Exportations allemandes
"L'Allemagne est prête à fournir le marché français"
Pour Hans-Wilhelm Windhorst, expert avicole à l’Ispa(1), le rythme de croissance de la filière allemande la forcera à exporter davantage.
Réussir Aviculture : Comment jugez-vous les performances techniques des éleveurs allemands ?
Une étude récente menée par l’Ispa auprès d’experts avicoles en Europe et aux Amériques, conclut qu’en oeufs, les Allemands sont très bien placés avec une productivité qui dépasse les 300 oeufs par poule et par an dans les meilleurs élevages. En volaille de chair, les Allemands sont compétitifs sur le poulet léger, mais ils gardent des marges de progrès. Le principal travail technique à mener dans les cinq ans à venir concerne le poulet lourd. En dinde, la performance est très correcte. Les éleveurs se situent dans le tiers supérieur. Mais ces petites lacunes sont bien compensées sur le plan économique par un coût d’abattage performant.
Les industriels recherchent de nouveaux éleveurs pour augmenter la production. Avec quelles conséquences ?
Si Rothkötter concrétise son projet à Wietze, ses concurrents ne vont certainement pas rester les bras croisés. La production va encore accélérer et le marché allemand ne pourra pas l’absorber entièrement. Il faudra donc exporter davantage. Les premiers marchés auxquels pense la filière sont à l’est, notamment la Russie, mais aussi à l’ouest : la Grande-Bretagne, les Pays-Bas et la France. La production française diminue parce qu’elle revient trop chère. Il faudra bien que la France se fournisse quelque part pour couvrir ses besoins. La seule question qui se pose est de savoir qui va la livrer. L’Italie ? L’Espagne ? Les Pays-Bas ? Ou l’Allemagne ? L’Allemagne est prête. Elle ne produit peut-être pas de poulet label rouge, mais je ne vois pas de différence de qualité sur le poulet standard, qu’il soit produit par Doux ou par Wiesenhof.
Jusqu’où cette croissance peut-elle aller ?
Je vois deux grands facteurs de nature à limiter la production de la Basse-Saxe qui est le seul bassin à être confronté à une telle problématique. Le premier est la surface disponible pour épandre les déjections. Le transport de fientes vers des zones où elles pourraient être épandues ne saurait être une solution que dans un rayon maximum de 250 kilomètres. Le deuxième facteur limitant, c’est la forte densité de volaille. La propagation d’une maladie comme la grippe aviaire aurait des répercussions rapides et catastrophiques. Actuellement, les frais vétérinaires pour la prophylaxie des dindons sont de 2 euros par animal en Basse-Saxe contre 0,50 euro dans les secteurs à faible densité.
Comment évolue la demande du consommateur allemand ?
Le marché allemand demande de plus en plus de frais, notamment des produits prêts à l’emploi. Les émincés marinés avec des légumes, des ailes prêtes à griller, des escalopes panées, etc. sont la seule chance dont disposent les industriels pour continuer à se démarquer de la concurrence du continent américain. Pour pouvoir reprendre leurs livraisons sur la Russie, les Etats-Unis ne feront plus passer leurs poulets dans des bains de chlore. S’ils sont en Russie, rien ne les empêchera de proposer leur marchandise en Europe. Les Brésiliens réfléchissent à mettre sur pied un approvisionnement du marché européen en volaille fraîche à reconditionner sur place – dans un premier temps - avec des A380 cargo capables d’embarquer 120 tonnes par rotation. La faiblesse de leur coût de production leur permet de supporter sans problème des frais de transport de 20 cents du kilo.
(1) Ispa : Institut de recherches et de prospective pour une agriculture intensive.