Désherbage : « Un seul traitement sur la majorité de mes blés, à l'automne »
Il reste possible de contrôler les graminées adventices en un seul passage herbicide à l'automne, même quand la météo ne permet pas un traitement de prélevée dans de bonnes conditions. Cela passe par des leviers agronomiques, comme chez Vincent Leroux dans l’Eure.
Il reste possible de contrôler les graminées adventices en un seul passage herbicide à l'automne, même quand la météo ne permet pas un traitement de prélevée dans de bonnes conditions. Cela passe par des leviers agronomiques, comme chez Vincent Leroux dans l’Eure.
« J’ai limité à un seul traitement l’utilisation d’herbicides dans une majorité de mes blés en 2021-2022, en post-levée précoce. » Il y a plus de cinq ans, Vincent Leroux, agriculteur à Nojeon-en-Vexin dans l'Eure, est passé d’un programme de désherbage avec traitements d’automne (à base de chlortoluron) et de sortie d’hiver (Atlantis) à un ou deux passages à l’automne.
« Le produit Atlantis n’est plus suffisamment efficace sur ray-grass et je réduis les phytos d’année en année, pour des raisons économiques, environnementales et de santé », souligne le producteur qui fait partie du réseau des fermes Dephy Ecophyto. Les terres exploitées par Vincent Leroux se situent en outre sur un bassin d’alimentation de captage avec des mesures de protection de la qualité des eaux.
L’agriculteur sème ses blés de plus en plus tard. « Ce décalage de semis est devenu une stratégie contre les adventices. J’ai des terres faciles à travailler où je peux me permettre cette stratégie, avec un écart d’un peu plus d’un mois entre les deux extrêmes en termes de dates. La date de semis a un impact important et j’ai bien conscience de perdre du rendement, de l’ordre de 5 à 10 quintaux par hectare, observe-t-il. Cette dernière campagne, le blé semé le plus tôt était le plus sale. »
Plusieurs essais d’Arvalis montrent que le décalage de semis d’une vingtaine de jours réduit fortement les populations de vulpin et de ray-grass. « On s’éloigne de la période de levée préférentielle de ces graminées de début d’automne et ces mauvaises herbes sont alors plus faciles à gérer par des passages mécaniques ou des applications chimiques », explique Lise Gautellier-Vizioz, spécialiste en protection intégrée des cultures chez Arvalis.
« Avec ce décalage, on bénéficie aussi d’une croissance moins active des adventices grâce aux températures plus faibles et à la réduction de durée du jour, observe Bertrand Omon, chambre d’agriculture de Normandie. On a plus de temps pour gérer ces adventices et plus d’humidité qui améliore l’efficacité d’herbicides comme le flufenacet. Tout cela converge vers une lutte plus performante contre les adventices avec le challenge de ne faire qu’un seul passage herbicide au lieu de deux ou trois. »
Vincent Leroux est surtout ennuyé par les ray-grass. « Je retrouve cette adventice dans les céréales d’hiver et de plus en plus dans les cultures de printemps. J’ai choisi de labourer davantage. Près de 80 % des céréales ont été semées après labour la campagne passée. Cela fait partie des armes efficaces contre les adventices. »
L’agriculteur table également sur la rotation diversifiée de ses cultures pour mieux contrôler les mauvaises herbes. « J’alterne cultures d’hiver et cultures de printemps. Je ne fais jamais de blé sur blé. Cette rotation diversifiée m’offre une variété de matières actives et de produits pour lutter contre les graminées, par exemple, Kerb Flo (propyzamide) sur colza et luzerne, Mercantor Gold (s-métolachlore) sur betterave, Select (cléthodime) sur lin, pois et betterave… Sur des cultures comme la betterave et le maïs, j’ai recours en outre au binage contre les adventices. »
Bertrand Omon met en avant l’efficacité de la rupture rotationnelle. « Quand on est confronté à une forte pression de graminées dans une céréale, il n’y a pas d’autre choix que de casser la rotation. Cela permet d’introduire des cultures avec moins de potentiel de levée de ces adventices et d’utiliser des herbicides bien différents de ceux appliqués sur céréales. Mais attention : il y a des rotations qui sont des faux amis. Le colza ne convient pas s’il est encadré par deux céréales, ni un blé qui revient tous les deux ans. Dans ces cas, la coupure rotationnelle n’est pas suffisamment longue. »
Vincent Leroux voit des limites à ne recourir qu’à la post-levée précoce en désherbage du blé. « Cela impose d’intervenir au bon stade, à 1-2 feuilles du ray-grass et 2 feuilles du blé. On n’a alors qu’une cartouche pour réussir son désherbage. Or, des pluies ou des premières gelées peuvent empêcher de traiter au bon stade. Pour cette raison, j’ai dû attendre un 28 janvier la campagne passée pour désherber l’une de mes parcelles. » Pour l’automne 2022, l’agriculteur songe à utiliser un nouveau produit en prélevée efficace sur ray-grass, Mateno, avec la possibilité d’un rattrapage en post-levée dans les parcelles sales avec Fosburi + Daiko. La priorité reste de ne pas se laisser déborder par la graminée adventice.
CHIFFRES CLES
Un assolement diversifié
154 ha dont 67 de blé tendre en 2021-2022, 25 de betterave sucrière, 15 de colza, 11 d’orge de printemps, 11 de pois de printemps, 7 de luzerne, 7 de lin textile, 7 de jachère (suite à un semis de maïs détruit par les corvidés)…
Sols limoneux profonds et limono-argileux à silex pour moitié chacun
Entre 85 et 95 q/ha de rendement en blé (86 en 2022)
IFT herbicide de 2 environ, au-dessus de la moyenne du groupe Dephy 27 à cause des traitements sur betterave sucrière
Orge : une panoplie herbicide plus restreinte
L’escourgeon est une céréale couvrant bien le sol avec un effet étouffant sur les adventices. Vincent Leroux réalise un traitement de post-semis à base d’Aranda 2 l/ha + Compil 0,2 l/ha, sans besoin de rattrapage. La panoplie d’herbicides sur orge est plus restreinte qu’en blé. « Un produit comme Mateno n’est pas autorisé. Il y a moins de possibilités de mélange avec Défi, surtout en post-levée, remarque Ludovic Bonin, Arvalis. S’il y a des infestations importantes, la prélevée est obligatoire en associant par exemple le produit Défi à du diflufenicanil (DFF), plus particulièrement contre les ray-grass, ou une base flufenacet à la place de Défi contre les vulpins."