Nutrition animale
La filière Volailles françaises craint un Brexit dur
Si les négociations avec le Royaume-Uni restaient au point mort avec un Brexit dur, l’UE à 27 devrait absorber un million de tonnes de volailles de plus, soit plus de la moitié de la production française…
Si les négociations avec le Royaume-Uni restaient au point mort avec un Brexit dur, l’UE à 27 devrait absorber un million de tonnes de volailles de plus, soit plus de la moitié de la production française…
La volaille française consomme plus de 8,3 Mt d’aliments pour animaux chaque année, soit 43 % des fabrications nationales. L’hypothèse d’un Brexit dur intéresse donc au plus haut point les fabricants d’aliments. Alors que les importations sont toujours majeures (43 % des poulets consommés en France), la fermeture des frontières du Royaume-Uni aurait deux conséquences pour notre aviculture : réduction des exportations UE mais aussi, et surtout, absorption des contingents d’importation négociés par l’UE avec les pays tiers…
Quid des contingents à l’import du Royaume-Uni ?
Le Royaume-Uni est en effet un gros producteur (1,9 Mtéc*/an) mais aussi un très gros consommateur de viande de volaille (38 kg/an/hb contre 28 kg/an/hb en France). Pour couvrir ses besoins, il importe entre 800 000 t et 900 000 t de volaille par an. Dans l’UE, ses principaux fournisseurs sont les Pays-Bas, la Pologne, l’Irlande, l’Allemagne et la Belgique (83 % des exportations européennes, soit environ 500 000 t/an). Les Britanniques importent aussi 239 000 t sous contingents de l’UE. Maillon actuellement faible de la compétitivité intra-européenne, la filière française craint donc de devenir une nouvelle destination pour plusieurs centaines de milliers de tonnes de poulets refoulées à l’entrée du Royaume-Uni. D’où les demandes de l’interprofession Anvol, par la voix de son président Jean-Michel Schaeffer, lors de son assemblée générale du 11 avril dernier : « nous devons plus que jamais mettre en œuvre un étiquetage européen sur l’origine des viandes », réclame-t-il.
Pour protéger le marché français, Anvol demande l’arrêt des négociations avec le Mercosur, le contrôle sanitaire de 100 % des viandes en provenance du Brésil et l’arrêt du développement des importations en provenance d’Ukraine.
Haro sur l’Ukraine
En croissance exponentielle (0 t en 2015, 58 000 t en 2018), ces dernières profitent d’une lacune non intentionnelle dans l’accord de libre-échange UE-Ukraine, une ligne tarifaire « autre découpe de poulet » que Jean-Michel Schaeffer n’hésite pas à qualifier d’erreur. Le leader ukrainien, MHP, exporte ainsi sans droits de douane ni quota des coffres avec bout d’ailes qui subissent dans l’UE une seconde découpe pour lever des filets de poulet et acquérir l’estampille UE. Or, « le prix du filet de poulet ukrainien est inférieur de 40 % à celui de l’UE », chiffre Anvol. L’interprofession dénonce dans le même temps le soutien que la BERD (Banque européenne pour la reconstruction et le développement) apporte à MHP pour qu’elle s’installe dans l’UE et, donc, développe cette pratique.
Pour soutenir la filière française, dont l’objectif est de reconquérir au moins 1 % de parts de marché par an durant les dix prochaines années, les acteurs hexagonaux demandent enfin que l’étiquetage de l’origine des viandes soit obligatoire jusqu’aux lieux de consommation : si l’origine France est ainsi bien implantée dans les rayons de la grande distribution, la restauration (collective comme commerciale) ainsi que les IAA n’ont pas sauté le pas et forment les gros bataillons des importations. Mais, le décret n’est toujours pas paru.
* Mtéc : million de tonnes équivalent carcasse.