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Convention collective agricole : de nouvelles règles pour les employeurs

Les agriculteurs qui emploient un ou plusieurs salariés doivent appliquer la nouvelle Convention collective nationale agricole depuis le 1er avril. Parce qu’il a des incidences sur le contrat de travail et le bulletin de salaire, ce texte change beaucoup de choses. Lesquelles ?

L'employeur doit fournir l'ensemble des EPI nécessaires à la sécurité des salariés. © O. Ruch
En modifiant la classification des métiers, la nouvelle convention collective nationale implique un avenant au contrat de travail.
© O. Ruch

La Convention collective nationale agricole, dite CCNA, a été signée entre toutes les organisations syndicales de salariés et les employeurs agricoles, représentés par la FNSEA, premier syndicat d’employeurs de France. En modifiant la classification des métiers, cette convention implique un avenant au contrat de travail, modifie les bulletins de paie et peut conduire à la majoration de la rémunération des salariés.

Toutefois, son incidence varie d’un département à l’autre. Jusqu’à présent, le contrat de travail d’un salarié agricole s’appuyait sur la convention collective s’appliquant dans le département du siège de l’exploitation. Plus d’une centaine de conventions collectives existent aujourd’hui en France, avec des différences selon les départements, parfois au sein même d’une région.

Les conventions départementales ne disparaissent pas pour autant : elles subsistent sous le nom d’accords territoriaux autonomes (Ata) et sont l’occasion pour les organisations de salariés et d’employeurs de s’accorder en fonction des problématiques locales. Il peut s’agir du montant des primes, du travail durant les jours fériés ou du dépassement des heures travaillées. Toutefois, leurs dispositions ne peuvent pas déroger à la CCNA, sauf dans un sens plus favorable aux salariés.

La nouvelle classification pour valoriser les emplois

La nouvelle classification des métiers est la grande nouveauté de cette CCNA. Elle établit une grille nationale unique, applicable partout en France. Fini les niveaux de poste et les échelons. Chaque employeur doit effectuer une « valorisation » de ses emplois. Concrètement, il doit positionner ses salariés sur une grille de classification en fonction du poste exercé par chacun. Pour cela, il dispose de cinq critères que sont la technicité du poste, son degré d’autonomie, sa responsabilité, son relationnel et son management.

L’exercice requiert de s’approprier une méthode nouvelle puis de l’appliquer de manière objective. La subtilité est que le positionnement dans la grille doit tenir compte des exigences et compétences requises pour l’emploi, pas de celles de la personne employée.

« C’est l’emploi qu’il s’agit de valoriser et non la personne », détaille Anne Mercier, présidente de la section employeurs à la FRSEA Centre-Val de Loire.

Une bonne occasion d’échanger avec son salarié

« Cette démarche est un bon moyen d’échanger avec son salarié sur son poste, sur ce que l’on attend de lui, et lui permettre de se former et d’évoluer. Cette grille permet au salarié de monter en compétences », complète la responsable.

Chaque employeur doit positionner tous ses salariés sur une grille de classification en fonction du poste exercé par chacun par critère. À chacun des cinq critères correspond un degré de compétence, attribué selon les exigences de l’emploi, qui permet l’attribution d’un nombre de points. Globalement, plus le poste requiert l’exécution de tâches techniques, complexes, nombreuses et impliquant des prises de responsabilité, plus le degré et le nombre de points seront élevés. Le total des points des cinq critères donne le coefficient d’emploi, qui correspond à un palier dans la grille de rémunération.

Un palier qui détermine le salaire horaire minimum

C’est ce palier qui détermine le salaire horaire minimum applicable au salarié. Si le salaire actuel est inférieur au salaire minimum déterminé par le palier, une augmentation est à prévoir : c’est la disposition la plus favorable au salarié qui s’applique. Si le salaire est déjà plus élevé que celui déterminé par la nouvelle classification, aucun ajustement de la rémunération ne s’impose.

Au-delà du salaire, le coefficient détermine la catégorie socioprofessionnelle du poste, c’est à-dire son statut. Si le coefficient est inférieur à 105 points, le salarié entre dans la catégorie « technicien ». Si son coefficient est supérieur ou égal à 105 points, il peut prétendre à la catégorie « agent de maîtrise ». Pour cela, il doit en plus réunir un certain nombre de degrés et de points sur des critères d’autonomie, de technicité et de management. À partir de 197 points, un salarié peut, sous conditions de degrés et de points, prétendre à la catégorie « cadre ». Attention : ces catégories modulent les droits sociaux et changent les régimes de retraite et de prévoyance.

Si les avantages sociaux liés à la nouvelle catégorie sont moins favorables au salarié que ce qui était appliqué jusque-là, l’employé conserve ses avantages (régime de protection sociale, salaire, primes…). Par contre, si un nouvel embauché occupe le même emploi, c’est l’affiliation liée à la nouvelle catégorie socioprofessionnelle qui s’appliquera.

Sur le terrain, l’application est parfois plus complexe car chaque situation est un cas particulier. Par exemple, dans le cas d’un remplacement, si un salarié occupe temporairement des fonctions liées à un poste mieux valorisé que sa fonction habituelle, faut-il appliquer les avantages liés à sa fonction temporaire ? Non, car cela conduirait à augmenter puis à diminuer régulièrement le coefficient au gré des remplacements. L’attribution d’une compensation, d’une indemnité ou d’une prime exceptionnelle est plus appropriée.

Pas de correspondance avec les anciennes classifications

De même, il est déconseillé de vouloir raccorder automatiquement les anciens niveaux et le nouveau système de classification.

« L’ancienne classification était mal appliquée par la très grande majorité des agriculteurs, relève Olivier Marin, juriste et chef du service main-d’oeuvre à la FNSEA27. La pratique était souvent de prendre le barème des salaires et de fixer le niveau de l’emploi en fonction du salaire que l’on avait prévu de payer. » En voulant trouver des correspondances entre l’ancienne et la nouvelle grille, le risque est de proposer une rémunération non justifiée.

Pour éviter ces situations, être épaulé, s’informer et se former, il est recommandé de se rapprocher de services spécialisés présents dans la plupart des départements agricoles, au sein de CER, des FNSEA départementales ou de cabinets d’experts-comptables.

L’ensemble de ces modifications modifient plusieurs points du bulletin de paie puisque le nom de la convention collective, le taux horaire, la classification et la catégorie socioprofessionnelle y figurent. Devant ce changement radical de méthode, jouer la montre est risqué. Désormais, pour appliquer cette nouvelle Convention collective, le plus tôt sera le mieux car ses effets sont rétroactifs au 1er avril : plus on attend, plus le rattrapage aura d’incidences… et plus on s’expose à des sanctions en cas de contrôle et à l’apparition d’un contentieux avec ses salariés.

Une retraite supplémentaire à appliquer

Parmi les nouveautés à intégrer dans le bulletin de salaire : la retraite supplémentaire des salariés techniciens et agents de maîtrise. Cette retraite par point est obligatoire.

Elle complète les régimes de retraite de base et complémentaires. Elle va améliorer la pension des salariés une fois à la retraite, dans le but de contribuer à augmenter l’attractivité des métiers de l’agriculture.

En agriculture, cette retraite supplémentaire existait seulement pour les cadres.

À compter du 1er juillet 2021, elle sera obligatoire pour tous les salariés. Les employeurs doivent pour cela contacter un assureur pour souscrire un contrat d’épargne retraite collectif. Supportée à 50 % par l’employeur, elle s’applique à hauteur de 1 % du salaire brut pour tout salarié ayant travaillé douze mois continus dans l’entreprise.

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