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[Covid 19] Le ton monte entre la Fédération Nationale Bovine et le Ministère de l’Agriculture

Alors que le prix des bovins finis dévisse, la Fédération Nationale Bovine déplore davantage de « paroles » que d’ « actes » de la part du Ministre de l’Agriculture. Lequel se dédouane de toute responsabilité dans la crise que traversent les éleveurs.

Alors que les ventes en grande distribution bénéficient largement du quasi-arrêt de la restauration hors foyer, la dégringolade du prix des animaux en ferme suscite des tensions accrues entre la Fédération Nationale bovine et le Ministère de l’Agriculture.
© F. d'Alteroche

La plongée est impressionnante et surprend par son ampleur. Si on s’en tient aux seules cotations France Agrimer, le prix moyen pondéré des gros bovins entrée abattoir a dégringolé entre la semaine 12 et la semaine 15. Il était de 3,45 € du kilo de carcasse en semaine 15 contre un peu plus de 3,52 € en semaine 12 et surtout 3,61 € l’an dernier à même époque. Toutes les catégories de gros bovins sont concernées. Certes, le printemps se traduit classiquement par une érosion des tarifs pour les taurillons, mais la baisse est plus rapide et plus intense cette année. C’est surtout pour les femelles que l’évolution est atypique. Le printemps se traduit habituellement par une tendance haussière pour les vaches et génisses. Cette année, c’est l’inverse qui se produit. Le prix des différentes catégories de femelles dévisse de façon importante. D’après les relevés de France Agrimer, la vache R est à 3,71 € du kilo carcasse en semaine 15. Elle perd près de 10 centimes en trois semaines. Mais selon les grilles d’achat d’opérateurs de l’aval et les remontés des éleveurs, les chiffres France Agrimer seraient surtout bien au-delà de ce qui est réellement pratiqué sur le terrain. Selon l’âge, la catégorie et le niveau de finition, le prix des vaches R oscille plutôt entre 3,20 et 3,50 € du kilo carcasse actuellement.

Retenir les animaux en ferme

C’est d’autant plus incohérent que la progression des achats de viandes hachées fraîches ou congelées a été spectaculaire à compter de mi-mars. « En ce qui concerne les viandes hachées (toutes espèces), l’indicateur IRI sur les semaines 9 à 14 (début mars à début avril) donne une augmentation de 24 % des achats en frais et de 60 % en surgelé. » indiquait l’Institut de l’élevage. C’est cette incohérence qui a conduit le 15 avril dernier la Fédération Nationale Bovine à inciter les éleveurs à retenir en ferme le plus possible leurs animaux prêts à abattre. « Le maintien des animaux en ferme est une décision difficile à prendre, car nous avons à coeur de continuer à proposer aux citoyens des viandes de qualité. Mais c’est aussi malheureusement la seule option qui nous reste aujourd’hui. » expliquait alors Bruno Dufayet, son Président. Une proposition pour laquelle la Fédération Nationale Bovine a d’ailleurs obtenu le soutien de la Confédération Paysanne. Pour la Fédération Nationale Bovine, cet appel à maintenir les animaux en ferme n’a pas simplement vocation à dénoncer l’attitude irresponsable des acteurs de l’aval. Elle est également le résultat de l’absence d’action concrète du Gouvernement pour soutenir le prix payé aux éleveurs et leur permettre de remplir leur mission essentielle : continuer à approvisionner le marché.

Grandes et belles déclarations

Et Bruno Dufayet de souligner à l’égard d’un gouvernement peu avare en grandes et belles déclarations sur l’importance de conserver à la Nation « souveraineté et indépendance alimentaires », que la logique de ces beaux discours devrait se traduire « par assurer le maintien de notre production agricole, en permettant aux éleveurs de vendre leurs animaux à un prix couvrant leur coût de production ! C’est la seule demande que nous avons faite au Ministre de l’Agriculture depuis le début de la crise du Covid-19. Et c’est la seule demande que nous lui renouvelons aujourd’hui. »

En réponse aux demandes de la FNB, Didier Guillaume a signifié le 16 avril son refus d’instaurer pour les éleveurs un prix minimum correspondant à la hauteur de leurs coûts de production. Dans un courrier, le Ministre se dédouane de toute responsabilité dans la crise que traversent les éleveurs. Il indique, que cette mesure « pourrait se révéler, in fine, contre-productive en favorisant la viande importée au détriment de la production nationale ».

Des déclarations qui ont le don d’exaspérer les éleveurs. « Quel Ministre de l’Agriculture peut accepter avec tant de passivité, dans la période actuelle, que les éleveurs vendent leurs animaux à un prix encore plus bas, alors que celui-ci stagnait déjà depuis des années bien en-dessous de leur coût de production ? » s’agace la FNB dans un communiqué. « Comment, après trois ans de travaux menés avec l’ensemble des filières pour revaloriser les prix agricoles au niveau du coût de production des agriculteurs - principale ambition des Etats généraux de l’Alimentation -, le Ministre peut-il tenir de tels propos ? De plus, quel Ministre de l’Agriculture peut, après avoir contraint les députés de sa majorité à ratifier le CETA, refuser une telle demande des éleveurs en invoquant sa volonté de les protéger des viandes importées ? » La Fédération Nationale Bovine entend de ce fait amplifier son appel aux éleveurs à maintenir leurs animaux en ferme afin de favoriser une tension sur leurs prix.

 

 

 

 

Pas la bonne solution ?

Pour la Coordination Rurale, le fait de retenir les animaux en ferme n’est pas la bonne solution. Et d’estimer que cette rétention de bovins sur pied "n'aura aucun effet sur les prix et se traduira par des coûts supplémentaires pour les éleveurs déjà fragiles financièrement." La Coordination Rurale estime que retenir les animaux en ferme rendra service aux abatteurs dans la mesure où ces derniers disposent actuellement de stocks conséquents. « Certains d’entre eux n’hésiteront pas à s’approvisionner chez nos voisins européens pour combler un éventuel manque. De plus, nombre d’entre eux annoncent des difficultés de personnels liées à la crise sanitaire : retenir les animaux réduira les abattages et cela demandera donc moins de main d’oeuvre… » C’est ce qui motive ce Syndicat pour ne pas embrayer derrière la FNB et la Confédération Paysanne en laissant pour autant bien entendu "libre arbitre à ses adhérents."

 

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