Restauration
« Braver les préjugés tenaces sur les producteurs locaux »
Échange avec Nicolas Portas, directeur de l’association nationale Agrilocal, un outil de mise en relation des fournisseurs de produits locaux avec les acheteurs de la restauration collective. Le bio y fait sa place doucement.
Quelle est la mission d’Agrilocal ?
Nicolas Portas - L’association nationale Agrilocal a été créée en juillet 2013. Nos adhérents sont les conseils départementaux, lesquels s’acquittent d’une cotisation et bénéficient d’une mise à disposition de l’outil Agrilocal. Il s’agit d’un service public dont la vocation est la mise en relation de fournisseurs de produits agroalimentaires locaux avec des acheteurs publics de restauration collective, écoles, hôpitaux, maisons de retraites… L’acheteur public lance son marché à travers la plateforme et des producteurs intéressés répondent en proposant leurs produits, biologiques, conventionnels, AOP ou IGP, selon la disponibilité du territoire.
3 500 tonnes de produits alimentaires locaux ont été commercialisées via Agrilocal
À l’heure actuelle, nous avons 36 départements adhérents. En 2018, 1993 acheteurs ont utilisé la plateforme, soit une progression de plus de 16 % par rapport à 2017. Depuis le lancement de la démarche, ce sont plus de 3 500 tonnes de produits alimentaires locaux qui ont été commercialisées via Agrilocal, soit près de 14 millions d’euros de chiffre d’affaires.
Que représente le bio ?
N. P. - Les produits bio locaux représentent 12 % des volumes commercialisés l’année dernière, et 15 % du chiffre d’affaires, en augmentation de 3 % par rapport à 2017. La demande ne se fait pas spécifiquement sur des produits bio, mais d’abord sur des produits locaux. Ensuite, selon les propositions, les acheteurs font leur sélection, bio ou pas. Les différents modes de production ne sont pas en concurrence sur un même territoire. Il arrive tout de même que certains marchés, comme ceux destinés aux cantines scolaires, se fassent uniquement sur des produits bio, toujours en tenant compte des disponibilités des départements. Certains ont des cultures maraîchères abondantes et structurées en bio comme la Drôme, d’autres proposent davantage de produits laitiers et carnés.
L’offre est calibrée en fonction des produits disponibles sur chaque département et en fonction de la saisonnalité. Les marchés peuvent se réaliser de gré à gré, avec des fréquences de livraisons et de volumes définis, par trimestre, avec plusieurs produits… avec un prix fixé au moment du contrat. Producteurs et acheteurs publics s’engagent sur la base de ce contrat et doivent le respecter sous peine de pénalités. Cela permet aux producteurs, y compris en bio, de diversifier leurs débouchés et d’asseoir une partie de leur trésorerie à l’avance.
Quelle est l’évolution à venir de l’association ?
N. P. - Les derniers adhérents sont la Haute-Marne, la Charente-Maritime et le Loir-et-Cher depuis peu. Généralement, ce sont les départements qui nous sollicitent, et aujourd’hui, plus d’une dizaine sont en cours de réflexion pour adhérer. Pour nous faire connaître et continuer de convaincre, nous organisons des animations à destination des responsables de commandes des établissements publics. Il faut continuer à les inciter à revoir leurs pratiques et leur montrer que travailler en local, c’est possible, aussi bien en termes de volumes qu’en termes sanitaires et qualitatifs. Il y a encore énormément de préjugés vis-à-vis des producteurs locaux, nous avons encore beaucoup à démontrer.
Chiffres clés
Association Agrilocal
• Créée en 2013 à l’initiative des départements du Puy-de-Dôme et de la Drôme
• 14 millions d’euros de chiffre d’affaires réalisés en 2018
• 2,1 millions d’euros de chiffre d’affaires en bio, soit 15 % du CA total, en hausse de 3 % par rapport à 2017
• Volume total commercialisé via la plateforme depuis 2013 : 3 500 tonnes de produits alimentaires locaux, dont 12 % de produits bio
• Nombre d’acheteurs publics utilisateurs en 2018 : 1993, soit +16 % par rapport à 2017