Aller au contenu principal

PRÉSIDENTIELLE 2007 L’Agriculture vue par J.-M. Le Pen

Cette semaine, le président du Front National répond à nos questions

La Dépêche - Si vous étiez élu à la Présidence de la République française, quelle est la première mesure que vous adopteriez concernant l’agriculture ?

Jean-Marie Le Pen :Dès juin 2007, j'organiserais une Conférence nationale des finances agricoles, sur le modèle de la Conférence nationale des finances publiques instituée par le décret du 5 mai 2006. Elle devra évaluer de façon paritaire, avec des représentants du monde agricole, des consommateurs, du monde écologique et les pouvoirs publics, trois choses : le montant du service écologique rendu, le montant de la confiscation nationale des gains de productivité des agriculteurs, le montant de la rupture d’égalité des agriculteurs devant les charges publiques. J'inscrirais la grande politique agricole que j'entends mener selon un calendrier comportant notamment : une grande loi de programmation agricole selon l’article 34 de la Constitution, une partie budgétaire de la loi de finances pour 2008 , et un sommet européen lors de la présidence française de l’Union européenne, du 1 er juillet 2008 au 31 décembre 2008. Les principales mesures que je mettrais en oeuvre dans le cadre de cette politique seront : la création d'une Caisse de Compensation de la Dette Paysanne ; l’exonération en cinq ans des entreprises agricoles de toutes charges fiscales et sociales pour restituer aux agriculteurs leur plus-value de compétitivité qui leur a été confisquée au profit du secteur de la distribution et des services ; la création d’un Fond d’intervention pour la Campagne, sur le modèle du Fonds d’intervention pour la ville, avec le même budget ; la création d’un Établissement Public, sur le modèle du Conservatoire du littoral et appelé Conservatoire du Patrimoine Viticole; concernant la sécurité alimentaire, les importations seront soumises aux mêmes contraintes phytosanitaires que celles imposées à nos paysans ; la parité des retraites agricoles avec les retraites des actifs du secondaire et du tertiaire ; l’installation des jeunes encouragée.

La Dépêche - Quel regard portez-vous sur la Politique agricole commune, et comment envisagez-vous l'après 2013 ?

Jean-Marie Le Pen :La politique agricole commune européenne a, dans les années 60 et 70, contraint nos paysans à pratiquer une agriculture intensive, les obligeant pour cela, sous peine de disparaître, à s'endetter pour acheter des matériels et des engrais chimiques. Des centaines de milliers d'exploitations ont alors disparu. Depuis la fin des années 80, l'Europe de Bruxelles s'attaque désormais aux agriculteurs qui s'étaient adaptés aux contraintes de cette agriculture. La PAC, dont la part dans le budget européen ne cesse de diminuer au profit de la politique régionale, les subventionne désormais de plus en plus pour mettre en jachère leurs terres, couper leurs pieds de vigne, réduire la taille de leurs troupeaux... Après 2013, la PAC aura disparu et avec elle les derniers avantages qu'en retirait encore notre agriculture. Le financement de l’agriculture européenne n’est programmé que jusqu’en 2013. Après, à 27, il faudra négocier une nouvelle programmation financière dans un Conseil des ministres et un Parlement européen où " les amis des paysans " sont minoritaires.

En 2014, les quotas laitiers, qui assurent à de nombreuses exploitations, notamment de montagne, le maintien d’un revenu minimum, auront disparu. C'est la raison pour laquelle, quand la France présidera l'Union européenne dans le second semestre de l'année 2008, je proposerai à nos partenaires, d'une part, l'application de la préférence communautaire, de l'autre l'adoption d'une nouvelle technologie douanière sous forme de droits de douane déductibles.

La Dépêche - Considérez-vous que les aides publiques sont équitablement réparties ? Pourquoi ?

Jean-Marie Le Pen :Les partis se partageant le pouvoir depuis plus de 30 ans, mènent, via notamment Bruxelles, des politiques de baisses massives des protections douanières du territoire français et européen. Ce choix politique a entraîné pour nos agriculteurs une concurrence déloyale. En effet, pendant que le monde agricole français et européen est soumis aux coûts de la protection environnementale, du bien-être normal des animaux, des salaires européens et de la protection sociale européenne, les produits arrivant du Pacifique sud ou du Brésil n’ont pas ces coûts. Dès lors, les paysans subissent une rupture d’égalité devant les charges publiques qui n’est pas de leur fait. Les choix politiques nationaux et européens occasionnent un dommage certain à la catégorie sociale des agriculteurs. Ce dommage doit être indemnisé par la collectivité nationale dans le cadre du contrat social entre la nation et ses paysans.

La Dépêche - Comment envisagez-vous l'avenir de l'export français, notamment concernant les filières des grandes cultures ?

Jean-Marie Le Pen : Notre agriculture, si elle survit à la politique malthusianiste de l'Europe de Bruxelles, peut devenir d'ici quinze ans, un des principaux secteurs d'exportation de l'économie française. On assiste déjà depuis 2000 à la baisse des stocks mondiaux de céréales, car la population de la planète manque de plus en plus de céréales. Cette demande en céréales mais aussi en produits laitiers, en légumes et en viandes va exploser en 2020, quand des centaines de millions d'Indiens et de Chinois, du fait du développement économique de leur pays, accèderont à notre niveau de consommation alimentaire. Un immense marché s'ouvrira à notre agriculture. Toute la politique agricole que je veux mettre en oeuvre est bâtie sur cet horizon : celui du " matin des paysans".

La Dépêche - Certains semenciers annoncent 30.000 ha de maïs OGM en France cette année alors que la législation européenne n'est pas transposée en droit français et que l'actuel gouvernement a abandonné le projet de loi sur les biotechnologies. Comment comptez vous gérer cet épineux dossier ?

Jean-Marie Le Pen :La méfiance à l'égard des OGM est générale, mais les consommateurs " prisonniers de leur porte- monnaie " choisiront des produits " OGM " s'ils sont moins chers que les produits " naturels ". Il est donc nécessaire de redéfinir les prix de ceux-ci. Il faut aussi être cohérent. Si la production OGM doit être interdite en France, il est indispensable d'interdire les importations des produits " OGM ", donc de rétablir des frontières. De même, les actions fortement médiatisées " des faucheurs de champ OGM ", non seulement violent le droit de propriété, mais peuvent nuire aux intérêts de la France. En s'attaquant à la recherche française, qui pourrait aboutir à la fabrication de produits ne représentant aucun danger pour l'environnement, " les faucheurs " favorisent le monopole dans ce secteur des multinationales américaines. Il est nécessaire de poursuivre les recherches en France, mais dans des espaces confinés.

D'autre part, tout OGM ne doit pouvoir être cultivé et commercialisé que si sa reproduction dans la nature est rendue impossible. La chaîne de traçabilité de tels produits doit être totalement respectée afin de garantir l'information du consommateur.

La Dépêche - Quel est votre regard sur la filière des biocarburants agricoles français ? Les encouragerez-vous et si oui, comment ?

Jean-Marie Le Pen : Les biocarburants peuvent contribuer à diminuer la consommation des carburants pétroliers.

Pour cela, un préalable est nécessaire : en finir avec l'absurdité consistant à frapper d'une lourde amende un agriculteur ayant utilisé du biocaburant dans son tracteur. Cependant ils ne peuvent pas consituer à eux seuls une alternative aux carburants issus du pétrole. La totalité de la surface arable ou forestière de la France couvrirait seulement 20 % des besoins nécessaires à la consommation des voitures immatriculées dans notre pays. Profitons des possibilités offertes par cette source d'énergie, mais pas au prix de notre production alimentaire et de notre patrimoine forestier.

Les plus lus

Dirigeants des BRICS+ réunis à Kazan, en Russie
BRICS+ : pourquoi une nouvelle bourse de céréales est proposée par la Russie à ses partenaires ?

Les pays des BRICS+ (regroupant le Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine, l'Afrique du Sud, l'Iran, l'Égypte, l'Éthiopie et les…

Un palmier à huile
Prix des huiles végétales : quelle tendance pour les prochains mois ?

Les prix des huiles de palme, de soja, de tournesol et de colza ont nettement renchéri ces dernières semaines, dans un…

Déchargement d'un bâteau d'engrais TSP (Triple super phosphate) en provenance de Sfax (Tunisie)
En quoi consiste le partenariat sur les fertilisants signé entre le Maroc et la France ?

L’interprofession Intercéréales a signé un partenariat relatif aux fertilisants avec l’Office chérifien des phosphates. Si les…

<em class="placeholder">champ de blé au Minas Gerais, au Brésil</em>
Le blé sud-américain relève le défi du changement climatique

La disponibilité en eau, le renouvellement variétal et le non-labour sont les atouts dont disposent le Brésil et l’Argentine,…

Un champ de maïs
Récolte du maïs et du tournesol 2024 : nette révision mensuelle à la baisse des rendements dans l'UE, selon la Commission européenne

Les cultures d'été ont souffert cette année 2024 de l'excès d'eau à l'Ouest de l'UE, et du déficit hydrique et de…

Portrait de Gonzalo Rodera, conseiller au sein de la Coopérative agricole de Tres Arroyos, assis à son bureau
Commerce blé 2024-2025 : l’Argentine est en mesure de concurrencer la France sur le Maghreb

Un régime pluviométrique porteur dans les Pampas nourrit les espoirs des exportateurs qui préparent le retour en force du blé…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 90€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site La dépêche – le petit meunier
Bénéficiez de la base de cotations en ligne
Consultez votre revue numérique la dépêche – le petit meunier
Recevez les évolutions des marchés de la journée dans la COTidienne