Formuler l’aliment volaille selon son impact environnemental
L’outil de calcul et d’aide à la décision Matriciel, développé par Mixscience, permet au fabricant d’aliment de connaître et de réduire l’impact environnemental lié à la production et au transport des matières premières.
L’outil de calcul et d’aide à la décision Matriciel, développé par Mixscience, permet au fabricant d’aliment de connaître et de réduire l’impact environnemental lié à la production et au transport des matières premières.
L’alimentation représente en moyenne 75 % de l’impact environnemental lié à la production d’un kilo vif de poulet, loin devant le bâtiment d’élevage, les effluents et le transport des animaux. « C’est donc principalement sur ce levier que la filière peut agir pour répondre aux attentes sociétales en matière d’environnement et se préparer à de futures exigences réglementaires, telles que l’affichage environnemental sur les produits », a souligné Léa Vernerey, de Mixscience lors d’un forum technique organisé en octobre par la firme services. C’est dans cette optique qu’a été développé le calculateur Matriciel. Intégré dans le logiciel de formulation, il permet au fabricant de connaître en temps réel l’impact environnemental d’un aliment formulé en fonction du score de chaque matière première sur les critères écologiques. Parmi la vingtaine de critères cités dans la bibliographie scientifique, sept d’entre eux ont été insérés dans la base de données Matriciel : le changement climatique (impact sur l’émission de CO2), l’acidification des sols, l’occupation du sol (surfaces agricoles mobilisées), la consommation d’énergie totale ainsi que trois critères d’eutrophisation des eaux terrestres, de surface et marines. « Même si le critère du CO2 est le plus couramment mis en avant, élargir à d’autres critères permet de travailler sur d’autres problématiques que le changement climatique : la compétition alimentaire (occupation des sols), les algues vertes (eutrophisation) ou l’économie d’énergie, intéressant particulièrement les productions hors sol », explique la nutritionniste. Pour un critère donné (par exemple la quantité d’énergie en mégajoules, l’outil Matriciel chiffre un indice global cumulant toutes les étapes du cycle de vie de l’aliment : c’est-à-dire l’énergie nécessaire à la culture des matières premières, leur transport vers l’usine, la fabrication de l’aliment et son transport vers l’élevage, ces deux dernières étapes étant personnalisables pour chaque fabricant. « Pour construire ce référentiel et sa méthode de calcul, nous nous sommes appuyés sur une méthodologie européenne et sur différentes bases de données publiques dont celle de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, en se basant sur le principe de l’Analyse de cycle de vie (ACV), ce qui en fait un outil robuste. »
Relier les impacts économiques et écologiques
L’intérêt majeur de Matriciel est de relier l’impact d’un aliment à un prix de formule, ce qui ouvre la voie à de multiples applications. Il est ainsi possible de comparer simultanément le coût et l’impact environnemental d’un aliment ou d’un programme alimentaire selon différents cahiers de charges (aliment sans OGM, protéines 100 % françaises, 0 déforestation…) en fonction du prix des matières premières disponibles à un instant t.
Le graphique 1 montre que selon le contexte de prix des matières premières, réduire l’impact environnemental d’un aliment n’est pas systématiquement synonyme d’augmentation de son coût. Il est possible d’inclure une contrainte environnementale plus ou moins forte dans le logiciel de formulation, comme on peut le faire par exemple sur la protéine. L’intérêt est de déterminer l’effet seuil au-delà duquel la réduction de l’impact environnemental devient trop coûteuse (graphique 2). « En ayant connaissance de ces valeurs écologiques et économiques, le fabricant peut plus facilement actionner les leviers qui réduiront l’impact environnemental de l’aliment. » Le premier levier étant le choix des matières premières. Il existe en effet une grande variabilité d’impacts entre les familles de matières premières (par exemple, l’impact CO2 des huiles est en moyenne plus élevé que celui des céréales) ainsi qu’au sein d’une même famille (l’huile de soja a un impact CO2 plus fort que les huiles de colza ou de tournesol). La variabilité est aussi liée à la conduite culturale : une huile de soja associée à la déforestation aura un impact CO2 plus élevé qu’une même huile non associée.
Cet outil permet aussi de communiquer sur des informations chiffrées de réduction d’impact et de valoriser les efforts faits par la filière auprès des clients et des consommateurs. « En fonction de la demande de notre client fabricant d’aliment, il sera possible de pousser l’analyse jusqu’à l’abattoir, c’est-à-dire de mesurer l’impact environnemental d’un kilo de produit fini (poulet vif, œuf, filet). » Des études sont également en cours pour relier les performances environnementales et zootechniques (par exemple une baisse de l’indice de consommation).