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Fertilisation azotée du blé : le pilotage intégral va faire ses armes en 2025

Appi’N et CHN Conduite : ces deux outils de pilotage intégral de la fertilisation azotée sur blé sont toujours en test. Mais le second va être à l’épreuve du feu début 2025 via le service Farmstar.

<em class="placeholder">Pince N-tester mesurant sur les feuilles les besoins du blé en azote.</em>
L'outil Appi'N de pilotage intégral des apports azotés nécessite des mesures des besoins du blé avec N-tester.
© Chambre d'agriculture Grand Est

Un pilotage de tous les apports d’azote sur blé : les outils Appi’N et CHN Conduite apportent cette aide à la décision. Ils sont en cours d'essais depuis plusieurs années. Ils apportent des gains de marge dans la majorité des situations testées grâce à une augmentation de rendement et du taux de protéines, parfois combinée à une économie d’azote, comme cela a été mesuré sur 67 essais entre 2021 et 2023 pour CHN Conduite comparé à des pratiques classiques chez les agriculteurs (voir tableau ci-dessous).

Le fonctionnement de CHN Conduite est basé sur des modèles de culture et de dynamique de l’azote, « avec l'objectif d’atteindre le potentiel de rendement de la parcelle ainsi qu'un taux de protéines élevé avec le minimum d’azote possible, explique François Taulemesse, d’Arvalis, institut qui travaille à la mise en pratique de cet outil. Très peu d’agriculteurs sont prêts à dévouer du temps à un pilotage fin de chacune de leurs parcelles de blé avec des mesures au champ. Couplé à un diagnostic satellitaire, CHN Conduite est un outil clé en main où l’agriculteur n’aura pas l’obligation de faire un diagnostic de sa parcelle. » Déjà à l’essai dans le service Farmstar depuis deux ans, l’outil va véritablement démarrer en 2025, en étant proposé à des coopératives partenaires de Farmstar.

L’agriculteur garde la main sur les périodes d’apports

Pour le service CHN Conduite, l’utilisateur sera libre de décider du nombre d’apports d’azote (pas moins de trois) et des périodes d’intervention clés. « Sur la base d’informations apportées sur la parcelle et du diagnostic satellitaire, l’outil préconisera les doses d’azote à apporter aux dates d’intervention fixées par l’agriculteur, explique François Taulemesse. Ces conseils seront anticipés par rapport aux dates d’apport pour laisser le temps à l’agriculteur de choisir le moment adéquat pour valoriser au mieux l’azote, en prévision d’une pluie par exemple. L’outil a la capacité à adapter le pilotage au contexte climatique de l’année et de la parcelle », assure-t-il.

 

 
<em class="placeholder">tableau des marges obtenues sur blé  avec l&#039;utilisation de l&#039;outil CHN Conduite.</em>

CHN Conduite n’est pas encore adapté à certaines situations comme les sols de craie où la dynamique de l’azote dans le sol est complexe. L’outil est encore en phase de mise au point pour d’autres situations comme l’agriculture de conservation des sols notamment en présence élevée de quantités de résidus en surface.

Une réduction moyenne des quantités d’azote de 25 unités avec Appi’N

L’Inrae et les chambres d’agriculture portent le développement d’Appi’N, autre outil permettant un pilotage des apports azotés de la sortie d’hiver à la floraison. « Pour Appi’N, la clé d’entrée est d’économiser de l’azote en comptant sur la capacité du blé à supporter un stress léger de besoin en azote tout en préservant le rendement », explique David Leduc, de la chambre d’agriculture des Pays de la Loire. « En cinq ans d’expérimentations menées sur une cinquantaine de parcelles, nous avons obtenu en moyenne une réduction des quantités d’azote de 25 unités sans diminution de rendement ni du taux de protéines. La marge était augmentée de 38 euros par hectare avec l’utilisation d’Appi’N par rapport à la méthode du bilan, présente Honorine Peureux-Gabriel, chambre d’agriculture du Grand Est. Sur certaines situations, il pouvait y avoir une légère baisse de rendement mais jamais de marge négative. »

L’utilisation de l’outil présente l’avantage de pouvoir se passer de mesures de reliquats de sortie d’hiver et il n’impose pas d’établir un objectif de rendement, comme pour la méthode du bilan. À la différence de CHN Conduite, le fonctionnement d’Appi’N n’est pas basé sur une modélisation des besoins de la culture mais sur des mesures à réaliser au champ. Il nécessite la mise en place d’une zone surfertilisée dans la parcelle et des mesures de besoins du blé avec la pince N-Tester au moins tous les quinze jours de la mi-février à début mai. Conseillère agronome à la chambre d’agriculture de la Marne, Aliénor Deleplanque ne nie pas le caractère chronophage de ces mesures mais met en avant « l’adaptation d’Appi’N à l’année climatique en cours. On mesure les besoins de la plante à l’instant T, ce qui est moins le cas pour l’outil CHN ».

Un décalage de près d’un mois sur le premier apport d’azote

En pratique dans les essais, l’outil Appi’N retarde la date du premier apport de 15 à 25 jours par rapport à une fertilisation classique où de l’azote est apporté dès la mi-février. « On peut attendre début mars sans impacter le rendement », assure Aliénor Deleplanque, même si les blés présentent alors un certain jaunissement. Les concepteurs d’Appi’N ont fixé un stade limite où le blé doit recevoir de l’azote : épi 1 centimètre avec un apport de 40 unités, même en situation de sécheresse durable où l’engrais risque de ne pas être assimilé par le blé.

L’outil est toujours à l’essai. Le défi sera de réduire le temps consacré aux mesures au champ, pour rendre la méthode véritablement opérationnelle sur le terrain. « Nous étudions la possibilité de coupler l’outil à des mesures satellitaires. Une autre idée serait de constituer un réseau de parcelles représentatives d’un territoire pour réaliser les mesures N-Tester auxquelles les agriculteurs pourraient se référer pour appliquer la méthode sans avoir à faire leurs propres mesures », expose Honorine Peureux-Gabriel. Un développement massif d’Appi’N n’est pas envisageable. La méthode serait réservée plus particulièrement aux zones à fort enjeu environnemental en termes d’azote.

Officialisation dans le programme d’actions Nitrates

Dans le programme d’actions national Nitrates paru début 2023, les outils de pilotage intégral ont été reconnus et mentionnés comme des alternatives au plan prévisionnel de fumure (PPF), uniquement sur blé tendre. En clair, l’utilisation d’un tel outil est officialisée pour maîtriser les flux d’azote en zone vulnérable et il dispenserait l’agriculteur de produire un PPF. « Il faudra une note de cadrage nationale pour qualifier précisément ce qu’est un outil de pilotage intégral, pour éviter toute dérive dans les services proposés », souligne David Leduc. Pour les plans d’actions régionaux, les groupes régionaux d’expertise nationale (Gren) devront encadrer l’utilisation de tels outils.

Pilotage intégral en projet sur colza

Comme pour CHN Conduite et Appi’N, l’indice de nutrition azotée (INN) sera utilisé comme indicateur pour mettre au point un outil de pilotage intégral de la fertilisation azotée du colza. Un projet dénommé Pifec a démarré pour cette culture le 1er janvier 2023 pour une durée de trois ans. Il est piloté par Terres Inovia et il associe deux unités de recherche d’Inrae.

 

 
<em class="placeholder">Carte Farmstar d&#039;une parcelle avec les zones de modulations d&#039;apports d&#039;engrais azotés.</em>
L'outil CHN Conduite sera proposé à des agriculteurs à partir de 2025 via le service Farmstar par des distributeurs. © Arvalis

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