Aller au contenu principal

Irrigation du maïs : bien positionner le dernier tour d’eau en fonction de l’humidité du grain

À une humidité à 45 ou 50 % du grain et selon les situations, l’irrigation peut être arrêtée sans porter préjudice en rendement. Encore faut-il bien identifier ce stade de développement chez le maïs. Plusieurs méthodes existent.

Au delà d'une humidité à 45 % des grains, une irrigation n'est pratiquement jamais valorisée.
Au delà d'une humidité à 45 % des grains, une irrigation n'est pratiquement jamais valorisée.
© C. Gloria

Le maïs a besoin d’eau jusqu’au remplissage de ses grains. Mais jusqu’à quel stade précisément pour produire le maximum de rendement ? La période de sensibilité au stress hydrique s’étend du stade 10 feuilles au stade 50 % d’humidité des grains (H50). « Physiologiquement, le maïs peut gagner en rendement jusqu’à 32 % d’humidité (H32) des grains (maturité physiologique), mais entre H45 et H32, la plante consomme peu d’eau. Après H45, une irrigation n’est pratiquement jamais valorisée, explique Sophie Gendre, spécialiste de la gestion quantitative de l’eau chez Arvalis. L’irrigation apporte presque toujours un supplément de rendement à H50 selon de nombreux essais, mais à deux conditions : que le temps reste chaud et sec et que la réserve facilement utilisable (RFU) soit en grande partie épuisée à cette période. »

L’objectif est d’assurer la couverture des besoins en eau jusqu’à 45 % d’humidité du grain et d’épuiser la RFU du sol. L’irrigation peut être stoppée à H50 pour les sols profonds sur lesquels la réserve utile est moyenne à élevée avec une eau contenue dans le sol suffisante pour atteindre le stade H45 sans impact sur le rendement. Pour les sols superficiels, elle ne devra pas être arrêtée avant H45. « Un tour d’eau apporté à ce stade H45 n’est valorisé que dans les sols à faible ou très faible réserve utile (sols sableux, sols très superficiels). Dans tous les cas, au-delà de ce stade, il devient inutile », souligne Sophie Gendre.

Plus de 40 €/ha d’économie en évitant un tour d’eau inutile

L’intérêt d’arrêter à temps l’irrigation est économique pour éviter d’enclencher un tour d’eau inutile pour le rendement ou la qualité des grains. « D’un point de vue énergétique, un arrosage coûte 1,20 euro du millimètre apporté à l’hectare avec une pompe alimentée en GNR et 0,80 euro en électrique, mais ceci est variable selon les abonnements pris par les agriculteurs », précise Jonathan Dahmani, responsable de l’équipe irrigation à la chambre d’agriculture d’Alsace. Le coût d’un tour d’eau de 30 mm est donc de l’ordre de 40 euros de l’hectare au maximum, auquel il faut ajouter quelques euros pour le coût de l’eau consommée à travers la redevance versée à l’agence de l’eau. Tous ces frais sont appelés à augmenter dans les années qui viennent.

Comment reconnaître ces stades cruciaux d’humidité du grain chez le maïs ? Généralement, la fin d’irrigation a lieu entre fin août et début septembre. Pour chaque variété, à partir de la floraison femelle, les sommes de températures enregistrées permettent de prévoir la date de ces stades. Les calculs pour établir cette date sont complexes, mais il existe des outils de pilotage de l’irrigation, tel que Irré-lis, qui donnent accès à ces informations. D’autres outils d’aide à la décision intègrent les bilans hydriques jusqu’aux préconisations sur les dates d’arrêt d’irrigation : Net-irrig sur l’interface Seabex en région Centre, outils de Terranis basé sur les images satellites (Pixagri irrigation, Wago)…

Une méthode visuelle des grains accessible pour estimer l’humidité

Beaucoup plus accessible, il existe une méthode visuelle de l’état morphologique du grain avec une grille établie par Arvalis. Sur la base d’un protocole de prélèvement à respecter, il faut observer les grains de la couronne exposée en cassant l’épi en deux et mesurer la proportion de la zone orange brillante d’allure vitreuse au sommet de chaque grain avec le reste du grain plus clair. À l’aide de la grille, on peut établir une note qui permet de savoir où se situent les grains par rapport à l’humidité à 50 % ou 45 %. La méthode n’est pas très précise, mais elle permet au moins de savoir si l’on approche du stade où il faudra se préparer à stopper l’irrigation.

 
Irrigation du maïs : bien positionner le dernier tour d’eau en fonction de l’humidité du grain
© Arvalis

Des organismes de conseil facilitent la tâche des agriculteurs en proposant comme service une prévision plus précise du stade d’arrêt d’irrigation, avec la mesure du poids sec des grains par rapport à leur poids humide qui donne le taux d’humidité. « Nous proposons cette mesure à travers le service Irristop maïs grain, présente décrit Rémi Pélissier, conseiller agronomie spécialisé dans l’irrigation à la chambre d’agriculture d’Eure-et-Loir. Nous demandons aux agriculteurs intéressés par ce service de ramasser dix pommes de maïs par variété et par champ. Ces panouilles fraîches doivent être emballées dans un sac plastique. Une tournée en voiture est organisée pour le ramassage de ces sacs. Le soir même, les pommes de maïs sont passées à l’étuve et nous avons le résultat 36 heures plus tard sur le taux d’eau dans les grains»

Dans les jours qui suivent, le conseil est transmis aux agriculteurs concernant la date d’arrêt et la quantité d’eau nécessaire pour finir le cycle en fonction des pluies et des irrigations effectuées. Pour l’agriculteur, le service est facturé à 35 euros par échantillon de dix épis avec le ramassage à domicile des épis.

Des mesures sur une quinzaine de parcelles pour l’Alsace

En Alsace, la chambre d’agriculture propose une autre forme de service en informant les agriculteurs sur l’avancement des stades de maïs de la région. Elle se base sur le suivi d’un réseau chez des agriculteurs d’une quinzaine de parcelles équipées de sondes capacitives dans le sol. « Nous avons différentes parcelles avec des variétés de précocités variées pour avoir une bonne représentativité des situations de la région, détaille Jonathan Dahmani. Pour la fin d’irrigation, des épis de maïs sont prélevés puis passés à l’étuve pour en tirer la mesure de l’humidité des grains. Les informations sont apportées de façon collective aux agriculteurs abonnés à notre flash irrigation, un bulletin paraissant deux fois par semaine en période d’arrosage (1). Nos mesures démarrent souvent quand on arrive à 60 % d’humidité dans les grains, au mois d’août. À cette période, on perd aux alentours de 1 % d’humidité par jour », note le conseiller. La tardiveté des variétés est prise en compte dans les messages sachant qu’il y a une différence d’une semaine à dix jours entre les plus précoces et les plus tardives.

Fort de ces informations, l’agriculteur a la possibilité de faire faire les mesures sur ses propres parcelles au moment le plus opportun. « Avec une irrigation arrêtée trop tôt, on perdra en poids de mille grains (PMG) sur les récoltes. Si on prolonge l’irrigation trop tardivement, cela ne sert à rien économiquement avec un tour d’eau inutile, souligne Jonathan Dahmani. L’enjeu du dernier tour d’eau est crucial. »

(1) Abonnement de 100 euros par an avec différents services en plus des conseils sur l’irrigation.

L’irrigation après 50 à 45 % d’humidité n’apporte pas de gain de rendement

Des mesures anciennes d’Arvalis ont permis d’établir qu’à partir de 50 à 45 % d’humidité du grain (en ordonnée), on ne perdait plus rien en rendement (indice de perte en abscisse) en arrêtant d’apporter de l’eau. Il n’y a pas de plus-value à pousser l’irrigation plus loin. Des données d’essais réalisés en Alsace plus récemment confirment les mêmes résultats. En revanche, en arrêtant l’irrigation trop tôt, la perte de rendement est significative : entre 5 et 10 % en moins pour une humidité du grain à 65 % par exemple.

 

 
Graphique - L’irrigation après 50 à 45 % d’humidité n’apporte pasde gain de rendement - Perte de rendement en maïs grain selon l’humidité du gain à la dernière ...
Graphique - L’irrigation après 50 à 45 % d’humidité n’apporte pasde gain de rendement - Perte de rendement en maïs grain selon l’humidité du gain à la dernière irrigation (essais dans la Drôme) © Source : Arvalis

Les plus lus

<em class="placeholder">Mathieu Beaudouin est agriculteur à Évry-Grégy-sur-Yerre, en Seine-et-Marne.</em>
Mauvaises récoltes 2024 : « On rogne sur notre rémunération et sur l’entretien du matériel, faute de trésorerie suffisante »
Mathieu Beaudouin est agriculteur à Évry-Grégy-sur-Yerre, en Seine-et-Marne. Il témoigne de ses difficultés depuis un an liées…
<em class="placeholder">Agriculture. Semis de blé. tracteur et outil de travail du sol à l&#039;avant. agriculteur dans la cabine. implantation des céréales. lit de semences. semoir Lemken. ...</em>
Semis tardif de céréales : cinq points clés pour en tirer le meilleur parti

Avec une météo annoncée sans pluie de façon durable, un semis tardif de blés et d'orges dans de bonnes conditions de ressuyage…

<em class="placeholder">Bord de champ inondé après un excès de pluie en bordure d&#039;un champ de céréales. Avril 2024 dans le nord de l&#039;Eure-et-Loir</em>
Difficultés de trésorerie : quelles sont les mesures existantes pour faire face ?

Les mauvaises récoltes pèsent sur les trésoreries. Des mesures ont été annoncées par l’État alors que la MSA, les banques et…

<em class="placeholder">Moisson du Colza dans les plaines cerealieres de la Marne. Agriculteur moissonnant sa parcelle de Colza avec une moissonneuse bateuse Claas 740 Lexion.  Livraison du Colza a ...</em>
Prix du blé et du colza 2024 : quand vendre votre récolte ?

En 2024, l’embellie du prix du colza depuis quelques semaines offre quelques opportunités aux producteurs de grandes cultures…

Pierre Devaire, agriculteur en Charente, dans une parcelle.p
Récoltes 2024 : « une campagne traumatisante » pour les céréaliers du Poitou-Charentes

L’heure est au bilan chez les producteurs de céréales, au terme d’une campagne 2024 qui fut difficile du début à la fin. Les…

<em class="placeholder">Destruction d&#039;un couvert de moutarde au déchaumeur.</em>
Couverts d’interculture : quand faut-il les détruire ?
Plusieurs critères sont à prendre en compte pour détruire son couvert d’interculture à la bonne période, en entrée ou en sortie d…
Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 90€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Grandes Cultures
Consultez les revues Réussir Grandes Cultures au format numérique sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce à la newsletter Grandes Cultures