Besnoitiose bovine, une nouvelle stratégie de lutte collective à l’étude
Le contrôle de cette maladie parasitaire est difficile. Sur le terrain, une nouvelle stratégie d’assainissement, basée sur le dépistage et la réforme sélective et prioritaire d’animaux considérés comme fort contaminateurs, est en cours d’évaluation. Les premiers résultats sont encourageants.
Le contrôle de cette maladie parasitaire est difficile. Sur le terrain, une nouvelle stratégie d’assainissement, basée sur le dépistage et la réforme sélective et prioritaire d’animaux considérés comme fort contaminateurs, est en cours d’évaluation. Les premiers résultats sont encourageants.
La besnoitiose bovine, émergente en France et en Europe, est une maladie spécifique des bovins et qualifiée comme telle depuis 2010. Elle est due à un protozoaire parasite, Besnoitia besnoiti, qui se transmet de bovins infectés à bovins sains et à proximité immédiate, via des insectes hématophages comme les taons ou les stomoxes.
Son extension constante ces trente dernières années (forte augmentation du nombre de départements français touchés), ainsi que son impact médical et économique dans les élevages touchés préoccupent éleveurs et vétérinaires. « Pour ces raisons, sa gestion est devenue un enjeu national. Or, en l’absence de vaccins ou traitements efficaces… le contrôle de la maladie reste compliqué. Dès lors, la lutte contre cette maladie s’organise autour de deux axes principaux. À savoir, la protection des troupeaux sains et l’assainissement des troupeaux infectés, à travers le dépistage et la réforme des animaux contaminés, séropositifs », a évoqué Philippe Jacquiet, professeur de parasitologie à l’ENVT (école nationale vétérinaire de Toulouse) lors d’un webinaire organisé par l’UMT Pilotage de la santé des ruminants.
Deux axes principaux de lutte contre la maladie
La protection des troupeaux sains passe par des examens sérologiques systématiques à l’achat de nouveaux animaux. En Ardèche, par exemple, son dépistage fait partie intégrante du kit à l’introduction d’un bovin dans un cheptel. Il est ainsi obligatoire depuis le 1er octobre 2020.
Si le premier axe de lutte est assez aisé à mettre en œuvre, l’assainissement d’un troupeau infecté l’est moins et ce, d’autant plus si la prévalence sérologique est forte car le nombre d’animaux à réformer est très important. Leur élimination rapide pourrait mettre en péril la rentabilité de ces élevages.
Crédit : F.Poret
Actuellement, l’UMT Pilotage de la santé des ruminants, en collaboration avec la FRGDS, évalue une nouvelle stratégie d’assainissement basée sur le dépistage et la réforme sélective et prioritaire d’animaux considérés comme fort contaminateurs ("super-spreaders"). Autrement dit, les animaux ayant fait une forme clinique ainsi qu’un certain nombre de bovins infectés asymptomatiques participant aussi à la transmission du parasite car leur derme est infiltré par des kystes. « On dispose aujourd’hui de méthodes de dépistage de plus en plus performantes, permettant une hiérarchisation des animaux selon leur taux de contamination. Ainsi, une analyse PCR temps réel réalisée sur une biopsie de peau prélevée à la base de la queue, a permis de dépister une grande majorité des sujets porteurs de kystes et estimés comme fort contaminateurs. »
Capitaliser sur l’information
Une fois les analyses effectuées dans les différents laboratoires, les résultats ont aussitôt été communiqués aux éleveurs avant la pleine saison des taons et des stomoxes, afin qu’ils prennent leurs dispositions pour réformer le plus rapidement possible les animaux considérés comme « fort contaminateurs » ou tout du moins, les tenir à l’écart du reste du cheptel jusqu’à leur élimination, afin de diminuer la pression de transmission, de protéger le troupeau sain et d’aller, à terme, vers un assainissement progressif du cheptel. Par ailleurs, les éleveurs se sont tenus informés les uns les autres de manière à ne pas positionner les animaux fortement infectés sur des parcelles voisines en même temps. L’idée était de capitaliser sur l’information. « Une centaine de mètres permettent de limiter les contacts intercheptels. Les incidences sérologiques dans ces élevages ont ensuite été suivies. Aucune séroconversion n’a pas été observée alors que des voisins pouvaient avoir des séroprévalences fortes. » Lorsque l’élimination ou la mise à l’écart des bovins considérés à risque de transmission a pu être réalisée dans les plus brefs délais, les incidences sérologiques étaient relativement faibles six à dix-huit mois plus tard.
Dans le cas du contrôle de l’expansion de la besnoitiose bovine, il semblerait que la détection et l’élimination précoce de ce type d’individu à fort potentiel de transmission soient un moyen de réduire considérablement la diffusion du parasite. Ce travail a toutefois un coût (200 000 euros en frais d’analyses, de réformes, de temps de travail…). Mais les résultats sont à la hauteur. L’approche collective est très intéressante.
Toutefois, ces résultats méritent d’être consolidés par de nouvelles études et ne peuvent pour l’instant donner lieu à des conclusions générales.
Une maladie silencieuse
L’infection par ce parasite conduit le plus souvent à une forme asymptomatique. Seule, une très faible proportion d’animaux déclare une affection symptomatique (moins de 20 %). Cependant, chez une petite proportion de sujets atteints, des signes cliniques apparaissent avec, dans une première phase, de la fièvre et des écoulements nasaux et oculaires, puis, dans une seconde phase appelée phase chronique, un épaississement de la peau de l’animal (peau d’éléphant) en raison des kystes du parasite qui s’accumulent dans le derme.
Les taureaux infectés développent souvent une infertilité qui, dans le meilleur des cas, est temporaire mais aussi, hélas, souvent définitive.