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Ravageur des céréales
Alerte orange à la cécidomyie du blé

Les attaques localisées, mais parfois très sévères, de cécidomyies oranges en 2009 ont attiré l’attention sur cet insecte dont la gestion reste délicate.

Insaisissables cécidomyies. Incertitudes sur leur nuisibilité, interrogations sur l’efficacité des méthodes de lutte, alternance de périodes de grande discrétion et d’années à forte pression… le petit insecte n’en finit pas de brouiller les pistes. En 2009, la cécidomyie orange, l’une des deux espèces qui s’en prend au blé, a fait une apparition remarquée dans de nombreuses régions, y compris hors de ses fiefs habituels. Avec ses deux millimètres de long, l’insecte a affolé les bulletins de surveillance et animé les conversations non seulement entre le nord de la région Centre et le Nord-Pas-de-Calais, mais aussi en Bourgogne et en Auvergne. « En 2009, nous avons assisté à une conjonction de plusieurs facteurs favorables qui a entraîné des dégâts bien supérieurs à ce qu’on avait pu voir depuis 15 ans », explique Michel Martinez, entomologiste à l’Inra. Pour que ce diptère se transforme en menace, il faut en effet réunir plusieurs conditions : une fin de mois de mai pluvieuse et douce permettant l’émergence des adultes, une absence de vent compatible avec l’activité de ponte, et une bonne synchronisation entre le cycle du ravageur et le stade de la plante hôte. La cécidomyie sait s’armer de patience : sa larve peut attendre dix ans dans le sol le bon moment pour remonter à la surface.

C’était le cas l’an dernier. Au-delà des témoignages dignes de films d’horreur (des nuages noirs de cécidomyies audessus de parcelles ou des pare-brises couverts d’insectes), difficile d’évaluer le nombre de quintaux en moins imputable à la bestiole.

DÉGÂTS LOCALISÉS

Pour Olivier Pillon, rapporteur auprès de la Direction générale de l’alimentation du ministère de l’Agriculture, « il y a eu des attaques spectaculaires, mais les impacts importants sur le rendement ont été très localisés. Bien malin qui peut chiffrer les pertes. » « Nous ne disposons pas de moyen d’estimation fiable de la nuisibilité, confirme Michel Bonnefoy, ingénieur Arvalis en région Centre. Dans certaines parcelles du nord de la Vienne qui ont subi de très fortes infestations, on a toutefois constaté des chutes de plus de 30 quintaux, sans autre explication que la cécidomyie. »

Le rendement n’est d’ailleurs pas la seule victime: la qualité peut aussi être dégradée au travers du poids de mille grains, du risque de germination sur pied et du Hagberg. De nombreux facteurs influencent la nuisibilité de l’insecte. La simultanéité entre l’apparition des adultes et le stade de sensibilité du blé (épiaison-floraison) arrive en tête. Si la ponte survient trop tard, les larves ne pourront pas se développer au coeur de l’épi et n’occasionneront pas de dégât au grain.

RÉSISTANCE VARIÉTALE

Vis-à-vis des insecticides, la vulnérabilité des adultes est le seul talon d’Achille de la cécidomyie. Et même dans ce cas, l’efficacité de la lutte chimique reste très aléatoire. De plus, « il y a beaucoup d’auxiliaires à cette période, et les insecticides ne sont pas sélectifs, met en garde Jérôme Brunet, du service agronomie de la chambre d’agriculture de l’Indre. En faisant ainsi le ménage, on peut favoriser l’arrivée du puceron des épis. »

Essayer de prévenir grâce à l’agronomie plutôt que de traiter, c’est également l’une des conclusions des observations d’Olivier Pillon. Le blé sur blé est ainsi à éviter, tout comme l’installation de blé sur des parcelles contiguës aux champs attaqués l’année précédente. Au contraire, diversifier la rotation et composer une mosaïque de cultures, dont certaines peuvent jouer le rôle d’écran, limite les risques. Autre piste agronomique prometteuse : la voie variétale. Certains pays se sont focalisés sur la résistance à la cécidomyie dans la sélection du blé, comme au Royaume-Uni. Les résultats sont incontestables, mais la plupart des variétés incluant ce caractère ne sont pas adaptées aux conditions climatiques françaises, à l’exception d’Altigo.

En attendant que la liste des variétés résistantes ne s’allonge, l’hiver long et froid que l’on connaît actuellement pourrait favoriser des émergences massives de cécidomyies au printemps prochain, particulièrement là où l’insecte a pu pondre en abondance en 2009.Raison de plus pour chausser les bottes au printemps et s’astreindre à un tour de plaine régulier

Une lutte chimique aléatoire

À l’exception d’un nouveau produit lancé par Bayer à l’automne, les insecticides homologués contre les cécidomyies du blé sont des pyréthrinoïdes, une matière active agissant par contact et à la rémanence très limitée. Le traitement doit donc être positionné en pleine période d’activité des adultes, lorsque ceux-ci sont en vol au moment de la ponte. Le créneau est étroit : non seulement les adultes vivent à peine quelques jours, mais les femelles ne quittent le couvert protecteur qu’en soirée, laissant peu de temps pour sortir le pulvérisateur.

Mieux vaut alors ne pas louper la courte fenêtre de tir. « Lorsqu’un épisode pluvieux de 10 à 30 millimètres fin mai est suivi d’un temps doux, humide, sans vent, il est utile d’aller observer, affirme Olivier Pillon, spécialiste auprès du ministère de l’Agriculture.Même si c’est pour constater qu’il n’y a rien, cela vaut de l’or. » Le vent empêche ces voiliers malhabiles de se poser pour pondre, et écarte donc naturellement le danger.

UNE STRATÉGIE À LA PARCELLE

Pour déterminer le risque, impossible de se contenter de bulletins d’avertissement : les phénomènes d’attaque sont tellement localisés qu’il convient d’adopter une stratégie à la parcelle. Pour faciliter la tâche, Arvalis préconise d’y installer des cuvettes jaunes dont le sommet est positionné à la base des épis. Si l’on relève dans la journée plus de 10 individus piégés en 24 heures, alors mieux vaut revenir le soir après 20 heures pour vérifier l’activité des adultes. « S’il n’y a pas de vent et qu’à chaque pas se forme un nuage de petites mouches qui se mettent dans une position caractéristique pour pondre sur les épis, il est préférable d’intervenir », conseille Michel Bonnefoy, d’Arvalis.

En cas de vols successifs, « c’est la première intervention qui apportera le maximum d’efficacité », souligne Olivier Pillon. Dernier écueil : ne pas confondre la cécidomyie du blé avec l’un des nombreux moucherons inoffensifs présents dans les parcelles. !

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