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Avalanche d’innovations contre le gel

Produit fluidifiant la sève, drone soufflant ou encore générateur de brouillard. Voici les nouvelles solutions de lutte contre le gel.

Un drone ventilant et chauffant

Il a remporté le second prix ex æquo du concours Agreen Startup, organisé par les chambres d’agricultures sur le Salon de l’agriculture 2018. Le drone Protégel vise, comme son nom l’indique, à protéger les cultures du gel. Selon son concepteur, Gérard Strumpler, ce matériel, qui n’en est encore qu’au stade de projet, aura la particularité de pouvoir lutter aussi bien contre le gel radiatif que contre l’advectif. Dans le premier cas de figure, l’appareil volera à environ 10 m de haut et enclenchera ses ventilateurs, ce qui provoquera un brassage des couches d’air. Dans la seconde configuration, il se positionnera à 5 m d’altitude puis allumera ses brûleurs au propane qui émettront des flammes et réchaufferont l’air. Voilà pour le principe.

D’un point de vue matériel, le drone devrait ressembler « à un ventilateur flottant » illustre Gérard Strumpler. Pour ce faire il devrait être constitué de cinq hélices : une grosse centrale et quatre petites latérales directionnelles. D’une envergure de 1,50 à 2 m, et d’un poids de 25 kg — gaz et carburant compris — il embarquera des sondes de températures, et à plus long terme des caméras infrarouge lui permettant de cibler les zones les plus froides. Fonctionnant avec un moteur thermique, il devrait disposer d’une autonomie de 2 à 3 heures et pourrait protéger entre 3 et 5 ha pour une élévation de température de 2 à 3 °C. « Pour prolonger son vol, il suffira de refaire le plein de carburant », note Gérard Strumpler. Le drone sera automatique : l’utilisateur n’aura qu’à appuyer sur un bouton pour le lancer. Il fera sa ronde seul. Le prototype devrait être testé en 2019, pour un début de commercialisation en 2020, aux alentours de 20 000 à 30 000 euros l’appareil, formation du pilote et contrat de maintenance inclus.

Un brouillard protecteur

Créer un brouillard artificiel pour lutter contre les gelées blanches ; tel est le principe du procédé K-30 VitiProtect, commercialisé dans le Nord de la France par BVdis et dans le Sud par Pulsfog. « C’est une technologie qui est employée depuis des décennies en horticulture, pour la désinfection des serres », annonce Pierrick Bureau, gérant de l’entreprise BVdis, à la Haye-Fouassière.

Le procédé consiste à projeter un brouillard, ici constitué à 50 % d’eau et à 50 % d’huile végétale et d’oligo-éléments, sur la vigne, afin de « créer un écran protecteur qui évite les pertes de radiation de la plante et du sol durant la nuit, et conjure toute brûlure des bourgeons par le soleil au lever du jour », poursuit Pierrick Bureau. Le vigneron doit passer l’appareil dès que la température atteint 0 °C. « Le plus simple est de coupler son utilisation avec celle de sondes de température, placées dans les parcelles et qui envoient des relevés sur les smartphones », conseille Pierrick Bureau.

La machine, qui s’installe sur un tracteur, un enjambeur, un quad ou encore un 4x4, fonctionne comme un réacteur d’avion. Le moteur à essence aspire l’eau, et le mélange d’huile végétale et d’oligo-éléments (produit Flogoligo) dans un tube de réaction. Ce mélange est propulsé sous forme de brouillard grâce à l’explosion du réacteur, à une température de l’ordre de 40 °C. « Il faut passer en moyenne 10 à 15 minutes par hectare, indique Pierrick Bureau. Sur une nuit de 4 heures, on couvre environ 8 à 10 hectares. » Selon lui, le procédé protège jusqu’à – 5 °C, avec une rémanence variable selon les conditions de travail. En absence d’embruns, le brouillard peut rester dans la parcelle durant une heure. Mais il s’évapore plus vite en cas de vent. « C’est pour cela que nous conseillons souvent de tourner autour de la parcelle, souligne le gérant. Ou de se placer au bon endroit. Il faut profiter de la nuit et de ce qui s’y passe. » Il préconise de progresser entre 4 et 7 km/h.

L’appareil pèse 250 kg à plein, et dispose d’une autonomie tant en essence qu’en Flogoligo, de 2 à 2,5 heures. Son encombrement est de 1,10 m de large, pour 1 m de haut et 1,70 m de long, canon oscillant compris. Au niveau des coûts, la machine vaut 19 750 euros, et le Flogoligo revient entre 90 et 120 euros l’hectare, selon le cours de la glycérine, qui est fluctuant. Pour l’heure, aucun vigneron français n’a encore testé ce procédé.

Une aspirine végétale qui fluidifie

Lutter contre le gel en même temps que contre le mildiou et l’oïdium. C’est le bénéfice collatéral des produits mis au point par l’agronome et homéopathe Bernard Lachaise, à la tête de l’entreprise Getade Environnement, en Charente-Maritime. Ces produits luttent généralement contre trois pathogènes à la fois. « En viticulture, on peut choisir d’avoir une formulation contre le mildiou, l’oïdium et le black-rot ou contre les deux premiers champignons et le botrytis », illustre-t-il. La préparation, remise à jour annuellement, inclut du cuivre, du soufre, du lithothamne, de l’argile et un prémix. Ce dernier est constitué de nosodes, obtenus à partir des souches des champignons de l’année précédente, dynamisés en homéopathie et additionnés d’aspirine végétale. « Cette dernière substance permet de véhiculer les produits dans la plante et facilite leur assimilation, expose Bernard Lachaise. Elle fluidifie également la sève. » Avec comme conséquence de rendre les vignes moins gélives, comme l’a montré le printemps 2017. « Lorsque le gel est survenu en Provence, mes clients avaient déjà traité avec mes produits à deux reprises, rapporte-t-il. L’apex a gelé comme sur les autres parcelles. Mais en revanche, les raisins sont restés intacts. Et les contre-bourgeons ont été fructifères. Au final, ils ont vendangé 38 hl/ha. »

Mais aussi, à l’étranger

Outre-Atlantique, SIS technologies et Shur Farms Frost Protection ont développé des systèmes basés sur l’extraction d’air froid. Les machines aspirent l’air froid du sol et l’éjectent à environ 10 m de haut.

Commercialisé en Nouvelle-Zélande, le Heat Ranger est un mélange de plusieurs technologies (Frostbuster, SIS et brasseur d’air). Il se compose d’un brûleur GPL de 1 400 kW et d’un ventilateur industriel de 1 300 tr/min, délivrant un air aux alentours de 30 °C. La machine, qui mesure 5 m de haut, protège jusqu’à 20 hectares. Selon la firme, elle est aussi relativement silencieuse, avec des émissions de l’ordre de 30 à 54 dB à 200 mètres.

Le KDL d’Agro-K est un engrais foliaire à base de potassium dextrose lactose, qui a pour objet d’augmenter le taux de potassium et de sucre dans la plante et donc de limiter le risque de gel. Selon le Comité Champagne, ce produit a donné de bons résultats aux États-Unis jusqu’à -5 °C.

Des bactéries antigel, telles que Pseudomonas Syringae ou Pseudomonas fluorescens A506 sont à l’étude.

Plus d’infos sur les outils de lutte contre le gel dans Réussir Vigne de février 2017, pages 12 et 13.

 

voir plus loin

Les différents types de gel

Une gelée blanche (gel radiatif) se caractérise par un point de rosée supérieur à 2,2 °C, par temps humide.

Une gelée noire (gel radiatif) a un point de rosée inférieur à 2,2 °C et l’air est sec.

Un gel advectif est dû au passage d’un front froid avec une vitesse du vent qui peut être élevée. L’inversion de la température est faible ou nulle.

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