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Fongicides céréales : quelle place accorder aux produits à base de SDHI ?

Les fongicides à base de SDHI utilisés majoritairement au stade « dernière feuille étalée » constituent le pivot de la lutte fongicide contre la septoriose. La montée de la résistance du pathogène à ces produits et leur toxicité doivent amener à réfléchir à une utilisation raisonnée.

avril 2002 - rinçage du pulvérisateur après application d'un mélange fongicide et raccourcisseur sur blé tendre
Contre la septoriose, on protégera les feuilles les plus importantes pour l’élaboration du rendement, au stade dernière feuille étalée.
© G. Omnès

« Près d’un quart (22 %) des populations de septoriose est devenu très résistant aux fongicides de la famille des SDHI en moyenne en France en 2023, annonce Jérôme Thibierge, ingénieur en protection intégrée des cultures chez Arvalis. La proportion de ces souches dites CarHR était de 14 % en 2022. » À cela, il faut ajouter les souches CarR (faiblement à moyennement résistantes), passées de 16 % en 2022 à 19 % en 2023, selon les analyses réalisées par Inrae.

En plus d’une résistance de la septoriose très élevée aux triazoles (haute résistance chez 63 % de la population), le pathogène évolue désormais face à l’utilisation importante de produits à base de SDHI. On décèle des baisses d’efficacité de fongicides sur le terrain. « Dans les plateformes d’essais, nous commençons à observer de légers décrochages d’efficacité avec des produits contenant des SDHI comme Librax et Revistar XL, témoigne Hélène Gosse de Gorre, conseillère culture à la chambre d’agriculture du Nord-Pas-de-Calais. Il y a eu un peu de déception cette dernière campagne sur la performance de ces spécialités avec de petites pertes de rendements par rapport à ce que l’on obtenait précédemment. Cela nous a amenés à relever un peu les doses préconisées pour l’utilisation de ces produits. »

Arvalis a réalisé des essais de performance de produits dans des situations où les souches CarHR représentaient une forte proportion de la septoriose (51 % en moyenne). « On perd environ 15 % d’efficacité des produits à base de SDHI testés (Revystar XL, Elatus Era) comparé à des essais où les souches CarHR étaient inférieures à 20 %, remarque Cyrille Gaujard, ingénieur régional chez Arvalis. La forte proportion de souches hautement résistantes entraîne globalement une diminution d’efficacité. »

Un seul SDHI par campagne

Les produits à base de SDHI sont plébiscités sur blé tendre, positionnés préférentiellement au stade « dernière feuille étalée » (DFE). À lui seul, le produit Revystar XL a été utilisé sur près de 2 millions d’hectares de céréales en 2023 selon la société BASF qui le commercialise. Autres produits couramment utilisés associant SDHI et triazoles : Librax, Elatus Era, Kardix… Les organismes prescripteurs mettent en avant la règle d’une seule utilisation par campagne de SDHI. Elle est globalement respectée sur blé tendre. Conseiller à la chambre d’agriculture de l’Aisne, Nicolas Jullier confirme : « il ne faut qu’un SDHI dans l’année et alterner les matières actives entre les traitements et produits. Nous ne voulons pas nous retrouver dans la même situation qu’en Grande-Bretagne où des doubles applications de SDHI figuraient dans les usages. Les difficultés y sont grandes dorénavant pour gérer la septoriose. Des baisses de rendement conséquentes sont notées au fil des années avec des traitements Revystar ou Elatus. »

Hélène Gosse de Gorre recommande l’utilisation des SDHI sur les stades où il faut protéger les feuilles les plus importantes pour l’élaboration du rendement. Exemples de produits préconisés à DFE : Revystar XL 0,5 à 0,75 (+ Comet ou Amistar), Elatus Era 0,5 à 0,6, Kardix 0,6 à 0,7 (+ Quibilium ou Amistar)… Selon la tolérance aux maladies des variétés de blé utilisées et des conditions climatiques, un traitement T1 au stade 2 nœuds et un traitement T3 à épiaison-floraison pourront être conseillés.

Fenpicoxamide, alternative aux triazoles et SDHI

Depuis deux ans, une molécule se distingue : le fenpicoxamide, contenue dans les produits Aquino, Univoq, Questar. Elle appartient à une famille chimique différente de celle des triazoles et des SDHI. Aucune souche résistante de septoriose à cette molécule n’a été détectée jusqu’à présent. L’efficacité d’Univoq (fenpicoxamide + prothioconazole) à 1 l/ha est équivalente dans les essais Arvalis à celles de Revystar XL 0,75 l, Kardix 0,9 l et Elatus Era 0,75 l. Le produit ne contient pas de SDHI.

Arvalis a noté également le bon niveau d’efficacité par rapport aux références des mélanges Questar 1,1 + Elatus Plus 0,55 l (= pack Approvia + Aquino) ou de Questar 1,1 + Silvron 0,55, associant à chaque fois le fenpicoxamide à des SDHI. Ces associations ne comportent pas de triazoles. Le fenpicoxamide constitue une alternative aux SDHI et triazoles confrontés au développement de la résistance de la septoriose mais il doit être toujours associé à une autre molécule afin de préserver sa bonne efficacité.

 

 
Fongicides céréales : quelle place accorder aux produits à base de SDHI ?

L’helminthosporiose de l’orge fait (aussi) de la résistance

Sur orge, les SDHI sont confrontés à la résistance de l’helminthosporiose à des niveaux encore plus élevés que la septoriose sur blé. « La mutation C-G79 R conférant le facteur le plus élevé de résistance se retrouve en 2023 dans l’ensemble des échantillons collectés et à 66 % en fréquence dans les parcelles concernées », rapporte Cyrille Gaujard, Arvalis. L’intérêt des SDHI se retrouve surtout positionné en sortie dernière feuille ou barbes pointantes, pour lutter contre un large éventail de maladies foliaires, avec toujours la règle d’un seul SDHI par campagne. Mais l’utilisation du traitement de semences Systiva, contenant un SDHI, bouleverse la donne. Pour Arvalis, il ne doit être en aucun cas systématisé (sous peine de risque de résistances…) et à réserver aux situations à risque élevé en rhynchosporiose et à pression faible en helminthosporiose.

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