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Azote
Chercher le double effet Cipan et engrais vert

Après le piégeage des nitrates, le couvert peut restituer de l’azote à la culture qui suit. Comment connaître la quantité précise de l’élément pour économiser sur les apports azotés sans risques ?

D’un côté, il y a une culture intermédiaire qui doit pomper les nitrates. D’un autre, le même couvert doit restituer cet azote à la culture qui suit avec l’espoir d’économiser un peu d’engrais. Cette efficacité de pompage et de restitution dépend des espèces végétales choisies pour le couvert, de la biomasse produite, de la date de destruction… « Le mélange d’espèces avec légumineuse est souvent mis en avant pour produire un double effet de culture intermédiaire piège à nitrates (Cipan) et d’engrais vert, cite Éric Justes, Inra. Chaque espèce ou famille d’espèces peut être caractérisée par son rapport carbone sur azote C/N. Moins cette donnée est importante, plus le taux de minéralisation de l’azote du couvert végétal sera élevé, explique le chercheur de l’Inra. Mais il faut tenir compte de la dynamique de libération de cet azote pour la culture qui suit car une majorité de l’élément fertilisant est stockée dans l’humus du sol. Par exemple, si la pluviométrie hivernale est faible, il se produit peu de lixiviation et de minéralisation en azote des résidus de Cipan. Il est nécessaire d’adapter l’espèce et la date de destruction en fonction du pédoclimat de la région », conclut Éric Justes. On en revient à un mélange d’espèces associant plusieurs propriétés. Une légumineuse se caractérise par un C/N faible laissant augurer un fort apport d’azote à la culture suivante. Pour la graminée, le C/N peut être élevé et il vaut mieux éviter qu’il ne dépasse 20 car les risques d’organisation nette de l’azote sont importants, ce qui peut induire une faim d’azote pour la culture de printemps. La graminée est une plante efficace en revanche pour remonter les taux de matière organique des sols. La moutarde se situe entre les légumineuses et les graminées. « Toujours dans le but d’optimiser la synchronie entre libération d’azote et absorption de la culture suivante, la destruction de la culture doit s’effectuer avant Noël, selon Éric Justes. Pour une interculture de moutarde, septembre et octobre sont les deux mois cruciaux où la plante absorbe l’azote. » Plus tard, le pompage de l’azote est beaucoup moins efficace mais continue néanmoins.


MESURE DE RESTITUTION D’AZOTE
Comment estimer la quantité d’azote dont bénéficiera véritablement la culture suivante ? Depuis 2010, les chambres d’agriculture de Poitou-Charentes utilisent un outil d’aide à la décision qui répond à cette question. Son nom : Merci pour Méthode d’estimation des éléments restitués par les cultures intermédiaires. « Bien calé pour notre région Poitou-Charentes, cet outil est transposable dans toute la France. Il peut être utilisé par les conseillers agricoles et les agriculteurs eux-mêmes avec une mise à disposition gratuite(1), informe Sébastien Minette, de la chambre d’agriculture de Poitou-Charentes. Il fonctionne sur le même principe que la réglette Azote colza du Cetiom avec, dans un premier temps, la mesure de biomasse d’un couvert végétal à partir de prélèvement de plantes au champ sur des placettes d’un mètre carré. » Les pesées doivent se faire juste avant la destruction du couvert sur trois placettes, de préférence en prélevant les parties aériennes de plantes non mouillées et en séparant les plants par espèces végétales. Une fois le poids de la biomasse mesurée pour les trois placettes et chaque espèce du couvert, les données peuvent être saisies sur l’applicatif informatique Merci ainsi que la date de semis. L’outil donne en retour la matière sèche totale, la quantité d’azote piégé et la restitution potentielle des éléments N, P et K à la culture suivante.


EFFETS PÉDOCLIMATIQUES EN SUS
Merci ne prend évidemment pas en compte les précipitations qui vont suivre d’ici le semis de la culture et qui joueront sur le lessivage de l’azote. « Les quantités d’azote sont susceptibles d’évoluer par rapport à notre mesure des restitutions. Lors du raisonnement de la fertilisation azotée, il sera utile d’avoir recours à une méthode de calcul qui permettra d’estimer justement ce lessivage comme PC Azote », conseille Sébastien Minette. Pour le spécialiste, on arrive parfois à des niveaux de restitution d’azote de 40 ou 50 unités ce qui, avec le coût des engrais azotés (autour d’1 euro l’unité), n’est pas négligeable en termes d’économies possibles. L’applicatif Merci est disponible gratuitement auprès des conseillers de chambre d’agriculture(1). Il existe d’autres méthodes reposant sur des analyses de sols pour estimer l’azote rendu à la culture par le couvert. Elles présentent l’intérêt de mesurer précisément le stock d’azote minéral dans le sol. Inconvénient : les résultats des analyses demandent du temps et… de l’argent. « Un reliquat de sortie d’hiver coûte 15 euros par horizon — 45 euros en tout — et un prélèvement de sol n’est pas possible dans les terres à cailloux comme il en existe en Poitou-Charentes », souligne Sébastien Minette. Les méthodes sont à adapter à chaque situation locale.
(1) sebastien.minette@poitoucharente.chambagri.fr

Rendre l’azote disponible au bon moment avant une orge brassicole de printemps


Plus que pour toute autre culture, l’azote minéralisé issu de la culture intermédiaire doit être procuré au bon moment sur une orge de printemps brassicole. « Face à cet objectif, les difficultés sont de deux ordres, présente Mathieu Killmayer, ingénieur régional Arvalis en Bourgogne. On évitera une carence d’azote au départ car une orge de printemps doit se développer rapidement. Il faut faire en sorte que le couvert ne libère pas l’azote trop tardivement sous l’orge sinon on augmente les risques de produire de la protéine dans le grain, avec un taux de 11,5 % à ne pas dépasser. Ce dernier point est réglé si le couvert est détruit bien avant l’entrée en hiver, selon Mathieu Killmayer, à savoir en novembre, voire octobre. » Une moutarde semée avant le 1er septembre et détruite avant le 15 novembre répondra à cette exigence. Peut-on semer une légumineuse avant une orge brassicole ? « Les agriculteurs sont peu à l’aise avec cette famille de plante qui capte l’azote. Mais c’est de l’azote tout de suite disponible pour la culture à suivre. Il est donc possible d’implanter une légumineuse (vesce, trèfle…) en association avec une autre famille de plante tout en évitant le choix d’une graminée comme l’avoine qui a un effet dépressif sur les orges. »

Pour éviter la transformation de l’azote du sol en protéines dans le grain, il est nécessaire de raisonner sa fertilisation azotée en prenant en compte l’apport d’azote par le couvert. Si on ne change rien à sa fertilisation avec l’introduction d’une culture intermédiaire, on s’expose à des risques de surfertilisation préjudiciable à la qualité de la graine.

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