« Plus de vols de tracteurs au préjudice des exploitations que des concessions »
Le colonel Patrice Bayard, responsable de l’OCLDI (Office central de lutte contre la délinquance itinérante) et ses équipes travaillent depuis 2012-2013 sur les vols de tracteurs, quand les différents plans nationaux ont amené à avoir un regard national sur ces actes. Le point sur ce qu’il faut savoir.

Peut-on définir le profil des voleurs de tracteurs?
Patrice Bayard - Pour une très grande majorité, ces vols sont commis par des groupes criminels très organisés, qui travaillent avec des objectifs bien précis, pour un marché très ouvert à l’Est. Actuellement, deux grandes filières fonctionnent. La plus active est originaire de Roumanie. L’autre filière, très présente également, provient principalement de Lituanie. Le crime organisé répond à l’offre et à la demande. À l’Est, un tracteur se revend en moyenne entre 100 000 à 120 000 euros.
Qui est ciblé ?
P. B. - Nous enregistrons un plus grand nombre de vols de tracteurs au préjudice des exploitations que des concessions, où les vols frappent pourtant souvent plus l’imagination. Mais dans les exploitations, s’il y a moins à prendre, c’est également plus facile. Les concessions ont beaucoup donné… Et ont commencé à se protéger.
Que recherchent les voleurs comme modèles ?
P. B. - Tout dépend de leur organisation. Pour transporter des tracteurs montés en voie large, il faut un porte-char, ce qui est plus visible sur la route. Les tracteurs plus étroits peuvent monter dans une remorque savoyarde, bâchée. Ils sont donc moins repérables et davantage ciblés. En ce qui concerne les marques, John Deere est le grand gagnant avec New Holland, puis viennent Renault et Massey-Fergusson.
Comment travaillez-vous pour démanteler ces réseaux ?
P. B. - Seuls 30 à 35 % des tracteurs volés sont retrouvés car ils sont maquillés par les organisations qui savent fabriquer de faux documents de transports pour passer les frontières avant la revente. Nous collaborons avec nos collègues étrangers, roumains et lituaniens, en particulier. J’ai dans mon équipe plusieurs enquêteurs qui parlent le roumain et le moldave. Nous travaillons également avec les tractoristes et les concessionnaires, que nous avons rencontrés fin novembre. Nous faisons également de l’information auprès de nos collèges qui contrôlent les routes pour, par exemple, leur apprendre à repérer les numéros de pièces susceptibles d’identifier sans aucun doute un tracteur maquillé.
Des opérations qui se raisonnent à l'international
L’OCLDI a démantelé fin 2013 un réseau qui sévissait dans le sud de la France. Originaire de Roumanie, implanté en Espagne, il passait par l’Italie, l’Autriche et la Hongrie. Quarante-deux tracteurs volés ont été retrouvés. La pression a baissé dans la zone. C’est aujourd’hui dans l’Ouest, le Centre et l’Est de la France que la fréquence des vols apparaît la plus forte.