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La fertilisation des prairies multi- espèces

Des essais d’Arvalis montrent qu’un minimum de fertilisation minérale profite à la productivité des prairies multi-espèces. Mais gare aux couteux excès d’azote qui peuvent pénaliser les légumineuses et leurs précieuses protéines.

L’apport d’azote permet une meilleure croissance des graminées. Mais attention à ne pas trop en mettre pour conserver l’équilibre graminées-légumineuses des prairies multi-espèces.
L’apport d’azote permet une meilleure croissance des graminées. Mais attention à ne pas trop en mettre pour conserver l’équilibre graminées-légumineuses des prairies multi-espèces.
© Ferme des Bordes

De 2017 à 2020, la ferme expérimentale des Bordes, à Jeu-les-Bois dans l’Indre, a testé la fertilisation azotée de prairies multi-espèces à base de gaminées (ray-grass anglais, fétuque et dactyle) et de légumineuses (luzerne et trèfle violet). L’apport d’azote a globalement profité au rendement de la prairie, avec 27 à 31 tonnes de matières sèches produites en trois ans contre 25 tonnes seulement pour le témoin sans fertilisation.

« Des apports d’azote sont possibles dès la première année de la prairie si les légumineuses sont bien installées, observe Carole Gigot d’Arvalis. Les apports dès la première année de la prairie tendent à augmenter légèrement le rendement mais diminuent la part de légumineuses, et donc la matière azotée totale du fourrage. Si les légumineuses sont mal implantées la première année, il semble plus sage d’attendre la deuxième année pour fertiliser ».

Dans les essais, un apport de deux fois 30 ou deux fois 45 kilos d’azote par hectare et par an semble être le meilleur compromis entre productivité et équilibre entre espèces. Le premier apport ayant été réalisé vers 200 °C jours (merci Date N’Prairie !) ou un peu plus tard lorsque les conditions météos n’étaient pas favorables à ce moment et le second cinq à dix jours après la première fauche. Cette préconisation de deux fois 30 à 45 kilos d’azote par hectare et par année est confirmée par l’analyse économique. Que l’ammonitrate soit à 250, 400 ou même 1 000 euros la tonne, l’apport d’azote reste moins coûteux que l’achat d’aliments pour compléter la ration.

Azote, phosphore et potasse pour les légumineuses

Attention aussi à ne pas faire l’impasse sur les engrais de fond. Une partie de la ferme des Bordes étant menée en agriculture biologique depuis 2000, elle n’était fertilisée que par son fumier de bovin. Or, les expérimentateurs ont observé une lente dégradation de la qualité et de la quantité des fourrages produits. Les prairies semées tardaient à s’implanter et les légumineuses avaient du mal à s’y maintenir durablement. Pour faire face à ce déclin, la ferme s’est résolue à fertiliser ses prairies avec de l’engrais bio (phosphate naturel, Patenkali…) ou avec des effluents d’élevages achetés à l’extérieur (fientes de volailles déshydratées et lisier de porc déshydraté). Les apports de phosphore et de potasse ont ainsi profité aux légumineuses et ont permis de redonner de la productivité aux prairies.

Cap Protéines dans l’Allier aussi

L’œil de l’expert :

Dans l’Allier, cinq exploitations sont suivies par la Chambre d’agriculture dans le cadre de l’action Cap Protéines : 2 en bovins viande, 1 en lait et 2 en ovins.

Francis Bougarel, conseiller fourrages et élevage bovins allaitants, nous apporte son regard au sujet de la fertilisation des prairies : « La fertilisation des prairies est un des leviers technico économiques qui se doit d’être optimisé au maximum d’autant plus compte tenue de la hausse des intrants que nous subissons depuis un an. Avant de penser éléments minéraux, il est indispensable de réfléchir à l’amendement pour limiter les risques de gaspillages, notamment d’azote, phosphore et potasse. Au-delà de l’aspect réglementaire, la dose à apporter se raisonne entre autres en fonction du mode de récolte prévue et des espèces qui composent la prairie. L’azote, en particulier, tend à favoriser les graminées au détriment des légumineuses. Avec cet élément, tout l’enjeu c’est d’assurer « le coup de fouet » au printemps pour un rendement optimal. Pour cela, pour les ensilages et enrubannages, en fonction des conditions météo, il faut prévoir d’apporter l’azote minéral au plus près des 200 - 220 °C à partir du 1er janvier (pour les foins, il est possible de décaler les apports). Le phosphore et la potasse ne doivent pas non plus être négligés en partie pour le développement racinaire et l’absorption des éléments minéraux. Qu’ils soient d’origine organique, par les engrais de ferme, ou minérale, ces deux éléments contribuent également au maintien d’une flore de qualité. Ensuite, la qualité des fourrages récoltés et/ou pâturés sera non seulement assurée par les espèces en place (proportion de bonnes et mauvaises graminées) mais aussi et surtout par le stade de ces espèces à la récolte (autre étape fondamentale à l’économie de concentrés azotés dans les rations d’hiver). C’est pourquoi, chaque semaine, à partir de début mars, des bulletins techniques « Info Prairie », spécifique du département, sont envoyés gratuitement par mail. Ces préconisations concrètes permettent d’anticiper les principales interventions de la campagne fourragère et en particulier la fertilisation.»

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