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EN CHIFFRES
Les adjuvants soumis à une évaluation en bonne et due forme

Les adjuvants suivent tout un processus d’évaluation avant d’être autorisés à la mise en marché. Comme les produits phytosanitaires mais avec des différences fondamentales.

Les adjuvants ne remplissent que quelques pages parmi le bon millier que compte L’Index phytosanitaire référençant tous les produits phytosanitaires commercialisés en France. Ils sont néanmoins largement utilisés, en particulier sur les grandes cultures. « Nous estimons à 20 millions d’hectares en déployé (surface x nombre de traitements) les surfaces ayant reçu un traitement associé à un adjuvant extemporané sur la campagne 2015-2016 », présentait Denis David, président de l’AFA(1) l’an passé. Les chiffres de cette année ne sont pas encore connus mais ne devraient guère être différents.

Les adjuvants ne sont pas des produits phyto comme les autres. D’ailleurs, peut-on les qualifier de spécialités phytosanitaires ? « Non car ils ne contiennent pas de substances actives, précise Antoine Andrieux, responsable homologation produits chez Action Pin. Mais comme les produits phytosanitaires, les adjuvants ont besoin d’une autorisation de mise en marché (AMM) délivrée par l’Anses(2) pour pouvoir être commercialisés sur notre territoire. »

Caractéristiques physico-chimiques, toxicologiques et écotoxicologiques, agronomiques, efficacités… : un dossier d’homologation d’un adjuvant comprend des études qui ressemblent à celles d’un produit phyto. Mais l’évaluation se fait pays par pays pour les adjuvants quand elle est réalisée au niveau européen pour une matière active. Le coût des dossiers n’a rien à voir : entre 100 000 et 500 000 euros pour un adjuvant à l’échelle d’un pays, plus de 200 millions d’euros pour un phyto au niveau européen dont la commercialisation vise un marché mondial le plus souvent.

De grandes différences entre pays sur les dossiers d’homologation

Les différences sont importantes dans l’étude des dossiers entre pays. « La France est l’un des pays les plus structurés en la matière. Elle demande un dossier très complet pour une AMM, en particulier sur les volets efficacités et toxico-écotoxicologiques. Si l’intérêt agronomique et la maîtrise des risques sont démontrés, il y a délivrance d’une autorisation, explique Antoine Andrieux. Mais les études demandées sont moins poussées que pour les produits phytosanitaires. »

Comme il n’y a pas d’harmonisation européenne sur l’homologation d’un adjuvant, un dossier d’homologation doit être déposé dans chaque pays, au contraire des phytos pour lesquels il y a un pays rapporteur pour une zone géographique de l’Europe. « Mais quand nous fournissons toutes les données demandées pour l’AMM en France, les études réalisées ne sont pas à renouveler pour d’autres pays où les exigences sont moindres, remarque Antoine Andrieux. D’ailleurs, certains pays européens ne demandent qu’une simple déclaration, sans forcément de données à générer et à faire évaluer par les autorités. »

Un adjuvant défini pour une catégorie de produit

Les exigences des États membres s’inscrivent dans des logiques nationales. « L’évaluation à la française se rapproche de celle effectuée sur les phytos, à savoir sur un produit formulé tandis que dans des pays anglo-saxons comme au Royaume-Uni, les autorités se focalisent sur chaque ingrédient des adjuvants, précise Mikaëline Billeret, responsable homologation des adjuvants chez de Sangosse. En France, une évaluation biologique est effectuée par catégorie de produit phyto à laquelle sera associé l’adjuvant : herbicide, fongicide, insecticide ou régulateur de croissance. En Belgique, cette évaluation est réalisée par usage : herbicide maïs, fongicide céréales… »

La firme qui dépose un dossier doit présenter les revendications qu’elle souhaite pour son adjuvant et apporter les éléments qui démontrent les fonctions et efficacités de son produit. Dans le volet efficacité, on doit trouver les résultats d’essais qui apportent les preuves d’un effet antimousse ou de pouvoir tampon du pH pour un adjuvant dans la cuve d’un pulvérisateur par exemple, ou encore d’un pouvoir antidérive dû à son influence sur la taille des gouttes de pulvérisation. La grande majorité des produits commercialisés sont voués à agir en contact avec la plante : effets de rétention et/ou d’étalement des gouttelettes, diminution de lessivage, amélioration de la pénétration des matières actives de la bouillie… Pour Antoine Andrieux, « l’AMM en France est un gage d’efficacité et de maîtrise des risques qui sont autant de qualités pour répondre aux exigences et aux demandes du marché français ».

(1) Association française des adjuvants.(2) Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail.

EN CHIFFRES

Un tiers d’huile, deux tiers de mouillants

Près du tiers des utilisations des adjuvants (en surface traitée) se rapportent aux huiles et le reste aux adjuvants mouillants.

62 % des usages se font avec les bouillies herbicides, 21 % avec les fongicides, 10 % avec les insecticides et 7 % avec les régulateurs.

De 6 à 10 ans sont nécessaires pour constituer et faire aboutir un dossier d’homologation d’un adjuvant en France : de 2 à 5 ans pour les travaux de recherche et développement et de formulation de l’adjuvant, 2 à 3 ans pour les essais d’évaluation, 1 an (délai légal) à 2 ans pour l’évaluation du dossier par l’Anses pour l’obtention de l’AMM.

Un peu plus de 100 adjuvants commerciaux pour bouillies phytosanitaires existent sur le marché français pour 40 compositions différentes.

Un intérêt écologique peu mis en avant

Aucun adjuvant ne figure sur la liste biocontrôle et pour cause : les critères de cette liste ne s’appliquent qu’à des substances actives contre des ennemis des cultures. « C’est dommage car l’utilisation des adjuvants peut aller dans le sens d’une réduction d’utilisation des phytos, juge Antoine Andrieux, Action Pin. Nous discutons à ce sujet avec la DGAL et les instituts techniques pour mieux rendre visible l’intérêt de nos produits. » On trouve bien dans la liste biocontrôle des huiles (de paraffine notamment) mais elles sont inscrites au titre de produits de lutte directe contre des organismes nuisibles tels des insectes et non comme adjuvants de bouillie phytosanitaire. Certains adjuvants répondent au cahier des charges de l’agriculture biologique en revanche. Enfin, une fiche CEPP (Certificat d'’économie des produits phytosanitaires) a été éditée pour promouvoir l’utilisation d’adjuvants présentés comme « un moyen de réduire la consommation de fongicides ciblant les maladies du feuillage du blé ».

Des produits de tous les jours comme ingrédients

Les ingrédients des adjuvants suivent le règlement de l’Union européenne Reach (Registration, Évaluation, Autorisation and restriction of Chemicals) qui s’applique à toutes les substances chimiques employées dans les processus industriels mais utilisées aussi dans notre vie de tous les jours. « La plupart des substances entrant dans les adjuvants ne sont pas utilisées que pour ces produits de l’agriculture, loin s’en faut. Certaines substances trouvent des usages ailleurs, parfois très importants », souligne Jean-Marc Saurel, responsable de l’activité adjuvants chez De Sangosse et président de l’AFA. Il en énumère quelques-unes. « La lécithine de soja qui entre dans la composition de certains adjuvants est très employée par l’industrie agro-alimentaire. Le latex que l’on trouve dans un produit (Sticman) est largement utilisé par l’industrie à d’autres fins (gants…). Les huiles végétales se retrouvent dans des domaines très variés. Des ingrédients des adjuvants entrent dans la composition de divers produits cosmétiques, shampooings, surfactants, lessives… » L’utilisation sous forme d’adjuvants constitue le plus souvent une niche dans l’usage général de l’ingrédient.

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