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FCO, MHE : quelle stratégie adopter face à la menace sanitaire ?

Virulence, vaccination, mouvements d’animaux, exportations... : éclairage sur la situation dans le Cantal et recommandations du GDS Cantal aux éleveurs d’ovins et bovins.

Brebis et agneaux dans une bergerie
La vaccination est vivement conseillé sur les troupeaux ovins compte tenu de la forte mortalité de la FCO.
© Patricia Olivier

Comme chaque fin de semaine depuis début août, le ministère de l’Agriculture a publié le 5 septembre, une nouvelle carte de la zone régulée au regard de la FCO-3, qui concerne désormais quasiment toute la moitié nord de la France avec 712 foyers recensés (le double de la semaine précédente). Pour autant, ce périmètre n’a pas évolué dans le Cantal et reste cantonné à 27 communes du nord-est du département. 

Lire aussi https://agriculture.gouv.fr/la-situation-de-la-fievre-catarrhale-ovine-fco-en-france


S’agissant de la FCO-8, on assiste à une recrudescence de cas depuis fin juillet, référencés dans tout l’Est-Cantal (depuis Saint-Flour) ainsi que quelques-uns sur le bassin d’Aurillac et le Sud-Ouest Cantal. Sachant, précise le GDS, que les cas autour d’Aurillac concernent des exploitations dont le siège social est dans ce secteur mais dont les animaux touchés sont en estives. Ce nouveau variant du sérotype 8 frappe sévèrement les élevages ovins avec de nombreux animaux atteints et de la mortalité, la maladie semble moins virulente chez les bovins. Ces nouveaux cas affectent des élevages qui n’ont pas été vaccinés ou bien dans des délais insuffisants pour permettre l’installation de l’immunité de l’animal avant l’arrivée des culicoïdes (moucherons piqueurs, vecteurs de la FCO). 

Lire aussi : https://www.gds15.fr/
À noter : des cas sont référencés cet été dans des cheptels déjà contaminés en 2023.
- MHE : le Cantal est en zone régulée depuis novembre dernier. Aucun cas recensé à cette heure.
Quelle stratégie adopter ?
- Surveillance : “Il faut redoubler de vigilance, accroître la surveillance des animaux, aller les voir quotidiennement, si possible matin et soir, pour pouvoir traiter rapidement si besoin”, avance Delphine Giraud, responsable sanitaire du GDS.
- Fuir les culicoïdes : il faut parallèlement que les animaux soient le moins en contact possible avec le vecteur : on évite donc de les sortir à l’aube et au crépuscule, périodes d’activité maximale des culicoïdes. Les moucherons étant attirés par l’eau, notamment stagnante, mais aussi la matière organique, donc les zones boueuses, souillées par les bouses et piétinées, on évite de faire pâturer bovins et ovins près des zones humides, du tas de fumier, et on déplace le râtelier régulièrement.
- Désinsectiser ? “Oui mais en le faisant de façon raisonnée et dans l’idéal en relation avec son vétérinaire”, répond Justine Gaudré, vétérinaire-conseil au GDS 15. Pas de systématisme ni de traitement de l’intégralité du troupeau, en raison des phénomènes de résistance à la seule molécule encore disponible et efficace. “Mais au moindre doute, dès qu’un animal montre des signes, il faut le désinsectiser pour éviter qu’un moucheron naïf le pique et transmette le virus au reste du troupeau”, poursuit la vétérinaire.

Vacciner en urgence ?

“On préfère toujours une vaccination par anticipation, avant la période de circulation du culicoïde, qui est forte de juin à fin octobre”, pose Justine Gaudré. 
Est-il dès lors judicieux de vacciner actuellement ? “On peut le faire aujourd’hui en urgence mais en étudiant la balance bénéfices sur risques”, selon la situation de l’élevage et son contexte. “Notre objectif est de donner tous les éléments scientifiques à l’éleveur pour qu’il puisse décider en connaissance de cause”, complète Delphine Giraud.
- Dans les zones où le virus circule beaucoup (comme dans l’Est-Cantal), si l’on n’a repéré aucun symptôme dans son troupeau, il est préconisé de vacciner en étant conscient que sur des animaux encore en période d’incubation, on risque d’ajouter une charge virale. Le fait qu’on arrive aussi dans la saison des vêlages et agnelages doit être pris en compte. “Certains éleveurs vont accepter de vacciner tout en sachant que comme tout vaccin, celui contre la FCO peut provoquer un pic d’hyperthermie suivi potentiellement d’un avortement. Mais a contrario, sans vaccination, le coût lié aux soins vétérinaires, à l’éventuelle perte de l’animal, au stress lié n’est-il pas plus lourd ?”, interroge la vétérinaire-conseil.
- Dans les élevages ovins, quel que soit le contexte et compte tenu du fort taux de mortalité, il faut vacciner. 
- Dans tous les cas, on ne vaccine que des animaux en bonne santé, sans aucun signe de faiblesse, ni symptôme FCO. Et si on vaccine, on vise le cheptel de souche et les animaux les plus sensibles.

Quel délai d’immunisation des animaux ?

* pour la FCO-8, le vaccin disponible actuellement (le BTVPur 4-8) nécessite deux injections à trois semaines d’intervalle (et un rappel annuel). L’immunité se met en place progressivement et est totale six semaines après la première injection. “Ça vaut donc encore le coup de vacciner avec cette immunité progressive, à la fois pour réagir en urgence et pour le long terme”, souligne Justine Gaudré, précisant qu’on ne peut pas compter pour l’heure sur une immunité collective.
* pour la FCO-3 : l’élargissement de la zone de vaccination volontaire à toute la région Auvergne-Rhône-Alpes annoncé le 30 août par le ministre permet à tous les éleveurs bovins et ovins du département qui le souhaitent, qu’ils soient ou non en zone régulée, de prétendre à cette vaccination prise en charge par l’État. Cette mesure court jusqu’au 31 décembre 2024. Depuis le 5 septembre, les vétérinaires cantaliens peuvent passer commande, sur demande de l’éleveur, de vaccins contre la FCO-3 sur une plate-forme dédiée. Seul le vétérinaire sanitaire de l’exploitation y est habilité. “Le conseil que l’on adresse aux éleveurs qui font le choix de vacciner est de prendre contact très rapidement avec leur vétérinaire pour passer commande même s’ils prévoient de vacciner dans un mois. En étant vigilants à commander pour les deux doses du vaccin en bovins”, prévient Delphine Giraud. En ajoutant que la virulence du sérotype 3 n’est a priori pas moindre que celle de son cousin BTV-8
Les deux vaccins pour la FCO-3 sont le Bultavo 3 en ovins à injection unique (immunité progressive, complète en trois semaines) et le Bleuvac-3 en bovins (et ovins). Ce dernier se fait avec deux injections espacées de trois semaines, avec là aussi une immunité progressive et complète au bout de six semaines (après la première injection). “Ces deux vaccins n’empêchent pas la virémie, c’est-à-dire le passage du virus dans le sang de l’animal piqué par un moucheron porteur, précise Justine Gaudré. Mais cela permet d’atténuer l’apparition des symptômes et leur intensité, de même que le taux de mortalité(1).” 
À noter : on ne peut injecter dans la même seringue les vaccins FCO-3 et 8 mais on peut vacciner contre les deux le même jour.

Pourquoi se déclarer foyer ?

Depuis le 9 août dernier, FCO et MHE sont des maladies à déclaration obligatoire, cette déclaration permettant la prise en charge par l’État des frais liés au prélèvement de sang, à l’analyse PCR et au diagnostic sachant que ni le vétérinaire ni l’éleveur ne sont capables de poser un diagnostic différenciant FCO et MHE. “Il faut dédramatiser cette déclaration comme foyer, cela ne bloque pas le cheptel mais seulement l’animal positif, fait valoir Delphine Giraud. Et dans l’hypothèse où des indemnités seront négociées pour indemniser les pertes en 2024, cela ne concernera que les foyers déclarés. Enfin, dans les élevages où la mortalité est forte, se déclarer foyer permettra de bénéficier d’une dérogation pour les aides Pac exigeant le maintien d’un nombre d’animaux.”

(1) Une étude conduite aux Pays-Bas et publiée le 7 juillet 2024 a comparé la létalité (taux de mortalité des animaux malades) de la FCO-3 en 2023 et en 2024, toutes espèces confondues : celui-ci est passé de 71,4 % 
à 10 %, les éleveurs ayant eu le temps de vacciner entretemps. 

 

Pas d'impact sur le commerce
Pour la FCO-8, aucun changement : les exportations se font selon deux protocoles : vaccination (par exemple des broutards pour l’Italie) ou désinsectisation + PCR négative pour les veaux laitiers exportés en Espagne.
Pour la MHE : aucun changement non plus ; pour sortir de la zone régulée, les animaux doivent être désinsectisés (minimum 14 jours) et testés négatifs. Le transport est autorisé dans les 14 jours suivants le test négatif. À noter : un vaccin (Hepisovac) est disponible depuis le 4 septembre pour les cheptels bovins, non pris en charge par l’État. La vaccination ne permet pas à ce stade de sortir de la ZR mais des négociations sont en cours pour le permettre.
Pour la FCO-3 : 
* pas de restriction de mouvement d’animaux au sein de la zone régulée (ZR)
* les sorties de la ZR vers la ZI (zone indemne) se font sous condition de : désinsectisation (14 jours minimum) + PCR + délai de 14 jours maxi pour le transport. La vaccination n’est pas  suffisante pour sortir de la ZR.
* exportations : que ce soit pour l’Italie ou l’Espagne, le protocole est le même, déjà en vigueur : désinsectisation + PCR FCO (à partir du 15e jour). Un seul prélèvement de sang pour l’analyse FCO et MHE. Si le test FCO est positif, on recherchera alors le sérotype.
Si un animal est positif à la FCO-3 ou à la MHE, cela ne bloque pas le départ des autres animaux du lot. L’animal positif peut rentrer sur l’exploitation dans l’attente de redevenir négatif, ou être autoconsommé ou partir vers un centre d’engraissement fermé. “L’Italie ne va pas fermer, rassure le GDS. Les conditions pour la FCO-3 n’impliquent rien de plus sur le terrain par rapport à ce qui est demandé pour la MHE, et aucune réglementation ne demande l’euthanasie d’un animal dépisté positif.”
À noter : à partir du moment où l’animal est vacciné contre la FCO, il est recommandé de ne pas faire réaliser de PCR dans les dix jours.
Dans tous les cas, “on ne transporte que des animaux en bonne santé apparente, c’est la base quelle que soit la maladie”, rappelle Delphine Giraud.
Rassemblements d’animaux : les animaux d’un cheptel dont le siège social est en zone indemne ne peuvent participer à un rassemblement en zone régulée. Là encore, quel que soit le contexte épidémiologique, “il faut toujours analyser le ratio bénéfices/risques” de participer à un concours, et prévoir une désinsectisation raisonnée par rapport à l’évènement où les animaux sont nettoyés et douchés.

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