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Des volailles bien protégées contre la BI

La protection contre les virus de la bronchite infectieuse passe par une stratégie vaccinale adaptée et une maîtrise sans faille des pratiques d’administration.

« Pourquoi les épidémies de bronchite infectieuse subsistent-elles malgré la mise en place de programmes prophylactiques avec des vaccins efficaces ? », pose en préambule Sjaak de Wit. Intervenant d’une conférence de Merial sur la bronchite infectieuse, le chercheur de l’université de Deventer aux Pays-Bas y voit de multiples causes à commencer par « l’exposition récurrente des volailles à des variants, l’immunodépression liée à d’autres maladies, les interférences avec d’autres vaccins ou avec les anticorps maternels, l’intervalle trop court entre la vaccination et l’infection ou une mauvaise administration du vaccin ». Elles trouvent leur explication dans la nature même du virus de la bronchite infectieuse. Ce virus à ARN de très grande taille a une forte aptitude à générer des mutants. Une grande diversité de virus circule sur le terrain : des souches classiques avec des génotypes bien établis (de type Massachusetts) et des souches variantes telles que le QX, apparu il y a une dizaine d’années. Chaque année des souches apparaissent et disparaissent. Se cantonner à une prophylaxie avec un vaccin homologue, c’est-à-dire fabriqué à partir de la même souche que le virus sauvage, est de fait illusoire. On privilégie une stratégie vaccinale avec plusieurs sérotypes (vaccins hétérologues) pour améliorer la protection croisée. L’objectif est de stimuler l’immunité contre des souches du terrain de la même famille que celles des vaccins. « Un programme large de vaccination favorise l’immunité croisée », a démontré Sjaak de Wit. Il a compilé les résultats de 18 travaux expérimentaux mesurant l’efficacité de plusieurs protocoles vaccinaux (6 sérotypes différents) sur des poulets contaminés par une des huit souches de virus BI étudiées(1). Le taux de protection dans le cas d’un vaccin hétérologue est de 50 % contre 97 % pour un vaccin homologue. Mais lorsqu’on cumule deux ou trois vaccins hétérologues de sérotypes différents, le taux de protection monte à 75 %, avec une forte variabilité. « L’effet « protection croisée » est d’autant plus avantageux lorsqu’arrive un nouveau variant », complète Francesco Prandini, directeur des services vétérinaires techniques de Merial.

L’administration de masse est plus risquée

Pour ces virus BI enveloppés (ARN protégé par une couronne), la protection vaccinale avec des vaccins vivants atténués devrait idéalement se faire avec une administration par goutte dans l’œil. Trop coûteuse, elle est remplacée par une nébulisation ou par une distribution dans l’eau de boisson. « Avec une application de masse, l’objectif d’une dose suffisante pour chaque volaille est plus complexe à atteindre, car ces modes d’administration induisent forcément des pertes de solution vaccinale, par voie buvable encore plus que par nébulisation. D’où l’importance de tout mettre en œuvre pour que l’application soit la plus efficace possible. Vacciner contre la BI n’est pas un geste de routine. » Le chercheur a synthétisé les résultats d’une soixantaine d’essais en élevages de poulets, de poulettes et de reproducteurs et mit en avant les facteurs qui influencent la prise vaccinale suite à une administration par nébulisation. Il montre un effet positif du temps consacré à la distribution du vaccin, de l’arrêt de la ventilation (+15 % d’oiseaux immunisés) et du niveau d’éclairement (+41 % d’écart entre une salle éclairée et obscure). « Stimulés par la lumière, les oiseaux ont les yeux bien ouverts. C’est une voie d’entrée privilégiée des particules de vaccin. » La température basse de la solution vaccinale joue également. Pour chaque degré en moins (entre 18 et 6 °C), on améliore la réponse immunitaire de 3,2 %. L’élevage au sol des poulettes est plus favorable que le logement en cages (53 % contre 31 % de réponse immunitaire) car il favorise les contacts entre animaux. Le respect du délai de 15 jours avant la deuxième vaccination BI est important pour éviter le risque d’interférence avec celui administré au couvoir. « Lorsque l’on fait varier la seconde vaccination entre 8 et 20 jours d’âge, la réponse immunitaire augmente de 2,5 % par jour supplémentaire. »

D’autres éléments sont à prendre en considération en fonction du contexte sanitaire de l’élevage. « Si les pratiques d’administration sont bien maîtrisées, on obtient une meilleure protection en séparant les deux vaccinations BI (l’une à un jour, la seconde à 14 jours). Mais lorsque la pression BI est forte, il vaut mieux regrouper les deux vaccinations au couvoir. »

(1) Méta-analyse publiée en 2013 dans Avian Pathology.

Un tableau lésionnel qui va au-delà des troubles respiratoires

Les virus BI se caractérisent par une forte capacité d’évolution et par un tropisme tissulaire très large. La bronchite infectieuse est une maladie virale qui touche toutes les espèces aviaires. Elle s’exprime surtout par des troubles respiratoires mais elle affecte également l’appareil digestif, les reins et l’appareil reproducteur. Les lésions génitales induites (fausses pondeuses, déformation des œufs) peuvent avoir une incidence importante sur la qualité et la quantité d’œufs. « Le terme historique de « bronchite » est un peu erroné car les virus BI ont un tropisme tissulaire très large, souligne Jean-Luc Guérin, de l’ENV de Toulouse. Les lésions rénales sont probablement insuffisamment prises en compte. »

Le virus BI fait partie de la famille des coronavirus. Il est entouré d’une coque protéique et d’une enveloppe, d’où son nom de « couronne ». Relativement fragile et sensible à la chaleur et aux désinfectants, il survit en présence de matière organique. « Elle forme une matrice protectrice des particules virales. C’est le cas aussi pour les virus influenza aviaire. » La grande capacité d’évolution des coronavirus s’explique par deux grands mécanismes. Le principal est le phénomène de mutation, qui est propre à tous les virus à ARN. Des recombinaisons entre virus sont également possibles pour créer des virus chimères. « Elles sont liées à des sauts de matrice lors de la transcription de ces virus de très grande taille (27 000 nucléotides) », précise le chercheur.

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