de faire le point sur vos stocks et les besoins de votre troupeau.
Encore une année fourragère difficile… Alors que les stocks de report étaient déjà au plus bas, la récolte de maïs de cette année n’a, encore, pas été à la hauteur des espérances. Partout le manque d’eau au printemps et en début d’été a non seulement pénalisé les rendements en herbe mais aussi en maïs, avec des ensilages entamés très et trop rapidement après la récolte.
Dans les Pays de la Loire, ceux qui ont eu de la pluie sur juin s’en sont un peu mieux sortis. « Mais, dans les zones les plus séchantes, de la Mayenne et de la Sarthe, les rendements se sont effondrés », constate Mickael Sergent, expert nutrition-robot chez Seenovia. « Pour l’Orne, les rendements sont de moyens à catastrophiques, souligne Olivier Raux, d’Elvup. Selon les zones, cela va de 6 à 7 t MS à 13 à 14 tMS, alors qu’en année correcte on va de 9 à 16 tonnes. »
Parfois compensé par une augmentation des surfaces
Même constat plus à l’Est, « dans les terres superficielles, on est parfois descendu à 3 tMS/ha, déplore Julien Homand, conseiller élevage à la chambre d’agriculture de Haute-Marne. Comme la récolte d’herbe a été à peine correcte, cela risque d’être tendu. » « Heureusement que les éleveurs ont augmenté leur surface en maïs par précaution, ça a permis d’un peu compenser le faible rendement », complète Lionel Vivenot, conseiller en élevage laitier à l’ULM. Dans le Massif central, les rendements ont été plutôt moyens en maïs. « Ce n’est pas une grande année, ni en maïs, ni en herbe », regrette Philippe Andraud, de l’EDE du Puy-de-Dôme.
Dans certaines zones, à l’Ouest notamment, l’automne a vu une belle repousse d’herbe avec du pâturage et même des possibilités de faire de l’enrubannage. « Cela donne un fourrage humide et une fermentation pas optimum, il faut donc le consommer rapidement mais cela fait du stock en plus », conseille Olivier Raux. « Cette herbe d'automne a quand même permis de récupérer 1,5 à 2 tonnes de matière sèche par hectare d’un fourrage utile pour améliorer la digestibilité d’une ration », confirme Mickael Sergent.
Double peine avec une moindre qualité
L’an dernier, c’était petit en rendement mais avec une bonne qualité. Mais cette année, c’est un peu meilleur en rendement mais moins bon en qualité. « Des premiers résultats sur maïs conservé, il semble que la qualité soit satisfaisante malgré un taux d’azote un peu faible », analyse Olivier Raux. Dans les zones plus marquées par la sécheresse, le maïs est pauvre en amidon. « On a des maïs pas trop lactogènes », remarque Mickael Sergent. Il est souvent riche en cellulose et pauvre en amidon, autour des 22-23 %. Cela donne des ensilages encombrants mais peu concentrés, avec des valeurs autour des 0,88 UF.
« Bien complémenté, ces maïs peuvent faire du lait », encourage Philippe Andraud. Pour y arriver, il faudra apporter de l’énergie et de l’amidon rapide (céréales, pulpes de betteraves pour ceux qui ont pu en acheter). Les maïs faibles en amidon manquent aussi de sucres, qu’on peut rapporter par de la mélasse ou des coproduits riches en sucre, type farine de biscuits. « Pour stimuler la flore ruminale, il faut suffisamment de sucres, d’amidon et d’azote, rappelle Mickael Sergent. Sur une ration bien calée, pour aller chercher plus de lait, des additifs comme des levures vivantes aident à stimuler la flore amylo-cellulolitique, donc à maximiser la production par rapport à l’aliment ingéré. »
À savoir
Au vu de la forte hétérogénéité des ensilages de maïs, il est vivement conseillé de faire analyser son fourrage pour adapter au mieux sa complémentation. Certains maïs moins riches en amidon et plus encombrants nécessiteront une complémentation énergétique pour maintenir un niveau de production équivalent à celui de l'an passé.
Affiner sa stratégie d’adaptation
Face aux années difficiles qui s’enchaînent, les éleveurs adaptent leurs pratiques pour sécuriser leurs stocks fourragers.
En cette nouvelle année de stocks tendus, il est plus que nécessaire d’établir un bilan fourrager précis pour anticiper ses besoins d’achats et proposer une ration aussi stable que possible. « En fonction de ses stocks et de son cheptel, il faut la calculer, soit jusqu’à ce que le pâturage prenne le relais, soit jusqu’aux prochains ensilages de maïs selon son système. Il ne faut pas compter trop juste, plutôt réfléchir sur 15 mois, conseille Mickael Sergent (Pays de la Loire). Certes, les stocks ont un coût mais ce sont les meilleures assurances face aux aléas climatiques. » Si des achats sont nécessaires, il faut les anticiper à la fois pour proposer une ration stable et pour en avoir à des prix corrects. D’autant plus que cette année, il y a peu de paille et de pulpe de betteraves surpressées sur le marché.
Quand la ressource est limitée, mieux vaut garder le maïs pour les vaches en lactation, quitte à passer les génisses en ration sèche. « Quand ils manquent vraiment de stocks, les éleveurs arrêtent des productions de viande qui sont peu valorisées pour recentrer leurs ressources fourragères vers le lait », constate Julien Homand (Haute-Marne).
Plutôt réfléchir sur quinze mois
« Ces trois années compliquées risquent de devenir la norme », craint Philippe Andraud (Massif central). Il est donc nécessaire d’assurer une partie des stocks au printemps, avant les coups de chauds de juin, avec de l’herbe, des méteils. Autant bien fertiliser les prairies et viser un compromis rendement, matière sèche et qualité. Pour constituer des stocks au printemps, « on peut semer du triticale pour pouvoir l’ensiler immature si la récolte d’herbe n’est pas suffisante », conseille Lionel Vivenot (Meuse).
Il faut également valoriser au mieux la production d’herbe à l’automne, avec le retour des pluies. Selon les parcelles, il faut profiter de cette pousse pour les laitières mais aussi les génisses. Il est aussi envisageable de faire un enrubannage, certes à consommer rapidement mais qui apportera un petit surplus de stock. Les betteraves redémarrent bien à l’automne au retour des pluies. On peut aussi semer des méteils en automne pour les ensiler tôt au printemps puis, si le sol a suffisamment de réserve hydrique, il sera possible de semer un sorgho, qui pousse jusqu’à 30°C.