Une série d'avortements due à la salmonellose dans un troupeau de 130 vaches
La salmonelle, plus connue pour provoquer de graves entérites chez les adultes ou des septicémies chez les veaux, peut aussi entraîner des avortements.
La salmonelle, plus connue pour provoquer de graves entérites chez les adultes ou des septicémies chez les veaux, peut aussi entraîner des avortements.
Un éleveur, qui a un troupeau de 130 vaches laitières, contacte la clinique pour « des avortements, six depuis trois semaines, le plus souvent une vache que je venais de tarir ou à un mois avant terme ». Lors de la visite, nous remarquons d’abord que la densité dans le parc des taries est importante, un pic de vêlages est attendu dans quelques semaines. Puis l’éleveur nous fait examiner une vache qui avait avorté la nuit précédente, ce qui permet de faire un prélèvement de placenta, toutes les autres avortées ayant fini par délivrer. Nous faisons également une prise de sang sur toutes les vaches ayant avorté.
Pourquoi ces prélèvements ? Il y a plusieurs raisons.Tout d’abord, la déclaration des avortements est obligatoire et prise en charge dans le cadre de la surveillance de la brucellose. Chaque vache sera donc testée en sérologie pour la brucellose.
Ensuite, ici il y a eu de façon rapprochée six avortements dans un troupeau ayant environ 130 vêlages par an. On considère comme anormal un taux d’avortement supérieur à 4 % par an dans un troupeau de plus de 100 vaches. Dans un troupeau de moins de 100 vaches, plus de trois avortements par an. Dans tous les cas, deux avortements en moins d’un mois. Dans cet élevage, il y a eu six avortements en trois semaines, cela doit nous pousser à en chercher la cause.
On estime que l’on arrive à déterminer la cause d’un avortement dans moins de 50 % des cas. Ici, une série d’avortements limitée à un lot dans le même parc nous fait penser soit à une cause infectieuse, soit à des bagarres répétées entre les vaches, car le nombre d’animaux est important par rapport à la superficie du parc.
Mise en évidence de l'agent pathogène
Le placenta est analysé avec une PCR permettant de détecter l'ADN/ARN de huit agents abortifs parmi les plus fréquents. Pour obtenir les résultats les plus fiables possible, il faut l’effectuer sur du placenta « frais », c’est-à-dire d’une vache ayant avorté le plus récemment possible et prélevé in utero.
Le sang des six vaches est analysé en sérologie pour détecter les anticorps de la brucellose, de la BVD, de la fièvre Q, de la chlamydiose et de la néosporose. La sérologie permet de savoir si la vache a déjà été en contact avec l’agent pathogène mais ne permet pas de savoir s’il était présent au moment de l’avortement.
Après interprétation des résultats d’analyse, nous avons une très forte suspicion que cette série d'avortements est due à une salmonelle. Certains bovins porteurs peuvent excréter cette bactérie dans les bouses, ce qui peut contaminer les congénères via des aliments souillés. Les facteurs de risque de salmonellose sont la qualité de l’eau d’abreuvement, la présence d’oiseaux dans les bâtiments et la densité animale. Ici, la cause de la contamination n’est pas déterminée. Mais même si le parc des vaches taries était maintenu propre, la densité d’animaux a certainement favorisé la contamination ainsi que la présence d’oiseaux.
Nous avons conseillé à l’éleveur de renforcer l’hygiène : retrait rapide des délivrances du box de vêlage, surveillance accrue des vaches en peri-partum, isolement si possible des avortées. La salmonelle mise en évidence ne fait pas partie des salmonelles contre lesquelles il existe une vaccination.
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À retenir
Deux enseignements de ce cas
1 - Si le seuil d’alerte est dépassé dans un troupeau, il faut chercher la cause de l’avortement pour la santé des animaux, pour limiter le coût des avortements (au moins 150 €) et pour éviter toute transmission à l’homme. Beaucoup de pathogènes abortifs sont zoonotiques : brucellose, fièvre Q, salmonellose, chlamydiose, leptospirose, etc.
2 - La nature des prélèvements lors d’un avortement (sang de la vache, placenta frais, encéphale de l’avorton, contenu stomacal de l’avorton, etc.) dépend des suspicions diagnostiques. On ne réalise pas les mêmes examens de laboratoires selon les causes d’avortement que l’on recherche.