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Sécheresse : l’agriculture de conservation des sols est favorable au réservoir utilisable sous conditions

Le semis direct associé à une couverture des sols toute l’année permet de retrouver des sols vivants propices au réservoir utilisable. Mais attention au tassement et à la consommation en eau des couverts.

Pour les dérobées avant maïs, les éleveurs ont tendance à délaisser les ray-grass d'Italie et à opter pour des méteils réputés moins consommateurs d'eau. Et à ...
Pour les dérobées avant maïs, les éleveurs ont tendance à délaisser les ray-grass d'Italie et à opter pour des méteils réputés moins consommateurs d'eau. Et à rechercher des méteils précoces pour libérer plus tôt les parcelles avant maïs.
© C. Pruilh

L’agriculture de conservation des sols est citée par de nombreux agronomes comme la voie reine pour améliorer le réservoir en eau utilisable et pour armer son système agricole face au manque d’eau. Selon Romain Tscheiller, d’Arvalis, il n’y a pas de solution miracle. L’ACS a des atouts mais aussi des limites auxquelles il faut faire attention pour éviter la déception.

Côté atouts, l’absence de travail du sol perturbe moins la vie dans le sol, et permet à la microfaune (champignons, bactéries…) et la macrofaune (vers de terre, termites…) de travailler la structure du sol. Les couverts sont un pilier de ces systèmes en apportant de nombreux services, dont la structuration des sols qui permet d’entretenir le réservoir en eau utilisable.

Moins de pertes d’eau et de sol

La vie dans le sol est favorisée par la présence des couverts, via les échanges symbiotiques au niveau des racines par exemple. Les racines des couverts améliorent la structure du sol. L’eau s’infiltre dans le sol au lieu de ruisseler vers les fossés et rivières en érodant au passage la surface du sol. L’Inrae de Normandie évalue que les couverts permettent de diviser au moins par dix l’érosion.

Le couvert végétal offre aussi une protection du sol par le feuillage contre l’érosion due au vent et à la pluie. Enfin, il réduit la perte d’eau liée à l’évaporation du sol. L’Inrae insiste sur le fait que « les pratiques agricoles qui améliorent la structure du sol doivent être promues moins pour leur capacité à augmenter la taille du réservoir utilisable, que pour leur capacité à limiter les pertes en eau (évaporation, ruissellement) et favoriser les échanges ».

Attention au tassement du sol !

Côté limites, l’agriculture de conservation des sols est un processus long qui peut conduire à des déceptions les premières années, quand le sol n’est pas encore suffisamment vivant et structuré. Il peut se refermer et se tasser.

Romain Tscheiller, d’Arvalis, insiste : « En agriculture de conservation des sols, un point de vigilance est la structure du sol. Cultiver dans un sol compacté sera plus perdant à cause de l’effet négatif sur la structure du sol, que gagnant avec une hausse de la matière organique. Nous conseillons dans ce cas-là de procéder à un décompactage. »

Un couvert, ça consomme

Autre limite, le couvert pompe de l’eau du sol. « Les couverts végétaux entraînent une diminution des quantités d’eau réalimentant les nappes phréatiques, de l’ordre de 10 à 30 mm/t MS produite par rapport à un sol nu, rappelle Sébastien Minette, de la chambre d’agriculture de Nouvelle Aquitaine. Mais ces prélèvements restent modérés vis-à-vis des services rendus par les couverts végétaux sur la lutte contre l’érosion, la fuite des nitrates… L’autre point discutable est de considérer le sol nu comme la référence. »

De nombreux essais sont en cours pour déterminer l’impact sur l’eau des couverts retournant au sol et des dérobées valorisées par les animaux. Mais il faut plusieurs années, tant l’effet année climatique joue et tant les facteurs influençant le réservoir utilisable et la teneur en eau du sol sont multiples. Pour l’heure, voici ce que l’on sait.

Attention aux destructions tardives des couverts

Dans la bibliographie, les résultats d’essais ne tranchent pas la question du bilan positif ou négatif des couverts. Cela dépend des mélanges, de leur durée d’installation sur une parcelle, du type de sol, de la météo de l’année…

Dans le rapport de l’Inrae sur les cultures intermédiaires Conséquences sur les bilans d’eau et d’azote, autres services écosystémiques, les auteurs recensent plusieurs références venant d’Amérique du Nord et d’Europe du Nord-Ouest. Ils concluent que « les cultures intermédiaires n’induisent pas de fortes modifications de la réserve en eau du sol au semis du suivant, sauf si leur destruction intervient très tardivement. Excepté dans des cas extrêmes (destruction tardive du couvert une semaine avant ou le jour du semis du maïs), aucun effet significatif sur l’alimentation hydrique de la culture suivante n’a pu être démontré ».

En outre, en climat tempéré, toutes les études collectées évoquant l’effet de l’évapotranspiration des cultures intermédiaires sur l’alimentation hydrique de la culture suivante concluent à un effet non significatif. Les auteurs citent même des contre-exemples, comme dans le Nord-Dakota (Badarrudin et Meyer, 1989), où « des légumineuses ont conduit à une augmentation de 30 mm de la réserve en eau dans les 30 premiers centimètres du sol au printemps, par rapport à un sol nu ».

Un léger avantage à la paille épaisse ?

D’après des résultats d’essais d’Arvalis, l’effet positif d’un couvert d’interculture sur la teneur en eau des sols n’est pas évident.

Une première série d’essais, menés de 2017 à 2019 (années où les conditions climatiques n’étaient pas trop stressantes au printemps) a comparé l’impact d’une paille épaisse, d’un couvert détruit au semis du maïs et d’un couvert broyé trois semaines avant le semis, à un sol nu.

Les conclusions sur les rendements du maïs grain suivant divergent selon les années. « Il semble que le paillage épais garderait le sol plus humide en surface que les mulchs de couvert, eux-mêmes plus protecteurs qu’un sol nu, mais consommateurs d’eau. » Arvalis reconnaît que cette série d’essais n’est pas suffisante et que sur le terrain, lorsque les agriculteurs mettent en place un couvert présent au semis, l’ensemble de l’itinéraire est adapté : date de semis, choix des variétés, fertilisation…

Un nouvel essai a été mis en place en 2021, où des lignes sont travaillées au strip-till au sein du couvert trois semaines avant le semis du maïs, avec une conduite irriguée différenciée pour chaque modalité. « Les premiers résultats semblent montrer que cette technique offre un compromis intéressant, mais les gains sur l’efficience de l’eau ne sont toujours pas évidents », résume Romain Tscheiller.

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