Marchés
Faire porter le coût des stocks de réserve aux banques
Jugeant que le rôle des stocks de réserve pour assurer la sécurité mondiale a été abordé de façon trop partielle lors des travaux du G20, Bernard Valluis, président délégué de l’ANMF, est revenu sur le sujet lors d’une conférence organisée par Farm, le 30 avril. « Les dérégulations des marchés et des politiques publiques ont tendu à éliminer les stocks de réserve. Or c’est l’outil le plus évident pour compléter l’offre et assurer une certaine régularité des approvisionnements. »
Pour rappel, les stocks de réserve, qui sont permanents et correspondent à trois-quatre mois de consommation d’une zone donnée, sont à distinguer d’autres types de stocks, tels que les stocks d’intervention directement liés aux politiques agricoles, et dont les stockage et déstockage sont respectivement basés sur des prix minimum et maximum. Ou bien encore des stocks d’urgence qui relèvent des politiques d’aide alimentaire et correspondent généralement à quelques semaines de consommation pour une population ciblée. Par ailleurs, la définition d’espaces économiques pertinents est nécessaire pour la mise en place et la gestion de ces stocks. Le pays ou l’ensemble de pays concerné doit pouvoir « assurer aux frontières une protection à l’importation et un contrôle éventuel des exportations ».
Assurer la sécurité alimentaire
« Dans le contexte de la financiarisation de l’économie et de l’endettement des États, toutes les politiques publiques qui recourent à l’instrument des stocks sont confrontées à la question de leur financement. » À titre d’exemple, trois mois de consommation de blé tendre pour l’Union européenne représenteraient 30 Mt, soit une immobilisation de 6 Md€ à 200 €/t, auxquels il faut ajouter les coûts de stockage. Par ailleurs, « les régions ou les pays, importateurs nets de matières premières alimentaires, sont les mieux désignés pour initier un processus de mise ne place de stocks de sécurité. » Or dans nombre de ces pays, « la question de la sécurité alimentaire est indissociable d’une situation de faibles niveaux de revenu par tête et de finances publiques fragiles ». Donc si le coût des stocks de réserve ne peut ni être supporté par l’État, ni par les contribuables ou consommateurs, Bernard Valluis propose un portage financier des stocks par des institutions financières et une gestion logistique par le secteur privé. Les autorités publiques céderaient la propriété des réserves directement à des banques, au titre d’une convention financière de portage de long terme.
Ce mécanisme servirait à la constitution de stocks de réserve ayant pour but d’assurer la sécurité alimentaire à un niveau régional, voire mondial. Mais les politiques publiques ne devraient pas leur assigner d’autres objectifs, comme la régulation des matières premières agricoles. Les politiques de sécurité alimentaire devraient être supérieures aux autres politiques (agricoles, publiques…).