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Abreuvement des bovins : « Nous avons des captages de sources dans toutes les pâtures »

Nicolas et Julien Chardeau, éleveurs de charolaises en Saône-et-Loire, ont aménagé sur les dix dernières années des captages de sources de façon à alimenter en eau propre la quasi-totalité de leurs pâtures.

À Mont-Saint-Vincent, en Saône-et-Loire, Nicolas et Julien Chardeau sont installés sur une colline qui culmine à 600 mètres d’altitude. C’est l’un des points les plus hauts du Charolais, sur socle granitique avec des sols très superficiels et souvent accidentés, et de nombreuses sources affleurent dans les prairies. « Depuis une dizaine d’années, petit à petit, nous installons des captages de sources », expliquent les éleveurs.

« Pour nous, l’aménagement des points d’eau est même prioritaire par rapport aux clôtures. » Ils pratiquent le pâturage tournant, avec une rotation tous les huit à dix jours, et ils se sont organisés de façon à disposer d’au moins un point d’eau par bloc, et quand c’est possible un par paddock.

Ils disposent maintenant de 25 bacs en béton de 1 000 litres, qui alimentent presque toutes les surfaces en pâtures. Il reste seulement quelques parcelles où les éleveurs doivent amener de l’eau avec une tonne : ce sont des parcelles de fauche sur lesquelles il y a des bovins au maximum de juillet à octobre.

Anticiper d’éventuels conflits d’usage

Pour investir dans les captages, Nicolas et Julien Chardeau sont motivés par le tarif de l’eau du réseau d’adduction et l’allègement des tournées d’eau. Le bassin sur lequel ils sont installés n’est pas actuellement en tension. Le fait que l’exploitation sorte du réseau communal d’eau est pourtant bien une façon d’anticiper les risques de conflit d’usage. C’est une des raisons pour lesquelles la communauté urbaine Le Creusot - Montceau soutient les aménagements pour l’approvisionnement en eau des éleveurs depuis fin 2019, après un diagnostic réalisé par la chambre d’agriculture de Saône-et-Loire.

L'élevage est sur l'un des points les plus hauts du Charolais et de nombreuses sources affleurent dans les prairies.

Une eau propre et fraîche toute l’année

« Jusqu’à maintenant, le débit des sources n’a jamais baissé, même en pleine sécheresse », constatent Nicolas et Julien Chardeau, qui sont bien conscients du « trésor » qu’elles représentent. « Les animaux boivent toujours de l’eau propre. » La sécheresse s’est pourtant fait fortement sentir sur les cinq dernières années, exceptée en 2021.

Les éleveurs sont aussi autonomes en eau l’hiver, pour les bâtiments. Un puits existe dans la cour de l’élevage de longue date. Et une source a été captée il y a une dizaine d’années à 200 mètres en contrebas de la ferme, avec un fort dévers. L’eau remonte dans les bâtiments grâce à une pompe électrique. « Nous avons en plus installé un surpresseur sur le bac réservoir de 8 000 litres à l’occasion de l’agrandissement d’un des bâtiments. L’investissement a représenté environ 4 000 euros. Le diagnostic réalisé par le groupement de défense sanitaire de Saône-et-Loire nous prouvait qu’il n’y avait plus les 12 litres par minute de débit requis pour que les 400 bêtes en bâtiment l’hiver boivent en quantité optimale. »

Aujourd’hui, le Gaec ne consomme pas un litre d’eau du réseau communal. Les éleveurs ont gardé un compteur et un abonnement pour pouvoir l’utiliser en cas de problème.

Des travaux réalisés par un entrepreneur

Pour réaliser les captages, les éleveurs font intervenir un entrepreneur qui est aussi sourcier. Celui-ci choisit la veine d’eau, la mouille ou la source la plus "rentable" et juge de la distance où positionner le bac en contrebas pour que le captage fonctionne au mieux. Au Gaec Chardeau, le dénivelé naturel permet d’avoir peu de longueurs de tranchées à faire.

Un système de trop-plein par un tuyau en PVC permet de maintenir le niveau d’eau dans l’abreuvoir constant et de ne prélever sur la source que l’eau qui est consommée par les vaches, le reste de l’eau étant restitué à la source.

Les tuyaux sont protégés par le fil de la clôture électrique en général, ou bien par des planches, pour que les bovins ne les déplacent pas. « L’hiver, on vidange les bacs mais l’eau continue de circuler. Il n’y a jamais de réamorçage à faire alors que ça peut être le cas avec d’autres systèmes », notent Julien et Nicolas Chardeau.

Pour ce type d’aménagement, une simple déclaration de travaux est à effectuer auprès de la direction départementale des territoires, qui vient ensuite expertiser l’impact de l’aménagement sur le milieu (avec la police de l’eau, car cela relève de la loi sur l’eau). Un avis officiel est ensuite rendu.

Chiffres clés

244 ha de SAU, dont 20 de céréales, 5 de maïs ensilage, 15 de prairies temporaires et 204 en prairies naturelles
160 vêlages de charolaises, vente de broutards de 450 kg et de femelles maigres

Côté éco

Sur leur dernière tranche d’investissement, pour six captages, Nicolas et Julien Chardeau ont payé :

4 000 euros pour l’abreuvoir et les drains ;
500 euros de tuyaux PVC pour le système de trop-plein ;
3 000 euros de terrassement et 400 euros de gaines, soit un coût moyen d’environ 1 200 euros par captage. Mais les tarifs sont très variables d’une exploitation à une autre selon la topographie et les ressources en eau disponibles.
L’aide de la communauté urbaine représente 40 % du montant de l’investissement plafonné à 18 000 euros HT.

Avis d'expert : Sophie Lapointe de la chambre d’agriculture de Saône-et-Loire

« Un accompagnement autour des projets d’aménagement des ressources en eau »

Sophie Lapointe, Chambre d'agriculture de Saône-et-Loire

« Le Gaec Chardeau a eu la volonté d’atteindre une autonomie totale en eau d’abreuvement aussi bien au pré qu’en bâtiment. On y retrouve deux types d’aménagements : captage de source ou puits filtrant en mouillère. L’abreuvoir est délocalisé par rapport à la source d’eau, ce qui lui permet d’être aménagé sur sol stabilisé. Les bêtes gagnent en confort d’accès, en volume d’eau disponible et en qualité d’eau. L’éleveur sait qu’il peut compter sur un volume d’eau. C’est moins d’inquiétude et moins de tours d’eau en cas de sécheresse.

Il faut souligner l’importance de la quantité et de la qualité de l’eau distribuée, en période très sèche l’été mais également en période sèche l’hiver (comme nous l’avons vécu en 2022-2023). De manière concertée, le GDS et la chambre d’agriculture accompagnent les éleveurs pour les sensibiliser à cette problématique.

L’aide de la communauté urbaine Le Creusot-Montceau est unique dans le département. Toutes les autres aides portent sur la récupération des eaux de toitures. Sauf que celle-ci ne peut pas se faire partout et qu’il faut porter une attention toute particulière à la qualité de l’eau redistribuée. Ici, l’exploitant est libre de choisir sa technique, son matériel et son entrepreneur. Les projets sont adaptés à chaque exploitation. La collaboration avec les services de la direction départementale des territoires permet de s’assurer que le projet est bien conforme à la réglementation (la déclaration préalable est normalement obligatoire pour tous).

En Saône-et-Loire, une charte départementale existe par ailleurs pour que tous les organismes qui interviennent auprès des éleveurs sur le thème des travaux hydrauliques parlent bien d’une même voix (services de l’État, entrepreneurs de travaux publics, organismes agricoles). Elle a été remise à jour fin 2022. C’est une mine d’informations pour savoir ce qu’il faut faire et ce qui est interdit pour le curage des fossés, une création d’étang, un forage profond, un captage de mouillère… ».

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