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Dérive administrative sur les zones de non traitement

Les zones de non traitement des produits phytos s’étendent au-delà des ZNT obligatoires au bord des points d’eau. Leurs modalités d’application peuvent différer selon les départements. Éclairage sur des mesures administratives qui sont parfois encore en discussion.

Les ZNT (zones non traitées) sont de nouveau obligatoires au bord des points d’eau. L’arrêté du 12 septembre 2006 qui les instituait avait été abrogé par le Conseil d’État sur un vice de forme l’an dernier. Quelques (vives) discussions sur de nouvelles versions ont finalement accouché d’un arrêté le 7 mai 2017 (1). Il n’apporte rien de nouveau sur les zones non traitées (2) sinon sur la définition des points d’eau. Il est vrai que la loi Biodiversité est passée par là, votée en 2016. Elle définit notamment ce qu’est un cours d’eau qui, pour être considéré légalement comme tel, doit présenter un lit naturel alimenté par une source et un débit suffisant la majeure partie de l’année (article L215-7-1 du Code de l’environnement). Une cartographie des cours d’eau se rapportant à cette définition a démarré dès 2015 dans chaque département. Les éléments qui y sont présentés se substituent à ceux de l’IGN (Institut national de l’information géographique et forestière) pour des dispositions réglementaires telles les ZNT.

Concernant les points d’eau de l’arrêté du 7 mai 2017, le texte mentionne qu’il s’agit « des cours d’eau […] et éléments du réseau hydrographique figurant sur les cartes au 1/25000 de l’IGN. Les points d’eau à prendre en compte pour l’application du présent arrêté sont définis par arrêté préfectoral dûment motivé dans un délai de deux mois… » L’État renvoie donc le dossier aux départements. Il n’y a pas eu d’arbitrage national sur les critères de définition de ces points d’eau aux bords desquels les ZNT sont obligatoires. « De la part de diverses organisations agricoles, il y avait une volonté d’harmonisation et de lisibilité sur leur définition mais nous n’avons pas été entendus par le gouvernement. Ce sont aux préfectures de décider de ces critères de définitions », constate Clémence Decherf, chargée de mission sur la protection des cultures au service environnement de la FNSEA.

Une administration parfois pointilleuse

Inévitablement, des disparités apparaissent avec ce que cela implique de difficultés pour une exploitation dont les terres sont situées sur plusieurs départements. Dans le Val-d’Oise, les points d’eau sont les cours d’eau cartographiés sur la base de la définition de la loi Biodiversité, ainsi que les mares, étangs, lacs et autres surfaces en eau de plus d’un hectare figurant sur les cartes IGN au 1/25000 les plus récemment éditées. Dans le Puy-de-Dôme, l’administration se montre plus exigeante aux yeux de la FNSEA puisque tous les plans d’eau des cartes IGN sont pris en compte sans limite de taille, ainsi que « les cours d’eau, fossés et autres points d’eau permanents ou intermittents figurant en points, traits continus ou discontinus sur les cartes IGN au 1/25000 ». Artificiels et non alimentés par des sources, les fossés se verraient donc attribuer des ZNT de 5 mètres sur leurs bords dans ce département auvergnat.

Le torchon brûle dans les Pays de la Loire entre les associations environnementales représentées par FNE/Pays de la Loire et une partie de la profession agricole. « Dans certains secteurs de la région, les cartes des services de l’État excluent une partie importante des éléments hydrographiques figurant sur les cartes de l’IGN, qui étaient auparavant protégés, selon Jean-François Gavallet, président de FNE-Pays de la loire dans un communiqué de presse daté du 24 juillet 2017. Nous assistons à une véritable régression environnementale qui va favoriser la pollution des eaux par les pesticides. » Le communiqué mentionne également la très forte déception sur la protection des fossés. « Les préfets n’ont pas fixé la moindre ZNT le long des fossés ou ils l’ont limitée à une largeur ridicule de 30 cm. Ces fossés représentent pourtant un linéaire très important à l’échelle de la région et contribuent donc massivement à la pollution des eaux. » Président de l’association UDPN44 de Loire-Atlantique, Christophe Grellier précise « qu’une ZNT d’un mètre était en vigueur jusqu’à maintenant en Loire-Atlantique et en Vendée. La remettre en cause constitue une régression environnementale totalement contraire à la loi Biodiversité ». En régions, des associations ne s’interdisent pas de saisir la justice contre les arrêtés jugés les plus insuffisants.

Discussions engagées sur les dispositifs végétalisés permanents

Agriculteur dans le Pas-de-Calais et membre de la commission environnement de la FNSEA, Christian Durlin connaît la question des fossés, appelés watringues dans sa région. « Nous avons un réseau hydrographique dense de ces watringues, gérés par l’homme depuis toujours. Ce ne sont pas des cours d’eau. Si l’on devait y appliquer des ZNT de 5 m sur leurs bords, on retirerait des milliers d’hectares de production agricole. Dans notre département, seuls les principaux watringues feront l’objet de ZNT. »

Utilisateur de produits phytos sur une partie de son exploitation, Christian Durlin s’interroge sur les dispositifs végétalisés permanents (DVP) exigés pour certains usages et qui accompagnent les ZNT. Il n’y a aucune possibilité de réduire leur largeur. « Il y a un flou artistique sur leur application. Nous n’accepterons pas qu’une mise en place se traduise par l’impossibilité de cultiver au-delà de ce qui existe avec les ZNT. Ce risque pèse d’autant plus sur certaines cultures où nous avons peu de solutions de traitements. » Selon Ronan Vigouroux, UIPP, « le gouvernement précédent avait promis un nouvel arrêté pour définir les conditions de réduction des DVP de 20 mètres à 5 mètres. Des discussions ont eu lieu l’an dernier avec un groupe de travail sur le sujet mais nous n’avons pas trouvé de consensus ». Ces discussions doivent continuer. En attendant, les produits nouvellement homologués et ceux qui font l’objet de réexamen se voient attribuer des DVP plus ou moins restrictifs pour leurs usages.

(1) Arrêté ministériel du 4 mai 2017 relatif à la mise sur le marché et à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques et de leurs adjuvants.
(2) Les modifications majeures concernent les EPI (équipement de protection individuel) et les délais de réentrée.

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Aux petits soins des zones tampons

Un groupe technique Zones tampons a été créé en 2011 avec son site dédié (1). Les zones tampons telles les bandes enherbées au bord des cours d’eau font leur preuve dans leur protection vis-à-vis des applications de produits phyto pour autant qu’ils assurent la rétention des polluants et leur biodégradation active. « Vis-à-vis du ruissellement notamment, ces bandes doivent permettre une infiltration superficielle, explique l’Irstea (2). Il faut alors en préserver la perméabilité en évitant toute compaction, assurer une bonne connexion entre la parcelle et la zone herbeuse et éviter tous courts-circuits tel les rigoles, les traces de roue dans la bande, les busages et drainages.

(1) zonestampons.onema.fr
(2) Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture.

Des distances à respecter pour les riverains vulnérables

Près de certains lieux accueillant des personnes dites vulnérables, des arrêtés préfectoraux ont été pris dans les différents départements en 2016 pour les préserver des risques d’exposition aux produits phytos. Sont concernés les enfants, les personnes âgées, celles hospitalisées… Ainsi, selon le type d’équipement de pulvérisation utilisé, des zones plus ou moins étendues de non traitement sont imposées aux horaires des activités des élèves à proximité des établissements scolaires ainsi que près de crèches, de haltes garderies, de relais d’assistance maternelle, de maisons de retraites, d’hôpitaux… Par contre, pour le riverain lambda et les zones résidentielles, aucune mesure de protection n’a été prise.

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