Comment valoriser les effluents en système herbager ?
Dans les exploitations avec beaucoup d’herbe, l’enjeu est de ne pas surfertiliser la petite part de cultures au détriment des prairies, en répartissant au maximum les effluents.
Dans les exploitations avec beaucoup d’herbe, l’enjeu est de ne pas surfertiliser la petite part de cultures au détriment des prairies, en répartissant au maximum les effluents.
Les prairies valorisent très bien les effluents d’élevage. « Par leurs valeurs fertilisantes, les engrais de ferme (fumiers, lisiers ou composts) sont capables de couvrir une bonne partie des besoins en fertilisants dans les fermes d’élevage. Il convient de les répartir au mieux entre cultures, prairies temporaires et prairies permanentes pour faire des économies substantielles sur les achats d’engrais minéraux », recommandent les chambres d’agriculture d’Auvergne-Rhône-Alpes dans leur guide régional de fertilisation. Afin de ne pas rentrer dans des plans prévisionnels de fumure aussi complexes que ceux qui sont établis dans les zones vulnérables, les conseillers ont élaboré des grilles de fertilisation pour les prairies et les cultures fourragères. La première indique les doses d’azote, phosphore et potasse préconisées par type de prairies et de cultures. Pour l’azote, cette grille prend en compte la régularité des apports d’effluents, la fourniture d’azote par les légumineuses, les restitutions au pâturage et bien sûr les rendements. Cette démarche est reconnue par le Groupement régional d’experts nitrates (Gren).
Ne couvrir que les besoins en P et K
La seconde grille donne des références sur les valeurs fertilisantes des effluents d’élevage. Pour l’azote, elle ne prend en compte que la part disponible l’année d’apport. « Le principe est de couvrir en priorité les besoins en P et K avec les effluents et de compléter avec de l’azote minéral si nécessaire, détaille Stéphane Violleau, de la chambre d’agriculture du Puy-de-Dôme. Au-delà, ce serait du gaspillage et dans des exploitations d’élevage classiques, sans hors-sol, on ferait des apports très importants sur une partie de la surface au détriment du reste. Dans le cas des prairies, l’analyse d’herbe (teneurs en N, P et K), qui indique son état de nutrition, permet de vérifier a posteriori la pertinence du conseil de fertilisation et de l’ajuster si besoin. »
Limiter les doses apportées pour préserver la flore
Dans leur guide, les conseillers préconisent des doses moyennes de 15 à 20 t/ha de fumier, de 20-25 m3/ha de lisier peu dilué ou 10-15 t/ha de compost, qui couvrent les besoins en phosphore et potasse de la majorité des prairies. Pour les cultures fourragères, les apports peuvent atteindre 25 à 30 t/ha de fumier, 35 à 40 m3/ha de lisier et 15 à 20 t/ha de compost. Le complément azoté varie de 0 à 30 unités/ha pour les pâtures extensives ou prairies conduites en fauche tardive, de 30 à 60 unités/ha pour les pâtures intensives ou prairies conduites en fauche précoce et de 60 à 90 unités/ha pour les prairies temporaires intensives récoltées en ensilage. Ces doses d’effluents conseillées permettent de préserver la qualité de la flore. Des volumes plus importants de fumier ou lisier dégraderaient le couvert végétal en favorisant notamment les espèces nitrophiles. « Si on dispose de quantités importantes de lisier, il vaut mieux faire deux apports dans l’année de 15-20 m3/ha sur la même parcelle qu’un seul de 30 m3 », préconise le conseiller fourrages.
Un tiers sur cultures et deux tiers sur prairies
Limiter les doses d’effluents au besoin P et K permet de couvrir le maximum de surface. Avec un assolement comprenant des cultures et des prairies, les apports seront réalisés prioritairement sur les parcelles qui n’ont pas de restitution par le pâturage. Et, en premier lieu les cultures. Parmi celles-ci d’abord les cultures fourragères annuelles qui exportent beaucoup d’éléments minéraux telles que le maïs. « En deuxième priorité, les cultures céréalières qui ont des besoins moins importants, quitte à faire une rotation avec un apport de fumier seulement sur le maïs, précise Stéphane Violleau. En limitant la dose au besoin P et K, au lieu d’apporter 40 tonnes de fumier par hectare sur le maïs, on passe avec 20-25 tonnes. Le résultat est le même. » En procédant ainsi, il reste de l’effluent qui pourra être utilisé sur les surfaces en prairie en priorisant les parcelles qui reçoivent le moins de déjections au pâturage. « Dans une exploitation avec un chargement classique, autour de 1,2 à 1,3 UGB/ha, et un hivernage de six à sept mois, un tiers des déjections à gérer est utilisé sur les cultures et deux tiers sur les prairies avec une grosse majorité sur les prés de fauche », indique le conseiller. Dans des systèmes tout herbe, le principe est le même : priorité aux prairies de fauche les plus exigeantes.
Les prairies valorisent tous les effluents
Quand on doit gérer les deux types d’effluents, le fumier ira préférentiellement aux cultures avant leur implantation et le lisier aux prairies. Si du fumier est épandu sur prairies, les apports d’automne ou d’hiver sont à privilégier. L’usage de fumier frais sur prairies est déconseillé. « En système tout herbe, conseille Stéphane Violleau, il est intéressant de composter au moins une partie du fumier. Cela permet d’épandre plus rapidement le produit que si on le laissait vieillir pendant six mois. Une exploitation tout herbe peut par exemple sortir une partie du fumier en milieu d’hiver, le composter et l’épandre au printemps, puis sortir l’autre partie en fin d’hiver et le laisser vieillir jusqu’à l’automne. »
Pour le lisier, la période la plus favorable va de la fin de l’hiver au début du printemps juste avant le démarrage des prairies. Un délai de huit semaines est idéal (environ 500 °C cumulés) entre l’épandage et la première exploitation au printemps pour bénéficier au mieux de la valeur azotée du lisier. Les apports peuvent aussi se faire pour les deuxième et troisième cycles d’exploitation de l’herbe si les conditions météorologiques sont favorables, voire assez tôt à l’automne sur des prairies poussantes.
En savoir plus
Vous pouvez vous référer au guide régional de fertilisation des prairies et cultures fourragères, à retrouver sur le site de la chambre d’agriculture du Puy-de-Dôme.