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« Notre atelier haie nous rapporte 10 500 € par an »

Dans le Finistère, les trois associés du Gaec de Kergavarec gèrent, comme un atelier à part entière, leurs 23 kilomètres linéaires de haie. Ils calculent leur coût de production et le bénéfice qu’ils en tirent.

Laurent, Jacques et Olivier Abily, trois frères associés, sont producteurs de lait. Mais pas que. « Nous sommes aussi producteurs de bois », affirme l’aîné, Laurent. Les éleveurs travaillent sur deux sites. Le premier, à Guipavas, où il n’y a pas eu de remembrement. Le second, à Plabennec, a subi « des arasements massifs de talus ». Depuis qu’ils ont replanté des haies et recréée des talus, les éleveurs gèrent 23 kilomètres linéaires de haie. « Nous disposons d’un bon stock de bois. »

Fiche élevage

Gaec de Kergavarec

2 sites

3 associés

140 vaches laitières à 7 000 l

20 limousines

1 million de litres de lait

180 ha de SAU dont une centaine en herbe et 20 ha de céréales

23 km linéaires de haie, soit une densité de 127 m de haie/ha de SAU

Ils établissent alors un plan de gestion durable des haies (PGDH). « C’est un outil d’état des lieux et de connaissance qui vise la pérennité des haies dans le temps par une gestion différenciée et une valorisation du bois à l’échelle de l’exploitation », définit Yann Gouez, du syndicat des eaux du Bas-Léon, opérateur technique qui accompagne le Gaec. L’objectif est de trouver un équilibre entre rentabilité et préservation des ressources. Pour faciliter les démarches, l’Afac-Agroforesteries a développé un outil dans lequel sont intégrés « une quarantaine de critères ». Les coûts de chantier du bois bûche et du bois plaquette reposent sur des données nationales de la FNCuma. La valorisation du bois, elle, se base sur les prix des sociétés d’intérêt collectif locales. Selon le plan de gestion de la haie établi, les éleveurs prélèvent 1 150 mètres linéaires par an, soit 288 m3 de bois sec.

Les coûts de production du bois bûche et du bois plaquette

« Nous avons calculé le coût de production du bois bûche. Pour l’abattage, le débardage, la fendeuse et la main-d’œuvre – la nôtre comprise –, il s’élève à 109,48 €/t », poursuit Laurent Abily. Vu le temps passé et le prix de vente, les éleveurs ont estimé que ce n’était pas rentable d’appliquer cette gestion à l’ensemble du linéaire de haie. Mais les trois frères décident d’en produire « dix tonnes pour la vente et quinze tonnes pour l’autoconsommation ». Soit 905 € de bénéfice à la revente et 5 283 € de gains par rapport à une chaudière électrique.

Le coût de production du bois plaquette, moins chronophage, a aussi été chiffré. Le coût du chantier intègre l’abattage et le débardage, le déchiquetage et le transport par les éleveurs. À chaque étape, la main-d’œuvre est, là encore, prise en compte. Résultat : 43,32 €/t.

 

Coûts de production de bois plaquette et de bois bûche au Gaec de Kergavarec 
Bois plaquette Bois bûche 
Abattage + débardage 20 €/t Abattage + débardage 20 €/t 
Volume 90 t Volume 25 t 
Total 1 800 € Total 500 € 
Déchiquetage + transport 23,32 €/t Fendeuse 32 €/j 
Volume 90 t Durée 16 j 
Total 2 098,80 € Total 512 € 
  Main-d’œuvre 15 €/h 
  Temps de travail 115 h 
  Total 1 725€ 
  Total coût fendeuse + main-d’œuvre 2 237 € 
Total coût chantier bois plaquette 3 898,80 € Total coût chantier bois bûche 2 737 € 
Total coût chantier bois plaquette par tonne 43,32 €/t Total coût chantier bois bûche par tonne 109,48 €/t 
Source : Gaec de Kergavarec 

Les éleveurs ont testé trois hypothèses pour calculer l’intérêt économique d’utiliser ces plaquettes en copeaux pour la litière. Le premier cas fait état d’une litière 100 % paille. Vu la configuration de l’exploitation (20 ha de céréales), les éleveurs doivent en acheter pour un montant de près de 7 000 €. Le deuxième cas étudie les coûts d’une litière mixte. Le troisième cas, celui d’une litière 100 % copeaux. Dans les deux scenarii intégrant des plaquettes, les éleveurs réalisent des économies : près de 3 000 € en litière mixte et plus de 5 000 € en litière 100 % plaquette.

C’est l'option mixte qui a été retenue. « Nous utilisons 200 m3 par an pour la litière, pendant trois mois, pour les taries, les génisses et les allaitantes. Soit presque 200 bêtes. Les allaitantes et les génisses ont une sous-couche de 10 cm pendant dix jours, puis je les paille. Elles sont curées toutes les six à huit semaines. Les taries ont une sous-couche de 20 cm, que je remue. Nous réalisons de vraies économies sur la paille », apprécie Laurent Aliby.

Le reste des plaquettes sert à alimenter la chaudière bois installée sur le site de Plabennec, par les deux frères de Laurent, pour chauffer leurs maisons et l’eau de la laiterie. Selon les chiffres de l’Afac-Agroforesterie, le gain par rapport à un chauffage électrique s’élève à 1 350 €. Soit, tout mis bout à bout, une marge nette de 10 500 € par an générée par l’atelier haie.

Un gain total d’un peu plus de 10 500 euros avec les haies 
Dépenses de production Coût de production du bois bûche 109,48 €/t 
• 10 t pour la vente = 1 095 € 
• 15 t pour le chauffage = 1 642 € 
Coût de production du bois plaquette 43,32 €/t 
• 16,36 t pour la litière = 709 € 
• 73,64 t pour le chauffage = 3 190 € 
Revenu 
direct 
Vente de bois bûche • 10 t vendues à 200 €/t = 
2 000 €, pour 1 095 € de coût de production 
Bénéfice de 905 € 
Économies réalisées par l’autoconsommation Litière mixte paille + plaquettes 9 660 € de coût théorique de litière 100 % paille - 6 678 € de coût de litière mixte (dont  
709 € de coût de production de plaquettes autoconsomées) 
Économie de 
2 982 € 
Chauffage de la maison grâce au bois bûche  6 925 € de coût théorique de chauffage électrique – 1 642 € de coût de production  
de bûches autoconsommées 
Économie de 
5 283 € 
Chauffage des maisons et de la laiterie grâce au bois plaquette 4 536 € de coût théorique de chauffage électrique – 3 190 € de coût de production de plaquettes autoconsommées Économie 
de 1 346 € 
Gain total de l’atelier haie 10 516 € 
Sources : Syndicat des eaux du Bas-Léon, Afac-Agroforesterie 

Trente jours par an consacrés à l’entretien des haies

 

 
haie en bordure de chemin
La gestion de la haie est raisonnée à la parcelle. Les éleveurs l'entretiennent à la tronçonneuse et non au lamier pour une meilleure repousse. © Y. Gouez

La gestion de la haie est raisonnée « à la parcelle. Nous coupons à la tronçonneuse et non en lamier. C’est chronophage mais la repousse est meilleure. Nous y passons chacun une dizaine de journées par an l’hiver. L’ETA assure le broyage au printemps et nous le transport. Nous stockons les copeaux dans des anciens silos », rapporte Laurent Aliby. Les éleveurs étant en agriculture de conservation, les sols ne sont jamais nus. Ils s’arrangent donc pour faire venir l’entreprise, par exemple entre la fauche du méteil et avant l’épandage de fumier précédent le semis de maïs. « Nous nous organisons en fonction du travail à faire avec les bêtes et de la météo. Mais la haie est un atelier à part entière, nous y consacrons du temps. »

Laurent Abily : « La haie est une réponse au changement climatique, pour protéger les cultures et les animaux. En 2022, nous avons implanté une haie intraparcellaire d’une vingtaine d’espèces pour mycorhizer la parcelle. La même année, lors de la canicule, j’ai utilisé des feuilles de haie en complément de l’herbe pour les animaux. Certaines essences ont des vertus vermifuges »

 

 
Laurent Abily
Laurent Abily apprécie les vertus de certaines essences de haies, notamment vermifuges. © Syndicat des eaux du Bas-Léon
Pour aller plus loin, retrouvez la vidéo : Paroles d'agriculteurs, le bocage et les prairies

Chiffres clés

50 km de haie gérés durablement produisent 2 000 t de bois plaquette par an

2 000 t de bois plaquette représentent 760 000 l de fioul

4 m3 (environ 4 tonnes) de bois plaquette équivaut à 1 t de paille

Source : syndicat des eaux du Bas-Léon

Le saviez-vous

L’Association française arbres champêtres et agroforesteries (Afac-Agroforesteries) est une association nationale qui agit pour promouvoir, accompagner et mettre en œuvre des politiques globales de développement de l’arbre et de la haie dans les territoires, afin de répondre aux enjeux de transition agroécologique, de lutte contre l’effondrement de la biodiversité, et de résilience face à la crise climatique. Elle s’appuie sur un réseau composé de six associations régionales et de plus de 400 organismes adhérents. L’Afac-Agroforesteries a été créée en 2007, elle est association reconnue d’utilité publique (ARUP) depuis le 4 octobre 2023.

 

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