Argentine : les premières récoltes de blés OGM sont en vente libre
La longue procédure réglementaire est bouclée pour les blés OGM dits HB4 conçus en Argentine par Bioceres et Florimond Desprez afin de tolérer le stress hydrique. Pour la première fois, les céréaliers l’ayant cultivé sont propriétaires des récoltes et pourront les vendre à tout exportateur reconnu.
La longue procédure réglementaire est bouclée pour les blés OGM dits HB4 conçus en Argentine par Bioceres et Florimond Desprez afin de tolérer le stress hydrique. Pour la première fois, les céréaliers l’ayant cultivé sont propriétaires des récoltes et pourront les vendre à tout exportateur reconnu.
« Pour la première fois, cette année, les céréaliers qui ont cultivé nos variétés de blé OGM porteurs de la technologie HB4 sont les propriétaires des récoltes et pourront les vendre aux exportateurs de grains reconnus du circuit », a confié à La Dépêche Le petit meunier Martín Mariani Ventura, directeur Semences du laboratoire de biotech argentin Bioceres, lors du congrès de l’Association argentine des producteurs en semis direct (Aapresid), le 8 août 2024 à Buenos Aires (Argentine).
Un blé OGM approuvé par les autorités européennes
Bioceres, co-détenteur avec Florimond Desprez, depuis leur accord noué en 2012, de la technologie HB4 incorporée aux variétés de blé du semencier français, qui leur conférerait une tolérance notable à la sécheresse, aurait ainsi bouclé la longue procédure réglementaire semée d’embûches aux niveaux juridique et sociétal. Leur stratégie de la prudente tortue aurait donc payé, puisque le produit aurait franchi, avec ce dernier pas, la ligne d’arrivée : son acceptation mondiale – hormis des exceptions… – dont l’approbation des autorités européennes.
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Une dizaine de pays (Australie, Brésil, Indonésie, Paraguay…) ont déjà donné leur aval à l’importation des grains issus de ces variétés. Certains, comme le Brésil, le cultivent déjà sur leur territoire et par seulement à titre expérimental, comme le fait l’agence nationale de recherche agronomique brésilienne (Embrapa) dans le but de trouver des variétés adaptées aux régions tropicales du Nordeste et du Cerrado.
Une aventure de longue haleine
Martín Mariani Ventura revient sur le chemin parcouru : « Dès 2019, nous avons testé ces blés en plein champ sur 400 hectares en Argentine. En 2023, elles ont été cultivées, sous contrat, par une centaine de céréaliers (dont la majorité sont actionnaires de Bioceres, NDLR) sur 54 000 hectares, toujours en Argentine. Mais nous (Bioceres) étions encore, jusqu’à l’an dernier, l’unique propriétaire des récoltes. Les céréaliers liés à nous par contrat ne faisaient que prêter leurs champs et leur savoir-faire. Les grands exportateurs de grains basés en Argentine avaient fait la demande explicite de ce système en circuit fermé, par crainte d’éventuelles retombées commerciales négatives à l’export liées au risque de mélange accidentel, c’est-à-dire de présence de blé OGM dans des lots de blé conventionnel destiné à des pays interdisant le premier ». Un risque pouvant sérieusement écorner l’image mondiale de l’origine blé argentine.
Témoignage de Santiago Guazelli, céréalier et dirigeant d’Aapresid
Ces blés OGM ont vu le jour en région pampéenne avec entrain et succès en temps record : douze ans. Pourquoi ? Le témoignage du céréalier et dirigeant d’Aapresid, Santiago Guazelli, est révélateur : « Le phénomène climatologique La Niña-El Niño est le principal facteur d’incidence sur les rendements qui échappe à notre contrôle, nous qui avons adopté le système en non labour sur 90% des surfaces pour conserver l’humidité et la matière organique des sols », a-t-il rappelé lors du dernier congrès d’Aapresid. Bioceres est né de cette ONG promotrice des biotechnologies dans le contexte de saisons climatiques toujours plus extrêmes.
Des exportateurs argentins prudents
L’an dernier encore, les grands exportateurs de grains argentins qualifiaient d’imprudente, de façon unanime via leur chambre professionnelle, l’audace de Bioceres de ne pas attendre l’aval de toutes les autorités des pays importateurs de blé. Mais combien d’années Bioceres aurait-elle dû attendre ?... De l’audace, encore et toujours de l’audace mais prudemment, pas à pas, voilà la stratégie commerciale de Bioceres et de Florimond Desprez qui, cette année, en ont fait un décisif.
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« Il n’y a plus de marche arrière possible », résume Martín Ventura. Les pays, ONG et citoyens anti-OGM en blé vont-ils se retrouvés isolés sur la scène mondiale suite à cette annonce ? « Florimond-Desprez est Français », répond en souriant le directeur de Bioceres.
Dès décembre prochain, le blé OGM dit HB4, lâché dans la Pampa, devrait être consommé dans potentiellement une dizaine de pays asiatiques et sud-américains.