Trois questions à Christophe Beaunoir, directeur général de Saipol
Saipol : « Nous ne pensons pas manquer de graines de tournesol cette année »
A l’occasion des 15 ans de l’usine de trituration de colza 100% français du Mériot, Christophe Beaunoir, directeur général de Saipol est revenu sur la situation des marchés pour La Dépêche Le petit meunier.
A l’occasion des 15 ans de l’usine de trituration de colza 100% français du Mériot, Christophe Beaunoir, directeur général de Saipol est revenu sur la situation des marchés pour La Dépêche Le petit meunier.
La Dépêche Le petit meunier : Il y a quelques années, Saipol indiquait que le marché mondial de l’huile de tournesol à destination de l’alimentation humaine était saturé. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas ? Est ce parti pour durer ?
Christophe Beaunoir : Pour les usages en alimentation humaine, le marché des huiles est globalement à peu près stable avec des particularités par type d’huiles. Le marché de l’huile de colza pour l’alimentation est effectivement saturé, il n’y aurait d’ailleurs pas de telles superficies en colza en France (1,1Mha) s’il n’existait pas d’autres débouchés pour cette huile comme les biocarburants car les tourteaux ne suffisent pas à l’équilibre économique de la trituration. L’équilibre des huiles est évidemment remis en cause par la guerre en Ukraine. Toutefois, l’huile de tournesol constitue un petit marché au niveau mondial puisqu’elle est principalement consommée dans l’Union Européenne, en Amérique du Sud et en Inde, le reste du monde consommant surtout des huiles de soja et de palme. Les Européens perçoivent actuellement ce déséquilibre car ils sont en première ligne mais les choses devraient retrouver un équilibre sous l’impulsion des prix relatifs. La France, voire l’UE, sème ainsi cette année plus de tournesol. Les semis sont en cours, mais nous aurions environ 100 000 hectares de tournesol de plus que l’an dernier dans l’Hexagone. Et cette tendance à la hausse des surfaces va surement perdurer l’année prochaine pour atteindre au total 1 million d’hectares en 2023 en France.
C.B : Oui, absolument, les marchés sont dirigés par les prix. Il est vrai qu’en 2008-2009, nombreux sont les agriculteurs à avoir regretté de ne pas avoir vendu assez tôt et d’avoir laissé passer les bonnes opportunités. Ils veulent donc saisir les occasions. Mais cela ne change en rien notre activité de trituration ni nos prévisions. Nous ne pensons pas que nous manquerons de graines cette année. Il existe d’ailleurs des volumes de graines de la récolte 2021 qui se remettent à sortir d’Ukraine par la Pologne et la Roumanie. Il faudra bien sûr voir comment se déroulent les semis et la conduite des cultures en Ukraine pour 2022 et 2023. Reste aussi la grosse interrogation sur l’état de ses outils de trituration en raison des frappes ciblées sur les différents outils de production agricoles. Or, si une usine est touchée, il faut au moins deux ans pour la reconstruire.
C.B. : Les décisions des agriculteurs sont naturellement liées aux prix relatifs que ce soit pour la date de la vente ou pour leurs semis. Cette année la France sera au total proche des 2 millions d’hectares d’oléagineux entre les 1,1 M ha de colza et les 800 000 ha de tournesol. Cela redonne de réelles marges de manœuvre pour la trituration en France des graines nationales. Elles représentent d’ailleurs plus de la moitié des graines triturées par Saipol dans ses 5 outils français, deux d’entre eux (Le Meriot et Lezoux) étant d’ailleurs, de par leur localisation au milieu des terres, dédiées exclusivement aux graines françaises. Nous visons à augmenter aussi cette part nationale dans nos trois implantations portuaires, que ce soit Bassens ou Grand Couronne voire Sète. Et nous soutenons la production en France de graines à basse émissions de gaz à effet de serre avec une prime qui est passée de 27 à 50 €/t pour accompagner aussi l’augmentation des cours de colza et de tournesol avec notre dispositif OleoZe pour des graines issues de pratiques agricoles durables et tracées. Nos clients allemands et suédois notamment sont très demandeurs.