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Des ovins viande et des céréales pour le moulin de la Borie sur le causse Méjean

Eva Moreau et Julien Sardenne viennent de reprendre l’élevage d’Alluech, à la suite du papa d’Eva, Éric Moreau. Le transformant en Gaec au passage, mais tout en souhaitant préservant ce qui avait été construit.
 

Eva Moreau et Julien Sardenne ont repris la ferme familiale
Eva Moreau et Julien Sardenne ont repris la ferme familiale
© Marion Ghibaudo

Eva Moreau et Julien Sardenne, assis à la table familiale à Mas-Saint-Chély, de grands cernes sous les yeux, poussent un ouf de soulagement. Ils ont réussi à rentrer une grande partie de leurs foins avant la pluie qui menace, ce samedi matin de juillet. Installé depuis avril 2023 sur la ferme d’Éric Moreau, dans l’optique d’en prendre la suite alors que ce dernier est parti en retraite en décembre la même année, le couple à la ville comme dans le travail s’habitue à l’outil qu’ils ont entre leurs mains. Et souhaitent le façonner à leur manière, tout en conservant l’héritage légué. « Mon papa s’est installé en hors-cadre familial en 1997, seul sur l’exploitation, à l’époque. Il avait bénéficié du dispositif d’atelier-relais ». En 2002, touchée par l’incendie qui avait ravagé près de 1 500 hectares, son exploitation est à reconstruire. Tâche à laquelle il s’attelle avec conviction. « Surtout qu’il venait de passer en bio en 2000. Il a laissé tomber le label le temps de remonter sa ferme et s’est réinscrit une fois que tout s’est remis en place », détaille Eva Moreau.

Une installation atypique
Si Eva Moreau et Julien Sardenne viennent de reprendre la ferme familiale parce qu’Eva le souhaitait, ils ont tous deux eu une autre carrière auparavant, bien que toujours dans le domaine agricole. « J’aime la zone et ce métier, c’était évident que je finirai par m’installer », confie la jeune agricultrice.
Eva Moreau était enseignante en lycée agricole en Corrèze, où elle a rencontré Julien Sardenne, dont les parents travaillent aussi en agriculture. « En Corrèze, c’est un peu différent le travail de la terre, s’amuse ce dernier. Tout reste vert une grande partie de l’année. Ici, il faut vraiment travailler les sols, ils sont pauvres ». Pour le couple, ne pas s’être installé tout de suite, et avoir pu faire d’autres expériences avant « est une chance et une opportunité. Mais c’est aussi du travail au moment de la reprise, parce qu’on a plein de choses à apprendre sur la zone et le métier ». Et Éric Moreau, bien qu’en retraite, revient aider les deux jeunes agriculteurs dès qu’il est dans le coin. « Le PAI nous a aussi beaucoup accompagnés ».
Souhaitant conserver le label bio, les deux jeunes agriculteurs ont aussi repris le troupeau de 420 brebis viande. « Papa vendait des lots d’agneaux pour l’engraissement ; nous, on va essayer de les engraisser sur place. Ce sont des agneaux à l’herbe puis finis pour l’engraissement. Nous l’avons fait pour sept agneaux pour la première année, dans l’optique d’une vente directe. Papa avait commencé à en faire, mais c’est trop de travail pour une personne seule ». Si quelques agneaux par an sont vendus en circuit court, ce ne sera pas la majorité de la production. « Ce sera surtout en fonction des commandes locales. Et pour en faire plus, il faudrait investir dans une remorque frigo. Un projet que nous avons noté pour notre quatrième d’année de plan d’investissement, pas avant ».

Des changements sur la ferme
Le troupeau est composé de BMC et de croisées en rouge du Roussillon, « une race qui est relativement rustique dehors ». Cependant, Eva Moreau et Julien Sardenne comptent ne racheter que des BMC, notamment des agnelles de renouvellement pour le moment. « S’il y a des croisées, on va les garder, nous ne sommes pas sélectionneurs », explique Eva Moreau. Quant aux investissements, le duo compte « y aller prudemment. Notre outil de travail est fonctionnel, papa était bien équipé, donc on ne va pas tout changer, on va plutôt garder le matériel actuel tant qu’on peut ». Chance pour le duo : Julien Sardenne « se débrouille très bien en mécanique agricole, ce qui est un vrai plus pour nous ». Même si le vendredi matin, avant la récolte, le valet de ferme n’a pas voulu démarrer, soudainement. « Ça fait partie des aléas du quotidien », soupire, fataliste, le jeune agriculteur.
Parmi les projets de changements que compte engager le duo : l’agrandissement de la bergerie. « On est un peu à l’étroit, pour le moment, surtout qu’on a beaucoup d’agnelles de renouvellement. Et puis, c’est aussi une question de confort de travail pour nous ». Si le troupeau est vieillissant, les associés le jugent encore productif, « nous allons l’augmenter tranquillement dans les années à venir, sans se presser ».
La question la plus pressante est celle du foncier : « pour le moment, nous ne sommes pas autonomes en fourrage, et on aimerait bien y arriver. Mais acheter du foncier, c’est compliqué », relate Julien Sardenne. L’un des postes les plus importants sur leur ferme est donc l’achat de foin. « Sur notre SAU, nous avons des prairies naturelles, temporaires, et une partie pour les céréales ». À terme, espèrent les associés, ils baisseront les cultures pour augmenter la part d’herbe.
Des céréales qu’ils produisent à la fois pour leurs brebis, et… Pour le moulin voisin de la Borie. « Pour les brebis, c’est du méteil. Et pour le moulin de la Borie, nous sommes adhérents d’une association, et chaque année, les semis sont décidés collectivement, en fonction des besoins du meunier. Cette année, c’est notamment du seigle et de l’épeautre ». Éric Moreau, le papa, en faisait déjà partie et était même le président de l’association la Farine du Méjean, qui gère la filière céréales sur le causse Méjean. Une production qu’Eva Moreau et Julien Sardenne continuent de bon cœur. Un petit groupe d’habitants du causse Méjean (dont Michel Pratlong) ont lancé le projet en 2012 avec l’idée de restaurer le vieux moulin de la Parade. Le groupe souhaitait y associer le développement d’une filière farine locale, afin de faire vivre ce patrimoine et d’étendre le projet aux agriculteurs du causse, tout en leur ouvrant un atelier de diversification. En 2024, pari réussi.
Si leur projet est construit dans la durée, les deux agriculteurs se posent des questions, notamment par rapport à la pression de la faune sauvage et la prédation, qui les inquiète. « Nos brebis sont en parc dehors, une partie de l’année, et trop loin de la bergerie pour les rentrer tous les soirs. Nos parcs font de 80 à 100 hectares, et à plus d’une heure et demie de marche avec les brebis. C’est ingérable ». Pour tenter de se protéger, les deux associés réfléchissent donc à l’utilisation de patous, mais avec la crainte qu’ils attaquent les randonneurs empruntant les GR proches. Autre réflexion en cours : la construction d’un tunnel dans les parcs. « Mais nous sommes en zone protégée, donc pour les autorisations, c’est compliqué. Et l’investissement est lourd ».
Des questions qui taraudent le duo, mais qui ne l’empêchent pas de se projeter pour vivre au mieux d’un métier qui les passionne.
 

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