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Tomate : des variétés gustatives et résistantes pour le sol

L’attente des consommateurs pour des tomates gustatives, la diversification des types cultivés et la recherche de pratiques écologiques amènent producteurs et stations à tester un nombre croissant de variétés.

De 2018 à 2020, plus de 130 variétés de tomate auront été testées dans le cadre du projet Tegusta(1) en Provence (Aprel), Bretagne (Terre d’Essais) et Alsace (Planète Légumes). Financé par Interfel et piloté par l’Aprel, le projet vise à identifier les variétés de tomate pour le sol les plus gustatives et permettant une conduite agroécologique. « La tomate est un produit de forte consommation et une des principales productions des maraîchers, explique Claire Goillon, de l’Aprel. Depuis toujours, les stations d’expérimentation font donc des essais variétaux en tomate. Longtemps, ces essais ont porté sur le type rond rouge. Mais depuis dix ans, il y a une forte diversification en tomate. Par ailleurs, l’attente des consommateurs pour le goût, critère lié surtout à la variété, est de plus en plus marquée. Les semenciers ont intégré ces tendances et proposent de plus en plus de variétés gustatives pour les différents types. » S’y ajoutent l’augmentation des surfaces en bio et le développement de conduites moins consommatrices en intrants (zéro résidu, HVE…). « Il y a donc un besoin d’expérimentation pour identifier les variétés répondant au mieux aux attentes des producteurs de chaque région en termes de rendement, port de plante, résistances, conservation et goût », souligne Claire Goillon.

Essais en bio et en conventionnel

Outre le goût et le rendement, les principaux critères recherchés aujourd’hui sont la résistance à la cladosporiose, problème récurrent et qui semble s’accroître ces dernières années, et la résistance aux virus, notamment au TSWV. En Provence, les essais en bio ou conventionnel ont d’abord porté sur les variétés de diversification. « Alors qu’il y a quinze ans, un maraîcher ne cultivait qu’une variété, il peut en avoir aujourd’hui 20 ou 30 dans plusieurs types, constate Claire Goillon. La gamme variétale étant large, les producteurs ont besoin de références sur les variétés récentes. » Si l’offre est satisfaisante pour certains types (côtelée rouge), des manques apparaissent encore pour d’autres. « En tomate côtelée jaune, les variétés restent complexes à produire, constate Claire Goillon. L’Aprel va donc tester huit variétés de ce type en 2020. L’allongée cornue manque aussi de variétés très résistantes. En allongée cœur, beaucoup de variétés sont proposées, mais la plupart ont au moins un défaut qualitatif, comme des fruits peu typés au démarrage, des défauts de coloration, la sensibilité à la nécrose apicale… Nous testons aussi dans ce type des variétés jaunes et roses, le rose en particulier étant souvent associé à un bon niveau gustatif. » Des essais seront menés aussi en 2020 sur la tomate grappe en bio. « Les producteurs conventionnels se concentrant plus aujourd’hui sur la diversification, il y a une place à prendre en grappe bio en élevant le niveau gustatif, estime Claire Goillon. Nous allons tester douze variétés de grappe pour le sol en 2020. »

Grappe, ronde et diversification

En Bretagne, les essais initiés en bio par les OP adhérentes à la section technique du Cerafel portent sur la grappe et de plus en plus les variétés anciennes. « La grappe est la principale production des producteurs bio de ces OP, précise Hervé Floury, de Terre d’Essais. L’objectif est notamment d’identifier des variétés résistantes à la cladosporiose. Il y a deux à trois ans, il y a eu un contournement de résistance sur la variété utilisée jusque-là par les producteurs, lié sans doute à une nouvelle souche de cladosporiose. Les essais ont permis d’identifier une variété, Codino (Vitalis), qui résiste à cette nouvelle souche, avec une qualité gustative correcte. Tous les producteurs utilisent désormais Codino. » Des essais ont également été menés en 2018 en cocktail, avec là aussi l’identification d’une variété résistante à la cladosporiose. Enfin, des recherches sont initiées depuis 2019 sur les variétés anciennes (Ananas, Noire de Crimée, zébrée verte, cœur, côtelée verte, andine, allongée…). « L’idée est de décliner en bio les gammes de tomates anciennes des OP. L’objectif est d’avoir au moins une variété référencée par type, en insistant sur la qualité gustative, les attentes de goût étant encore plus marquées en tomates anciennes. » En Alsace, les essais en 2018 et 2019 ont porté sur la tomate ronde, en bio et conventionnel. En 2020, des essais sont engagés sur des variétés de diversification type cœur et Marmande. « Et en parallèle de Tegusta, nous testons chaque année des variétés de diversification de types côtelée, noire, rose, zébrée, cerises rondes et allongées, cocktail… pour lesquelles nous évaluons principalement l’adaptation au type de sol et au climat de la région », précise Floriane Bart, de Planète Légumes.

Tests hédoniques

L’objectif étant d’identifier des variétés gustatives, des dégustations sont organisées à plus ou moins grande échelle. En Alsace, en plus des mesures de fermeté et de taux de sucre, des tests hédoniques ont été réalisés dans des cantines (Sodexo) et sur la foire aux vins de Colmar, avec à chaque fois 50 à 60 dégustateurs. « Sur les huit variétés testées à la première dégustation, c’est une variété rose, Honey Moon, qui a été la plus appréciée, indique Floriane Bart. A la deuxième dégustation, c’est Paola qui a été préférée, Ciciu, Elvirado et E15B.42122 étant moins appréciées. » Un essai a aussi été mené en 2019 en tomate ronde pour évaluer l’impact du greffage sur la qualité gustative. « Les dégustations ont montré que le greffage dégrade le goût de Previa, Elegance et Paola, mais ne semble pas influer sur les autres variétés, rapporte Floriane Bart. Le porte-greffe n’influence par contre ni la fermeté ni le taux de sucre dans nos essais. » A l’Aprel, des dégustations sont organisées avec un petit nombre de dégustateurs formés invités à caractériser les variétés (couleur, acidité, sucre, flaveur, croquant…), complétées par des mesures de taux de sucre et une note d’appréciation globale. En Bretagne, en plus de mesures d’indice Brix une fois par mois, des tests hédoniques sont organisés chaque année avec une quinzaine de producteurs et techniciens. « Ces méthodes complémentaires permettent d’identifier les variétés les plus appréciées au plan gustatif et de conseiller les producteurs dans leurs choix variétaux pour mieux répondre à leurs clients », résume Claire Goillon.

(1) Tegusta : Tomate En sol, recherche d’une production GUSTative dans un système Agroécologique performant

« L’attente des consommateurs pour le goût est de plus en plus marquée » Claire Goillon, Aprel

Appréciation de variétés d’abri et de plein champ

Dans la Vienne, à l’initiative des maraîchers en circuits courts « Les Maraîchers dynamiques » et avec le soutien du Conseil départemental, des dégustations ont été organisées par l’Acpel et la Chambre d’agriculture pour connaître les attentes des consommateurs des circuits courts. Entre 70 et 80 avis par variété ont été obtenus sur des lieux de vente. En 2017, six variétés d’abri ont été testées. Paola, la référence, est appréciée pour son aspect visuel et son goût. Gloriette, Loriane et Paronset sont appréciées pour leur aspect, mais moyennement pour le goût. Celesteen et Gaheris sont appréciées pour l’aspect, mais peu pour le goût. En 2018, les dégustations ont porté sur six variétés de plein champ avec conduite à plat. L’aspect visuel et le goût d’Hector, la référence, sont appréciés des consommateurs. Diabolik, Tribeca, Defiant, Dyno et Amapola sont appréciées pour l’aspect, mais moyennement pour le goût.

 

Trois critères en plus du goût

1 – La résistance aux maladies

La plupart des variétés sont désormais résistantes au virus TMV, à la fusariose et à la verticilliose. Les variétés résistantes à l’oïdium sont également plus nombreuses. Les attentes aujourd’hui portent donc surtout sur les résistances à la cladosporiose et aux autres virus (TSWV, ToMV, TYLCV…). La résistance au mildiou est également recherchée en plein champ et en fin de saison sous abri, notamment en Bretagne. Et sous abri, la tolérance aux nématodes est importante.

 

2 – L’adaptation au contexte

L’adaptation au contexte de production est un critère de base. Les variétés doivent être adaptées au sol, au climat, aux rotations courtes et intensives et à des sols parfois fatigués sous abri. Elles doivent convenir au circuit de commercialisation (conservation, diversité, aspect, goût). Et l’adaptation au changement climatique devient essentielle, les variétés devant notamment pouvoir résister aux canicules.

 

3 – La disponibilité en semences biologiques

Au 1er janvier 2025, la tomate ronde rouge biologique passera hors dérogation. Or, peu de variétés sont disponibles en semences biologiques. Les stations mettent donc l’accent sur ce type pour identifier les variétés les plus adaptées au bio et inciter les semenciers à les proposer en semences biologiques. Les autres types de tomate sont passés en écran d’alerte au 1er janvier 2020, pour un passage hors dérogation plus tard. La plupart ne sont aujourd’hui proposées qu’en semences non traitées.

 

Améliorer les références en bio

En maraîchage biologique sous abri, les rotations courtes et intensives et le retour fréquent des solanacées et cucurbitacées peuvent engendrer des problèmes sanitaires. Un programme de recherche, Opti Abri Bio, piloté par l’Itab, a donc été engagé en 2018 pour trois ans pour identifier les espèces et variétés les plus adaptées à ce contexte par leur rusticité et/ou leur résistance aux pathogènes. Le Grab, la PAIS (Initiative Bio Bretagne), le Civam Bio des Pyrénées-Orientales et Terre d’Essais y participent. En tomate, les essais se concentrent sur le type rond rouge qui passera hors dérogation en 2025. Au Civam Bio 66, des essais comparant une douzaine de variétés ont été réalisés en 2018 et 2019. « En 2019, le rendement des variétés testées varie de 12 à 16 kg/m², indique Célia Dayraud, du Civam Bio 66. Nous regardons aussi la précocité, les défauts et la part de premier et deuxième choix, le calibre, la conservation, importante en circuit long, et la vigueur, une végétation trop vigoureuse pouvant gêner la récolte. Les variétés sont aussi évaluées par un panel de dégustateurs de tous âges. Le rendement et la part de premier et deuxième choix choix restent toutefois les critères principaux. » A la PAIS, entre 10 et 15 variétés de tomate ronde rouge sont testées chaque année, avec des observations de rendement, précocité, calibre… et une importance croissante accordée au goût. La station, hors projet Opti Abri Bio, teste aussi chaque année une vingtaine de variétés population de diversification. « Certains distributeurs bio spécialisés insistent pour avoir des légumes issus de variétés population, explique Sébastien Louarn, de la PAIS. A la demande des groupements Bio Breizh et L’Armorique Maraîchère et avec des financements régionaux, la PAIS mène donc des actions d’évaluation et de multiplication de variétés issues du commerce ou de banques génétiques. Nous testons ainsi des variétés de tomate bleues, roses, oranges… que nous évaluons en termes de rendement, précocité, port de plante…, les variétés populations étant peu sélectionnées et ayant parfois beaucoup de feuillage et des entre-nœuds longs. »

 

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