Un sol riche et un vrai plan de fumure pour optimiser la fertilisation
Au Gaec de la Fatonnière, les leviers agronomiques, le chaulage et l’utilisation d’un plan prévisionnel de fumure pour l’azote, le phosphore et le potassium, aident à serrer le poste engrais minéraux.
Au Gaec de la Fatonnière, à Charchigné, en Mayenne, les 78 vaches laitières et leur suite fournissent près de 11 000 kg d’azote. Plus de la moitié est directement amenée par les animaux au pâturage. 5 100 kg sont dans le fumier très pailleux (5,5 kg N/t) et le lisier liquide (0,5 kg N/m3).
Au total, l’ensemble des déjections animales permettent de couvrir 50 % des besoins en azote des prairies et des cultures. Le fumier et le lisier épandus représentent quant à eux 25 % des besoins. Pour autant, le Gaec ne consomme que 24 tonnes d’ammonitrate 33,5 pour 106 hectares de SAU.
Fiche élevage
Gaec de la Fatonnière
78 vaches laitières à 10 500 kg de lait, et leur suite
106 ha de SAU, dont 34 ha de prairies, 4 ha de luzerne, 35 ha de maïs fourrage et grain, 33 ha de céréales
Zéro sol nu. Du méteil (seigle forestier, trèfle incarnat et vesce) entre une céréale et un maïs. Une dérobée (ray-grass d’Italie, trèfle incarnat et vesce) entre une céréale et un maïs. Des intercultures à enfouir d’avoine, phacélie, radis et féverole de printemps.
103 kg N org/ha SAU et 166 kg N total/ha SAU
130 mEq/kg de CEC du sol et pH à 6,6 en moyenne
C’est que Dan Busson et son père veillent depuis longtemps à préserver la structure et donc la fertilité de leurs sols, qui est majoritairement limoneux demi-profond notamment sur le site des vaches, et argilo-limoneux sur un îlot de cultures à 15 km. « Ce dernier est particulièrement fragile, j’évite de labourer, privilégiant un travail superficiel et sans herse rotative qui fait une surface de sol trop fine, très sensible à la battance », illustre Dan Busson.
Couverts, chaulage, attention portée au tassement
La matière organique est bonne – humus de 44 g/kg de sol – grâce à tous les sols couverts (méteil, dérobée et interculture) et à des restitutions de 5 à 7 hectares d’interculture dans les îlots où le Gaec ne va pas épandre les effluents. « Nous n’amenons pas de lisier sur le site de cultures à 15 km. Ce serait un non-sens économique. Donc, nous y enfouissons les couverts pour améliorer la matière organique. »
Autre retour au sol : les pailles de maïs grain, avec un apport d’azote minéral pour éviter la faim d’azote. Enfin, la moitié des prairies entrent en rotation avec le maïs. Les prairies temporaires sont composées entre 10 et 40 % de trèfles et 4 hectares comptent une majorité de trèfle violet. 4 hectares sont en luzerne.
Le lisier est épandu au plus près de la ferme, après les fauches des dérobées et des prairies. Le fumier l’est avant semis de l’interculture ou du maïs, même celui à 15 km. « Nous n’avons pas voulu entrer dans un projet de méthanisation, car pour notre exploitation, le digestat ne convient pas. C’est un produit trop minéralisé. Nous avons besoin de conserver nos effluents, sources d’azote organique qui nourrit le sol sur du long terme. »
Le Gaec procède à un chaulage avec des scories. Moins coûteuses, les scories apportent aussi d’autres minéraux que l’oxyde de calcium comme le potassium et le bore, qui est en déficit dans certaines parcelles. « Nous l’avons testé une année sur du maïs, qui en a bien profité. Nous en refaisons donc, avec pour objectif que chaque parcelle en reçoive tous les quatre ans avant un maïs », détaille l’éleveur.
« Sans tout ce travail, il faudrait apporter davantage d’engrais minéraux complets », estime Dan Busson.
Le PPF complet : un outil de pilotage de la fertilisation
Pour être précis dans ses apports et les valoriser au mieux, le Gaec est accompagné par un technicien de Terrena, avec qui il réalise un plan prévisionnel de fumure (PPF) complet (Fertilio sol), et qui le conseille dans sa fertilisation agronomique (N, P, K, Mg, CaO, soufre, oligo-éléments), en s’appuyant sur les cartes satellite de biomasse et de rendement.
Pour chaque parcelle, face aux besoins des cultures, la fourniture du sol est évaluée – minéralisation du sol et des résidus du précédent, et effet du couvert végétal –, notamment à partir des analyses du potentiel de minéralisation du sol (PMS). Il reste alors des besoins à couvrir avec les effluents d’élevage, et les engrais minéraux pour compléter les manques.
En résumé, le fumier est épandu plus d’un mois avant le semis de maïs (30 t/ha) pour avoir le temps de minéraliser. Et avant un méteil ou une dérobée (10 t/ha).
Couvrir les besoins en P et K après une prairie
Le lisier (20 à 30 m3 par hectare) est positionné derrière un ensilage de méteil ou de dérobée et avant un maïs en complément du fumier. « J’épands aussi un lisier dans l’idéal après chaque fauche dans les prairies (29 m3), sauf s’il y a du pâturage derrière. Et j’en amène si le démarrage de l’herbe est vraiment trop long au printemps (20 m3/ha). »
Il n’y a jamais d’effluent entre une prairie et un semis de maïs, et le Gaec assure la couverture en phosphore, potassium et soufre. « Par exemple, pour un maïs fourrage derrière une prairie temporaire qui a produit 8 t MS/ha et sur laquelle il y a eu un engrais de phosphore, potassium et soufre, nous apportons 400 kg/ha de potasse en avril et 5 l/ha de phosphore, potassium et magnésium (PKMg) en juin. Il n’y a pas besoin d’amener un fumier après une prairie qui contient des légumineuses. »
La cartographie pour ajuster en cours d’année
Pour les besoins des cultures, avec son conseiller, Dan Busson prend des références moyennes : « Je préfère ne pas être trop optimiste sur les rendements. » Les besoins sont suivis en cours de campagne, avec une cartographie de la biomasse des cultures effectuée quatre fois dans l’année (avec Fertilio SAT qui utilise Farmstar, d’Airbus). « Couplées à la météo, ces données permettent d’ajuster le conseil. Ainsi, en février, l’image satellite montrait un super développement du blé et le risque d’un manque d’azote était faible. J’y suis donc allé, mais avec une plus faible dose que les autres années. Au deuxième passage, j’ai rattrapé avec une plus forte dose. Je peux intervenir rapidement car j’ai mon propre épandeur. »
L’autre intérêt des cartes satellite est de confirmer une impression visuelle. « Quand j’ai fait un essai avec de l’azote soufré sur céréales et prairies, je trouvais que la vigueur des plantes était meilleure. Les cartes ont matérialisé cette impression : les cultures et prairies étaient plus homogènes, avec une bonne biomasse. »
S’adapter au prix des engrais
Quand l’azote était très cher, le Gaec n’a pas acheté d’engrais complet. « J’ai apporté du phosphore et du potassium au semis de maïs, puis une solution azotée en injection au sol au stade 8 feuilles. Ces 70 unités d’azote ont été apportées quand le maïs en avait vraiment besoin et ont été bien valorisées (16 à 18 t MS/ha soit +2 t par rapport à la moyenne historique). » D’habitude, les éleveurs apportent un engrais complet NPK (12 6 22) et 70 à 90 kg de starter 18-46 selon les parcelles, sauf après une prairie.